La pénurie d’imprimantes et de consommables devrait durer encore jusqu’à fin 2022. Une tendance qui perdure depuis un an et qui inquiète Philippe Richoux, président de Carol Buro, le principal grossiste français indépendant spécialisé dans les solutions d’impression. D’autant que le prix des imprimantes a augmenté jusqu’à 20 % en un an chez de nombreux fournisseurs. Faute de machines à vendre, Carol Buro a accéléré sa diversification dans les services d’intégration et la GED.
Olivier Bellin, Solutions Numériques et Channel : En vigueur depuis au moins un an, la sévère pénurie d’imprimantes et de consommables va-t-elle perdurer encore en 2022 ?
Philippe Richoux, président de Carol Buro, le principal grossiste français indépendant spécialisé dans les solutions d’impression. Il est aussi le premier distributeur de Canon, le leader historique des copieurs chez qui Philippe Richoux a travaillé durant 22 ans :
Cette pénurie devrait durer jusqu’en 2023. Le 1er semestre 2022 sera identique à celui du 2e semestre 2021 en termes de faibles disponibilités d’imprimantes. La situation s’est un peu améliorée depuis que Carol Buro reçoit les MFP de Canon en deux parties, que nous assemblons ensuite. Cela nous permet de ne pas avoir à attendre leurs cartes électroniques, qui sont les principales victimes des pénuries de processeurs. D’ailleurs, elles voyagent par avion séparément alors que la machine elle-même nous est envoyée par bateau.
Les cartouches d’encre, les toners et autres consommables d’imprimantes subissent-ils également des pénuries ?
L’absence de rupture dans les consommables est LE gros challenge de 2022 car la pénurie s’accélère sur certaines marques, davantage même que sur leurs machines.
Les hausses de prix successives constatées depuis début 2021 sur le marché des imprimantes et des copieurs se poursuivent-elles ?
Quasiment tous les constructeurs d’imprimantes ont augmenté leurs prix depuis un an, certains plus que d’autres. Ils le justifient en expliquant qu’ils répercutent la hausse des coûts du transport dans un contexte de grave pénurie des produits. Par exemple, le prix des imprimantes Canon a encore progressé de 6 % au premier janvier 2022, alors que le fournisseur les avait déjà augmentées de 5 % en mars 2021, puis de 5-6 % en juillet. Quant à ceux qui n’ont pas augmenté leurs prix publics, ils ont supprimé les supports financiers ou baissé les remises de leurs revendeurs, jusqu’à 30 % chez certaines marques.
Assiste-t-on à un effet d’aubaine chez les constructeurs ?
Je pense que les constructeurs d’imprimantes profitent de cette pénurie pour reconstituer leurs marges rognées ces 20 dernières années. L’Economie de pénurie actuelle nous fait revivre nos cours d’économie sur les lois de l’offre et de la demande et nous savons que ce qui est rare est cher. Mais attention à ne pas trop tirer sur la corde de l’élasticité des prix, elle pourrait se casser pour les marques trop gourmandes.
Combinées aux pénuries, ces hausses de prix sur les imprimantes et les copieurs pénalisent-elles l’activité de Carol Buro ?
Trop c’est trop. Combien de temps parviendrons-nous encore à répercuter à nos clients, qui sont souvent des PME, ces hausses de prix successives sur les copieurs et les MFP ? Elles impactent désormais l’activité de Carol Buro et celles de nos clients. Nous alertons aujourd’hui les fournisseurs sur le coût excessif de certaines de leurs machines, d’autant que nous n’avons pas ou peu de produits à livrer.
Cette pénurie a-t-elle beaucoup changé la manière de travailler de Carol Buro ?
A l’évidence. Carol Buro ne commercialise plus que les quelques machines qui nous reste à vendre, et non plus de nombreux produits disponibles sur étagère, comme c’était le cas avant cette longue pénurie. Nous n’avons plus aucun stock. Tout est vendu dès la livraison des machines. C’est du jamais vu dans le secteur de l’impression sur une durée aussi longue. Si un client demande une imprimante à 40 pages par minute que nous n’avons pas, nous lui vendons sans problème une 35 ou 50 pages par minute. Désormais, nous ne parlons même plus d’argent à la commande et il n’existe plus aucune négociation sur les prix avec le fournisseur ou le client. Une première là encore. Enfin, sans cette longue pénurie, Carol Buro n’aurait peut-être jamais autant développé l’intégration de nouvelles solutions d’impression et de Gestion électronique de document (GED).
Est-ce la raison pour laquelle Carol Buro a lancé son activité d’intégration de logiciels de Gestion électronique de document (GED) pour les revendeurs ?
En 2020, Carol Buro est devenu intégrateur de logiciels de Gestion électronique de document (GED) pour répondre aux besoins de nos revendeurs, en partenariat avec les éditeurs français Zeendoc et Eukles, une filiale de Docaposte. La demande était là puisque CB Solutions, la filiale de Carol Buro qui intègre et commercialise ces solutions de GED a réalisé un chiffre d’affaires de 1 M€ lors de sa deuxième année d’activité, contre 500 kE la première année. Pour 2022, elle devrait générer environ 1,5 M€ de chiffre d’affaires.
Comment prévoyez-vous de dynamiser votre offre d’intégration de logiciels de GED en 2022 ?
Forte de quatre personnes désormais, notre équipe d’intégration a créé dès fin 2021 cinq packs logiciels proposés en mode Saas : Intégration des Factures Clients, Distribution des Fiches de paie, E-signature, Recouvrement, etc. Carol Buro organisera dès février 2022 des présentations et des démonstrations à distance pour les revendeurs intéressés.
Carol Buro en a-t-il profité pour actualiser ses processus administratifs et commerciaux ?
En raison de la Covid-19, Carol Buro a également mis en place de nouveaux processus administratifs et commerciaux dans le cloud avec l’aide de Zeendoc, tant pour le groupe que pour nos partenaires. En effet, nos revendeurs ne pouvaient plus envoyer de factures par courrier à leurs clients car beaucoup de Burox de postes étaient fermés dès 2020. Zeendoc nous a aidé à dématérialiser les factures en seulement trois petites réunions téléphoniques. Désormais, la solution de Carol Buro est capable d’envoyer chaque mois un millier de factures en quelques clics. Le traitement et l’envoi manuel d’une facture coûtant environ 2,50 euros, nous économisons désormais 2500 € par mois. Nous avons donc convaincu certains de nos revendeurs d’adopter cette solution car elle leur permet de réaliser d’importantes économies. Dans la foulée, Carol Buro s’est équipé pour passer à la dématérialisation fiscale.