(AFP) – Christel Heydemann, directrice générale d’Orange, a prévenu mercredi des risques de coupures du réseau mobile français cet hiver, et par conséquent d’un possible impact sur “l’accès aux services de numéro d’urgence“, en cas de coupures de courant temporaires et localisées qui pourraient être organisées face à des pénuries d’électricité.
“Il est illusoire d’imaginer qu’en cas de délestage, on saura maintenir un service continu pour l’ensemble des Français. Les services mobiles, s’ils sont éteints dans une zone géographique pendant deux heures, il n’y aura pas d’accès aux services de numéro d’urgence pendant un temps », a-t-elle déclaré lors d’une audition devant la Commission des affaires économiques du Sénat.
Avec la crise de l’énergie, la possibilité de “délestages » cet hiver est fréquemment évoquée. Il s’agit de coupures ciblées et temporaires de l’approvisionnement destinées à soulager le système en cas de trop fortes tensions, avec un fonctionnement différent pour le gaz et l’électricité, et éviter le “blackout », c’est-à-dire la panne généralisée et incontrôlée, en cas de tensions entre l’offre et la demande.
Cette crainte de coupures a été ravivée après les dernières prévisions de RTE, le gestionnaire du réseau de haute tension, qui a averti mi-novembre d’un risque “élevé » de tensions sur le système électrique en janvier, en raison du redémarrage plus lent que prévu de réacteurs nucléaires d’EDF. Ce n’est qu’en “tout dernier recours” que des “délestages” pourraient être effectués par Enedis à la demande de RTE.
“Tours de contrôle” de la sécurité du réseau de distribution, les 28 agences de conduite régionale d’Enedis seraient alors chargées d’activer à distance ces coupures tournantes de deux heures sur tout le territoire. A l’exclusion de quelque 14 000 sites prioritaires déterminés par un arrêté qui remonte au 5 juillet 1990 : défense, production d’électricité, mais aussi hôpitaux, prisons.
Réseaux télécoms non prioritaires
“Malheureusement, les réseaux télécoms ne sont pas jugés comme des sites prioritaires », a déploré Mme Heydemann, alors que les téléphones portables sont devenus le moyen principal des Français pour contacter les services de secours et le numéro d’urgence 112. “C’est un sujet sur lequel Orange et la Fédération des télécoms alertent le gouvernement depuis le début de l’année 2022. On continue de travailler (ensemble sur le sujet), mais je crains que nos concitoyens découvrent que les réseaux télécoms dépendent de l’électricité », a-t-elle ajouté, assurant que l’opérateur fait “des exercices de crise”.
“Dans les réseaux télécoms, il y a différents types de sites: certains sont priorisés dans les plans de prévention que nous mettons en oeuvre. Mais une partie de nos sites, en particulier la dizaine de milliers de sites mobiles, ne sera pas priorisé. De même qu’un certains nombres de nos sites critiques” équipés de générateurs et de batteries, qui “peuvent avoir un impact (sur le réseau) au niveau national », a expliqué Christel Heydemann.
“Il y a des systèmes de secours qui permettront de prendre le relais. Néanmoins si les délestages se multiplient, on ne sait pas comment se comportera le réseau », a-t-elle indiqué, ajoutant qu’il “est illusoire d’imaginer mettre des batteries au pied de chacun des sites mobiles en France ». “Il pourrait y avoir des situations où la lumière fonctionne dans un appartement mais les (réseaux) mobiles ne fonctionnent pas parce que la tour est dans une zone qui est elle-même délestée, et vice-versa », a encore averti la dirigeante d’Orange. Cela donnerait “des situations assez inédites ».