INTERVIEW – IBM fait campagne pour recruter dans l’Hexagone. L’entreprise américaine élargit ses critères de recrutement, a confié à Solutions Numériques la présidente d’IBM France, Béatrice Kosowski. Elle met en place divers dispositifs de formation et de télétravail afin d’attirer des publics variés, y compris les jeunes, les femmes, les demandeurs d’emploi ou les personnes en reconversion.
Solutions Numériques : Quelles sont vos perspectives de croissance et de recrutement ?
Béatrice Kosowski, présidente d’IBM France : Après avoir mené de profondes transformations stratégiques en 2021, l’année 2022 est pour IBM celle de l’exécution de notre nouvelle stratégie et de notre nouveau modèle commercial, qui portent déjà leurs fruits, comme en témoignent nos résultats du 1er semestre.
IBM France n’est pas en reste et est l’un des grands contributeurs de la croissance d’IBM au niveau mondial. Pour accompagner cette dynamique, nous avons entamé une importante campagne de recrutement depuis l’automne dernier dans toute la France.
S.N. : Quels sont les profils que vous recherchez ?
B.K. : Nous recherchons des consultants juniors et séniors, des architectes, des designers, desingénieurs avant-vente, des développeurs, des spécialistes du cloud, des data scientists… ou tout autre profil engagé et volontaire pour mettre la technologie au service de l’utilité : pour nos clients, pour la société, pour l’environnement ! N’hésitez pas à postuler.
S.N. : Le secteur fait face à une pénurie de talents, comment y remédier ?
B.K. : Ce constat est général, en France comme à l’étranger. IBM est engagé de longue date en faveur de la formation de tous les profils aux métiers du numérique, en particulier en France.
Aujourd’hui, nous faisons collectivement face à deux enjeux principaux : le passage à l’échelle des nombreuses initiatives, publiques et privées qui existent déjà et l’adoption d’une approche par le cycle de vie.
Au niveau lycée et BTS, nous avons lancé les premiers projets P-tech (pathways in technology) en 2019 dans le cadre du sommet Tech For Good. Ils sont destinés à former des élèves en lycée professionnel aux métiers de demain grâce à des partenariats public-privé. Cette année, 5 nouveaux projets P-tech ont été lancés par le Ministère de l’Éducation nationale en partenariat avec Numeum ainsi que des acteurs privés et publics. L’ambition est de développer P-tech sur tout le territoire.
En parallèle, nous mettons également gratuitement à disposition des élèves P-tech et des demandeurs d’emplois notre plateforme d’apprentissage Skillsbuild, qui permet d’obtenir des formations certifiantes dans la plupart des domaines du numérique.
Nous avons également à cœur de développer nos académies pour former les ressources critiques dont nous, nos clients et nos partenaires avons besoin, en particulier sur l’intelligence artificielle (IA) et le mainframe. Nous avons déjà mis en place avec beaucoup de succès une académie sur l’IA et une autre sur le mainframe en région Occitanie, à destination des demandeurs d’emploi et des personnes en reconversion. Notre ambition est de les déployer sur tout le territoire avec l’aide des régions.
L’enjeu de formation est immense et nous n’y arriverons qu’en travaillant main dans la main, dans une logique d’écosystème. Fédérations, associations, acteurs publics et privés, nous devons tous travailler ensemble, en mode open source, pour former efficacement et rapidement un maximum de travailleurs aux différents métiers du numérique !
« Nous devons tous travailler ensemble, en mode open source, pour former efficacement et rapidement un maximum de travailleurs aux différents métiers du numérique ! »
S. N. : Menez-vous une politique de recrutement inclusive ?
B. K. : Résolument. L’inclusion est une de nos valeurs fondatrices et elle se décline dans nos actions, y compris lors du recrutement. D’ailleurs, cela se ressent dans nos chiffres. Nous comptons 6% de personnes en situation de handicap dans nos effectifs, lorsque la moyenne du secteur est à 2%. Notre Comex d’IBM France est à parité depuis plusieurs années et notre index de l’égalité professionnelle femmes-hommes est de 89 en 2021. Nous sommes également engagés en faveur de la diversité et de l’amélioration de la qualité de vie des personnes LGBT+, à travers des actions de sensibilisation de nos managers, des collaborations avec des organismes compétents, comme Têtu et des accords d’entreprise qui proposent par exemple un congé de 10 jours pour les personnes souhaitant effectuer une transition de genre. 85% de nos salariés considèrent qu’IBM France est une entreprise inclusive.
Nous portons donc une attention particulière à l’inclusion lors du recrutement, persuadés que l’inclusion et la diversité des profils que nous recrutons sont une composante essentielle à la réussite de notre entreprise, en particulier en ce qui concerne l’innovation.
Concrètement, cela peut se traduire par une actualisation et une adaptation de nos critères de recrutement. Nous avons par exemple rejoint récemment le manifeste pour la reconversion des femmes dans les métiers du numérique. Ce faisant, nous nous sommes engagés à élargir nos critères de recrutement et à valoriser tous types de parcours professionnel.
Mais nous ne nous arrêtons pas au recrutement ! Il est essentiel de valoriser l’inclusion et la diversité tout au long de la carrière de chacun de nos employés.
S. N. : Recherchez-vous des profils féminins ?
B.K. : Bien évidemment ! Le secteur du numérique souffre d’un manque important de profils féminins (27,5 % de femmes), en plus d’un manque de talents. Pour reprendre le slogan de Femmes@Numériques : « pourquoi se priver de 50% de nos talents ? ». Il est urgent d’agir : à ce rythme, il faudra 25 ans pour atteindre la parité dans les métiers du numérique !
Force est de constater aujourd’hui que le manque de talents féminins provient essentiellement d’un manque de vivier, le secteur du numérique souffrant encore de nombreux préjugés qui peuvent décourager les jeunes filles. Tous les acteurs clés du secteur doivent œuvrer ensemble pour transformer l’image de l’informatique, en mettant en avant des rôles modèles et en menant des actions de sensibilisation des filles dès l’école, grâce à des dispositifs comme Toutes Numériques dans les classes de primaire, ou des projets comme P-tech au lycée.
Ensuite, au niveau du recrutement, il faut être vigilant et veiller à ce que les critères de recrutement ne discriminent pas les profils féminins. Il est d’ailleurs intéressant d’observer que les femmes sont proportionnellement plus présentes dans les métiers d’avenir du numérique. Par exemple, nous sommes à parité dans nos recrutements en intelligence artificielle.
S. N. : Etes-vous confronté à des disparités régionales en termes de recrutement ?
B. K. : Il est vrai que certains bassins d’emplois sont plus difficiles que d’autres sur nos métiers. Mais nous avons mis en place de nombreux dispositifs qui permettent à la fois de former les talents en région, à travers nos académies par exemple, et d’offrir à nos collaborateurs la flexibilité dont ils ont besoin en matière de mobilité.
La Covid-19 et les différents confinements n’ont fait qu’accentuer cette tendance, mais nous étions déjà précurseurs avec un accord d’entreprise qui permet à nos collaborateurs de faire du télétravail 3 jours par semaine et 10 jours d’affilée avec accord du manager. Par ailleurs, grâce à l’implantation de nos différents sites en régions, nous avons également de nombreux collaborateurs qui sont basés ailleurs que leur manager.
« Le système de Smart Remote Centers permet aux profils séniors de travailler d’où ils veulent avec une présence dans un de nos hubs régionaux quatre jours par mois. »
De plus, nous avons récemment lancé les Smart Remote Centers, avec l’objectif d’innover et d’adapter nos modes de recrutement et de gestion des ressources humaines aux envies de nos collaborateurs et plus largement des talents du secteur. Après une première étape avec Lille comme point d’ancrage, nous avons lancé la création de Smart Remote Centers dans trois régions de France en profitant du marché local de business et de recrutement : à Marseille, Bordeaux et Nantes. Ce système permet aux profils séniors de travailler d’où ils veulent avec une présence dans un de nos hubs régionaux quatre jours par mois, et aux profils juniors de travailler depuis des hubs régionaux et de bénéficier d’un mentorat individuel assuré par les profils seniors. Cette innovation nous permet – à nous et à nos clients – de profiter pleinement des talents en région.
L’ensemble de ces dispositifs de flexibilité nous permettent d’être agiles dans nos recrutements et de faire converger nos besoins et ceux de nos collaborateurs sur tout le territoire.
Propos recueillis par Christine Calais