La somme ne paraît pas énorme, mais c’est tout un symbole. En 2016, la Commission nationale de l’informatique et des libertés (CNIL) annonçait avoir mis en demeure Facebook pour ses manquements à la loi française sur la protection des données personnelles. Gestion des cookies, collecte abusives de données personnelles, manque de transparence…, la liste était longue.
En 2015, à la suite de l’annonce par Facebook de la modification de sa politique d’utilisation des données, la CNIL avait procédé à des contrôles sur place, sur pièces et en ligne afin de vérifier la conformité du réseau social à la loi Informatique et Libertés. Ces actions s’inscrivaient dans une démarche européenne à laquelle participent cinq autorités de protection ayant également décidé de mener des investigations (France, Belgique, Pays-Bas, Espagne et Land d’Hambourg) sur les pratiques du réseau social.
Les contrôles conduits par la CNIL avait permis de relever l’existence de nombreux manquements à la loi Informatique et Libertés: combinaison massive des données personnelles des internautes à des fins de ciblage publicitaire, traçage des internautes à leur insu, avec ou sans compte, sur des sites tiers via un cookie (cookie « datr »)…
Au regard des manquements constatés, la présidente de la CNIL avait décidé, le 26 janvier 2016, de mettre en demeure les sociétés FACEBOOK INC. et FACEBOOK IRELAND de se conformer à la loi Informatique et Libertés, dans un délai de trois mois (renouvelé une fois à la demande du réseau social).
Les réponses ayant été jugées comme insuffisantes, la formation restreinte, chargée de prononcer les sanctions, s’est donc réunie le 23 mars 2017 et elle a considéré que :
Concernant la combinaison de données dont font l’objet les utilisateurs de FACEBOOK, les sociétés FACEBOOK INC. et FACEBOOK IRELAND effectuent ce traitement en l’absence de base légale. En effet, si les utilisateurs disposent de moyens pour maitriser l’affichage de la publicité ciblée, ils ne consentent pas à la combinaison massive de leurs données et ne peuvent s’y opposer, que ce soit lors de la création de leur compte ou a posteriori. Ils sont donc dépourvus de tout contrôle sur cette combinaison.
Concernant la collecte des données de navigation des internautes, via le cookie « datr », l’information dispensée via le bandeau d’information relatif aux cookies est imprécise.
En effet, cette mention ne fait qu’indiquer que des informations sont collectées « […] sur et en dehors de Facebook via les cookies », ce qui ne permet pas aux internautes d’être clairement informés et de comprendre que leurs données sont systématiquement collectées dès lors qu’ils naviguent sur un site tiers comportant un module social.
Cette collecte massive de données effectuée via le cookie « datr » est déloyale en l’absence d’information claire et précise.
Sur les autres manquements, la formation restreinte considère que :
Les sociétés ne délivrent aucune information immédiate aux internautes sur leurs droits et sur l’utilisation qui sera faite de leurs données notamment sur le formulaire d’inscription au service.
Les sociétés ne recueillent pas le consentement exprès des internautes lorsqu’ils renseignent des données sensibles dans leurs profils (ex : leurs opinions politiques, religieuses ou leur orientation sexuelle). En effet, aucune information spécifique sur leur caractère sensible n’est délivrée lorsque les internautes complètent leurs profils et renseignent de telles données.
En renvoyant au paramétrage du navigateur, les sociétés ne permettent pas aux utilisateurs de s’opposer valablement aux cookies déposés sur leur équipement terminal.
Les sociétés ne démontrent pas en quoi la conservation de l’intégralité des adresses IP des internautes pendant toute la durée de vie de leur compte est nécessaire.
En conséquence, la formation restreinte de la CNIL a décidé de prononcer une sanction de 150 000 € que la CNIL justifie par le nombre des manquements (6 au total), leur gravité et le nombre important d’utilisateurs en France (33 millions).
Auteur : Pierre Saire