La communauté libre OW2 accompagne de nombreux projets innovants européens. Elle signale les coopérations autour de codes ouverts comme une clé incontournable pour l’industrie et les services IT.
Les 12 et 13 juin derniers, au centre d’innovations d’Orange à Châtillon, la communauté open source OW2 a réuni plus de 300 décideurs et développeurs de 13 nationalités distinctes. L’occasion de confirmer les avancées concrètes des membres et projets de l’association, et son rôle croissant dans la recherche européenne, via les projets Horizon 2020 notamment.
L’open source atteint sa maturité industrielle dans les réseaux numériques, le développement d’applications, l’IoT et les systèmes d’exploitation. Les acquisitions de GitHub par Microsoft (7,5 milliards de dollars) et de Red Hat par IBM (34 milliards de dollars) l’ont montré récemment. On pourrait croire l’Europe à la remorque du continent Américain. Il n’en est rien, rétorque Christian Paterson, responsable de la gouvernance open source chez l’opérateur Orange, l’un des co-fondateurs d’OW2 : « A une période où les pays se recentrent sur eux-mêmes, l’open source rapproche les développeurs européens. Les talents coopèrent sans frontière. La conférence OW2con’19 réunit plus de 300 professionnels enclins à partager leurs expériences. Que ce soient dans les services cloud, les objets connectés, les chatbots ou l’IA, les projets sont pilotés par l’open source dorénavant.
Intervenant pour TDF (The Document Foundation), Simon Phipps évalue à 200 millions le nombre d’utilisateurs de la suite LibreOffice soutenue par 300 développeurs open source.
Trois projets primés
En reconnaissance pour leurs efforts communautaires, leur faculté d’innovation ou leur percée sur le marché, trois projets OW2 sont mis à l’honneur cette année : il s’agit de l’environnement de travail numérique XWiki, une solution de partage de connaissances, de documents et de processus conçue pour les environnements répartis. ProActive accélère l’industrialisation du Machine Learning tout en réduisant le coût des projets d’IA. Enfin, Clif se distingue par ses tests de performances réseaux, évaluant en quelques jours seulement l’impact de 3 millions de foyers potentiellement connectés à l’infrastructure Internet d’Orange.
Une soixantaine de présentations et neuf sessions en petits groupes permettent d’approfondir ses connaissances sur la base de code OW2 ou sur les projets des partenaires de l’association.
Tout en rappelant qu’il existe plusieurs degrés d’ouverture, les équipementiers télécoms, prestataires cloud et opérateurs font le point sur la conformité open source des produits et des services mis à jour au fil de l’eau. Karsten Reincke (Deutsche Telekom), Konrad Wawruch (7bulls), Jonne Soininen (Nokia), Gunnar Nilsson (Ericsson) et Oliver Fendt (Siemens) échangent sur la gouvernance open source et la maturité de l’industrie open source lors d’une table ronde très suivie.
Gérer les risques et la complexité
« Pourquoi faisons-nous de l’open source ? On y voit des bénéfices pour éviter le verrouillage fournisseurs. On gagne des développements plus rapides autour de standards avec la co-innovation. On apprend beaucoup d’autrui et on réutilise les innovations d’autres acteurs de l’industrie. OpenStack, linux ou Kubernetes ne pourraient pas être pilotés par une petite équipe software. L’open source est un passage obligé. Avec une communauté vibrante derrière, c’est plus sûr », explique Jonne Soininen.
La conférence annuelle d’OW2 donne un aperçu de la recherche open source européenne avec les projets Aegis, Crossminer, Decoder, Fasten, Melodic, ReachOut, Stamp, des projets de recherche délivrant souvent des outils ouverts et exploitables par les DSI d’entreprise.
Aomar Bariz, Information Governance Technical Leader d’IBM souligne la percée rapide de la plateforme d’orchestration de conteneurs Kubernetes, à présent projet CNCF (Cloud Native Computing Foundation) ainsi que l’émergence du projet Tekton, un framework open source complémentaire pour créer des systèmes d’intégration et de déploiement continus. Néanmoins, il signale que les entreprises sont désorientées face aux nombreuses technologies à intégrer dont la blockchain, l’IA et les composants d’infrastructure. « L’acquisition de Red Hat par IBM en novembre 2018 forme une bonne nouvelle pour les communautés. Red Hat continuera à être indépendante. IBM lui procure davantage de ressources humaines et sa faculté à packager les solutions d’entreprise ; la complexité vient de trop nombreux composants open source venus d’un peu partout. Notre but consiste à intégrer ces outils en solutions d’entreprise, dans un contexte où les licences de logiciels évoluent. »
Auteur : Olivier Bouzereau