Travail numérique : êtes-vous prêt ? Selon Alice Santeiu, Country Manager ServiceNow France, spécialiste de l’ITSM, la technologie numérique peut littéralement révolutionner notre façon de travailler. Mais si son adoption tarde encore au sein des entreprises, la situation devrait se décanter en 2017. Voici son point de vue pour les lecteurs de Solutions-numériques.
Les progrès accomplis dans le domaine des agents automatisés (automated bots), de l’apprentissage automatique (machine learning) et de l’informatique cognitive, sans oublier la disponibilité de données de toutes sortes, vont enfin commencer à influer de façon concrète et significative sur le monde professionnel, permettant aux entreprises et à leurs employés d’atteindre des niveaux de productivité inédits tout en stimulant la croissance par le biais de nouvelles fonctionnalités.
Mais cette révolution ne se fera pas du jour au lendemain et la transition entre une main-d’œuvre essentiellement humaine et une force de travail majoritairement « digitalisée » va se heurter à de multiples réticences. Nombre de DSI en effet affichent un certain scepticisme vis-à-vis de la numérisation du travail. Au fil des années, ils ont vu défiler de trop nombreuses technologies qui n’ont pas su tenir leurs promesses. J’ai la conviction que les technologies qui permettront aux services informatiques de mener la prochaine vague de productivité au sein des entreprises sont enfin arrivées. Cette mutation se traduira sans aucun doute par la suppression de certaines fonctions humaines, mais également par la création de valeur en dégageant les employés de tâches courantes qui ne génèrent guère de valeur commerciale, ce qui amènera les entreprises à redéfinir leurs emplois et à examiner leurs exigences en matière de compétences futures.
Les DSI les plus ambitieux dépasseront le cap de la discussion pour commencer à expérimenter des solutions numériques dès le premier semestre de 2017, les déploiements décollant véritablement vers la fin de l’année. À l’image d’autres technologies de rupture comme le cloud, les communications mobiles ou les réseaux sociaux, il faudra un certain temps aux responsables métier et aux salariés pour s’affranchir de la peur, de l’incertitude et du doute (Fear, Uncertainty & Doubt — FUD) et découvrir en quoi le travail numérique peut être positif pour leur activité. Les progrès que nous allons enregistrer cette année sur deux fronts permettront aux salariés d’utiliser les outils numériques avec un confort accru et contribueront à ouvrir la voie à leur future adoption d’un bout à l’autre de l’entreprise.
La fin du « travail sous-jacent »
Les employés consacrent chaque semaine 2 jours ouvrables sur 5 à des tâches « annexes » qui viennent se greffer sur leur travail. À cause des outils manuels inadaptés aux tâches à accomplir — courrier électronique, feuilles de calcul, visites personnelles —, ils leur consacrent presque autant de temps qu’à leur « vrai » travail. Il est temps que cette situation change !
Selon une étude menée par le cabinet McKinsey sur plusieurs années, il est possible d’automatiser au moins 30 % des activités inhérentes à environ 60 % des métiers. De son côté, le cabinet IDC prévoit qu’en 2020, 60 % des 2 000 premières entreprises mondiales doubleront leur productivité en transformant numériquement de nombreuses tâches manuelles à l’aide de logiciels.
L’automatisation peut certainement être utile dans les emplois et les tâches qui impliquent de nombreux processus répétitifs manuels ou semi-annuels. Les DSI doivent assurer au personnel informatique et aux équipes des services métier que les robots ne prendront pas leur place. Mais les tâches métier répétitives et à base de règles vont être de plus en plus codifiées. S’il est impossible d’automatiser la totalité des tâches métier, les processus qui gèrent d’importants volumes de données, englobent plusieurs systèmes, recueillent des données issues de sources variées ou impliquent la saisie de données, sont de bons candidats à la robotisation logicielle.
Les DSI ont pour mission d’aider les différents métiers (LoB) à identifier les moyens qui apportent une réelle valeur ajoutée pour consacrer moins d’efforts aux autres. L’automatisation des processus peut permettre aux employés de se concentrer sur les problématiques métier et non sur ces tâches sous-jacentes inutiles — et aux entreprises de réduire les coûts tout en améliorant la qualité et l’évolutivité.
Selon l’étude consacrée par ServiceNow à l’état du travail, les entreprises américaines dont les effectifs atteignent 5 000 employés pourraient économiser 575 milliards de dollars par an en automatisant des tâches et des opérations inefficaces, ce qui représenterait une augmentation du PIB américain de 3,3 %, ou l’ensemble des bénéfices annuels réalisés par les 50 plus grandes entreprises américaines.
L’apprentissage automatique peut nous aider à réaliser notre potentiel
La numérisation du travail ne se résume pas à la réduction des coûts de main-d’œuvre. À l’image des humains, les agents « bots » accèdent aux applications par l’intermédiaire d’une interface utilisateur, et à ce titre, ils peuvent s’intégrer aisément dans des systèmes hétérogènes. Les robots logiciels sont capables de comparer des données issues de différents systèmes et qui devaient jusqu’alors être rapprochées manuellement. Mais les agents « bots » peuvent le faire de façon plus rapide et plus efficace sans la moindre pause, ouvrant ainsi la voie à un niveau d’intelligence accru.
À mesure que leur paysage se transforme et qu’ils s’améliorent au contact de l’apprentissage automatique, les agents « bots » pourront dès cette année assumer de nouvelles tâches. Ils serviront notamment d’assistants numériques virtuels, dont la mission sera d’aider les employés à maximaliser leur productivité. Compte tenu de l’augmentation croissante du volume de données saisies, les agents « bots » évalueront la façon dont les employés passent leur temps, formuleront des recommandations en vue d’améliorer la productivité et la qualité, et soumettront des bonnes pratiques grâce à l’utilisation d’une évaluation (benchmarking) pilotée par des agents « bots ». En gros, toutes nos données seront synthétisées par une machine, et celle-ci nous indiquera ce que nous devons faire ensuite— les données guideront nos jours. Le cabinet Gartner estime que d’ici fin 2017, au moins une grande entreprise commerciale annoncera une augmentation significative de ses marges bénéficiaires grâce aux algorithmes utilisés pour modifier positivement le comportement de ses effectifs.
Est-ce que cela signifie que nous travaillerons un jour sous les ordres d’un robot ? Peut-être. Mais pour l’heure, l’homme n’est pas prêt à vivre dans un monde entièrement automatisé. Et si nous sommes encore à des décennies de la prise du pouvoir par des robots, nous créons chaque jour des quantités de données vertigineuses, de l’ordre de 2,5 quintillions1 d’octets ! Il est impossible pour un être humain de gérer un tel déluge d’informations et d’analyser toutes les relations établies entre les personnes, les informations et les objets. Les niveaux d’intelligence les plus élevés seront atteints lorsque les machines comprendront les activités, le contexte et la motivation, et qu’elles pourront prendre à notre place les décisions appropriées, ce qui nous permettra de nous concentrer sur les questions que seuls les humains peuvent traiter.
En leur qualité de responsables technologiques, les DSI ont l’occasion de lancer la révolution du travail numérique dans leur pré carré. En améliorant leurs propres modèles de fourniture de services grâce à l’automatisation, à l’apprentissage automatique et à l’intelligence artificielle, les responsables informatiques et leurs équipes peuvent acquérir l’expérience nécessaire pour distribuer, administrer et optimiser le déploiement de solutions de numérisation du travail à l’échelle de l’entreprise. À terme, les entreprises qui atteindront le juste équilibre entre travail numérique et travail humain se doteront de solides atouts pour réussir.