Le commerce en ligne émettrait en Europe entre 1,5 et 2,9 fois moins de gaz à effet de serre que le commerce traditionnel. C’est le résultat surprenant d’une étude réalisée par Oliver Wyman pour le compte d’Amazon, le leader mondial du e-commerce.
Pour arriver à ces chiffres, le cabinet a évalué l’empreinte carbone des deux types de commerce à toutes les étapes de leur chaîne de valeur jusqu’en 2019. Résultat : si le e-commerce pollue en raison notamment du packaging et de la livraison des commandes, ces émissions sont largement compensées par l’absence de boutiques à chauffer (60% des émissions des commerces traditionnels) et par le fait que les clients n’ont pas besoin de se rendre en magasins (30%). A titre d’exemple, la livraison à domicile par transporteur réduirait de quatre à neuf fois le trafic en voiture nécessaire pour se rendre individuellement en boutique.
Le déplacement en voiture vers un magasin physique générerait entre 1.5 et 2.9 fois plus de CO2e que l’achat en ligne
Dans le « cas moyen », qui reflète la moyenne des différentes situations existant dans la réalité, les achats réalisés en magasin avec un déplacement en voiture génèrent entre 1,5 et 2,9 fois plus de CO2e par produit vendu que les achats réalisés en ligne. Les émissions sont de 2 000 g de CO2e pour les achats en magasin et de 800 g de CO2e pour les achats en ligne.
Ce cas de figure tient compte des différents comportements de consommation (par exemple, déplacement en voiture pour les achats physiques dans 50 % des cas, retour de certains produits et achat de plusieurs produits dans le cadre d’un seul déplacement) et des différentes configurations possibles de la chaîne d’approvisionnement (commandes transfrontalières par exemple). L’étude semble oublierait-elle le CO2 émis par le véhicule de livraison dans ce cas ?
Les principaux facteurs expliquant cette différence sont la consommation d’énergie des bâtiments (160 g de CO2e pour les achats en ligne et 1 200 g de CO2e pour les achats hors ligne), le transport sur le dernier kilomètre (200 g de CO2e pour les achats en ligne et 600 g de CO2e pour les consommateurs qui se rendent en voiture dans un magasin physique) et l’emballage (100 g de CO2e en plus pour les achats en ligne).
L’e-commerce permet d’éviter 4 à 9 fois le trafic qu’il génère par ailleurs
Les livraisons du e-commerce vers les consommateurs représentent 0,5 % du trafic routier total dans les zones urbaines, alors que le commerce physique est à l’origine de 11 % du trafic. Ces chiffres sont tirés d’analyses couvrant les agglomérations de Paris, Berlin et Londres. En région parisienne par exemple, le commerce physique (y compris le réapprovisionnement des magasins et le déplacement des consommateurs vers les magasins) génère 4,7 fois plus de trafic par unité de vente que les livraisons e-commerce. Dans l’ensemble, les livraisons du e-commerce se substituent aux déplacements des consommateurs vers les magasins et permettent d’économiser entre 4 et 9 fois le trafic qui serait sinon généré par ces achats.
Moins d’impact sur l’environnement lorsque les produits sont expédiés en grande quantité par bateau que par avion
La livraison directe par avion de produits électroniques vendus en ligne à partir d’un centre de distribution situé en Asie produit 25 fois plus de CO2e que leur livraison par la route à partir d’un centre de stockage de masse situé dans l’UE qui a été approvisionné par conteneur maritime. Le e-commerce a donc beaucoup moins d’impact sur l’environnement lorsque les produits sont expédiés en grande quantité par voie maritime, puis stockés à proximité du client avant leur vente.
L’e-commerce représente moins de 0,3 % de l’artificialisation des sols en Europe
L’utilisation globale de terrain est plus importante pour le commerce physique que pour le e-commerce quand on tient compte des surfaces utilisées pour la logistique, la vente et le stationnement. La logistique occupe moins de 1,5 % du total des terrains artificialisés. L’e-commerce représente 12 % de la superficie construite totale utilisée pour la logistique en France, 9 % en Allemagne et environ 20 % au Royaume-Uni, ce qui reflète les différents stades de pénétration du e-commerce dans ces pays et l’importance relative du commerce dans leurs activités logistiques totales.
La superficie occupée par l’e-commerce augmente de 13 à 17 % par an, proportionnellement à l’augmentation du chiffre d’affaires de ce dernier. La part des nouvelles constructions se situe entre 56 et 66 %. Pour un chiffre d’affaires donné, on estime que la superficie totale occupée (comprenant les zones de stockage et de vente, ainsi que les espaces d’accès et de stationnement des véhicules) est inférieure de 26 à 43 % pour le e-commerce par rapport au commerce physique.
Si le e-commerce nécessite deux à trois fois plus d’espace pour la logistique, il ne nécessite aucune surface de vente et beaucoup moins d’espace de stationnement. La localisation des entrepôts peut également avoir une incidence indirecte sur l’impact en matière de CO2e. Un moyen direct de réduire cet impact consiste à rapprocher les centres logistiques (entrepôts et, surtout, agences de livraison) des centres-villes afin de réduire la fragmentation du transport sur le dernier kilomètre. Malheureusement, le développement des villes européennes a progressivement éloigné les entrepôts des centres-villes en raison de la pression immobilière, des politiques d’aménagement du territoire et de la recherche d’économies d’échelle.
L’impact varie selon la nature du produit
Ce rapport évalue l’impact du commerce de détail en termes d’équivalent CO2 (ou CO2e) de bout-en-bout sur les produits non alimentaires (livres, électronique grand public et vêtements) en Europe. L’achat d’un livre dans un magasin physique produit en moyenne 1,6 fois plus d’émissions que l’achat en ligne. Pour un vêtement, le multiple est de 2,9. Dans les huit pays pris dans leur ensemble, les émissions de CO2e sont équivalentes pour l’achat d’un livre ou d’un produit électronique grand public en ligne ou dans un magasin physique auquel on accède à pied (environ 700 g de CO2e dans chaque cas). En revanche, l’achat d’un article de mode dans un magasin visité à pied génère deux fois plus d’émissions que l’achat en ligne, en raison principalement de la consommation d’énergie des locaux commerciaux (chauffage et éclairage de l’espace nécessaire à la mise à disposition et à la présentation des produits).
Les différences entre pays s’expliquent principalement par leur mix énergétique
La France affiche les impacts en valeur absolue les plus faibles : 400 g de CO2e pour le e-commerce et 600 g de CO2e pour le commerce physique, soit 1,5 fois plus. L’Allemagne affiche les impacts les plus élevés : environ 1 000 g de CO2e pour le e-commerce et près de 3 000 g de CO2e pour le commerce physique, soit 2,9 fois plus. Ces chiffres s’expliquent par le fait que les émissions par unité de production d’électricité de l’Allemagne (609 g de CO2e par kWh) sont 14 fois plus élevées que celles de la France (43 g de CO2e par kWh).
Ce rapport est le résultat d’une étude indépendante menée par Oliver Wyman avec le soutien de Logistics Advisory Experts (LAE), un spin-off de l’Institute of Supply Chain Management de l’Université de St Gall. L’étude n’exploite pas d’informations privées en provenance d’Amazon ou d’autres distributeurs ou transporteurs. Les données proviennent de statistiques officielles d’Eurostat, Euromonitor et instituts nationaux de statistiques, etc. Celles relatives au comportement des consommateurs proviennent d’enquêtes exclusives menées en 2020 par Oliver Wyman dans plusieurs pays d’Europe (Allemagne, Espagne, France, Italie, Royaume-Uni).