Selon Yann Le Moigne, le responsable des solutions d’impression professionnelles de HP en France, les pénuries d’imprimantes subsisteront encore sur certains modèles jusqu’à mi-2022 a minima. Il nous explique aussi pourquoi HP accélère ses investissements sur le laser, la vente de consommables sous forme d’abonnement et le développement des services managés (MPS) dans les entreprises.
Olivier Bellin, magazine Solutions Numériques / Channel : A l’instar de ses concurrents, HP est-il aussi impacté fortement par les problèmes de disponibilité des composants et les récents surcoûts logistiques ?
Yann Le Moigne, responsable des solutions d’impression professionnelles de HP en France :
Tout le secteur de l’impression est confronté à des problèmes d’approvisionnement et de disponibilité de composants fabriqués en Asie, où nombre de sous-traitants ont été également impactés par la pandémie. S’ajoute à cela la récente pénurie de containers, dont les prix ont flambé, ou encore l’augmentation du coût du transport maritime et terrestre. Toutefois, je constate depuis cet automne une légère amélioration de la situation sur le segment des équipements professionnels. Les livraisons prévues pour décembre 2021 et janvier 2022 devraient revenir à 80 % de leur disponibilité sur certains modèles d’imprimantes.
A quand un retour à la normale ?
Sachant que les usines devront encore rattraper leur retard pour réduire leur important backlog, des pénuries subsisteront encore sur certains modèles d’imprimantes jusqu’à mi-2022, y compris chez les grossistes.
Ces pénuries ont-elles obligé HP à arrêter, au moins temporairement, la commercialisation de certaines gammes d’imprimantes ou de PC, dont les moins rentables ?
Non, HP n’a pas supprimé de gamme de son catalogue, y compris les entrées de gamme. En effet, nous avons la chance de disposer de nombreux sites de production dans plusieurs pays en et notre stratégie est d’offrir un large choix à nos clients surtout dans cette période qui bouleverse les usages. En revanche, le groupe prioritise la production de certaines gammes pour tenir compte des demandes de ses clients et partenaires. C’est un pari gagnant quand on désire les fidéliser, mais aussi protéger les marges de nos partenaires.
Pourquoi HP a-t-il arrêté la commercialisation en 2021 d’une partie des imprimantes de sa gamme PageWide ?
Les raisons sont patrimoniales. En l’occurrence, notre technologie d’impression PageWide (jet d’encre à froid à tête fixe) a certes rencontré un franc succès dans certains domaines, dans le grand format par exemple, mais pas assez pour détrôner le laser partout. Par ailleurs, le jet d’encre ne représentant que 6 % du marché professionnel de l’impression, HP s’est donc posé la question de savoir comment optimiser ses investissements et présenter la meilleure proposition de valeur à ses clients. Il est coûteux de garder deux technologies en parallèle alors même que le marché de l’impression ne progresse pas en volume et est de plus en plus agnostique en terme technologique. D’autant qu’une technologie d’impression doit évoluer tous les 5 ans, ce qui nécessite d’investir plusieurs centaines de millions de dollars en recherche & développement. C’est sans doute pour cette raison que notre confrère Xerox a aussi arrêté ses imprimantes Color Cubes il y a peu. Son encre solide était une proposition de valeur intéressante, mais sa technologie probablement trop coûteuse.
Alors pourquoi HP a-t-il conservé cette technologie PageWide sur une partie de son offre ?
HP conserve cette technologie d’impression sur le grand format car cela fait sens avec une proposition de valeur très intéressante et un plébiscite de nos clients et partenaires. par exemple, la fiabilité importante de la technologie PageWide leur permet d’intervenir le moins possible chez les clients pour assurer la maintenance de ces imprimantes. Notre catalogue de solutions jets d’encre reste très vaste, d’autant que nous maîtrisons bien cette technologie qui est à notre catalogue depuis près de 40 ans. ce catalogue va beaucoup évoluer en 2022, en parallèle de l’offre d’achat de nos consommables sous forme d’abonnement portée par notre programme HP+.
Si j’ai bien compris, HP se focalise donc désormais davantage sur la technologie laser pour ses imprimantes professionnelles ?
Oui car la proposition de valeur du laser a beaucoup progressé, notamment en matière de développement durable et les clients sont de plus en plus agnostiques en termes de technologies. HP va d’ailleurs donc renouveler prochainement toute sa gamme laser, qui avait déjà évolué à la marge suite à l’évolution du label Energy Star.
N’est-ce pas aussi pour réduire un peu la profondeur du catalogue d’imprimantes de HP, l’un des plus importants du secteur ?
Si HP prévoit effectivement de réduire un peu la profondeur de son catalogue, c’est surtout pour pouvoir à terme proposer plus facilement ces produits via un configurateur permettant à nos clients et partenaires de construire à la demande (Build to Order) la configuration idéale.
HP favorise-t-il le développement des managed print services dans les entreprises ?
Le passage dans le cloud du pilotage des solutions d’impression s’est accéléré à cause de la pandémie et d’une demande accrue de certaines organisations pour développer le télétravail. Alors comment proposer des managed print services (MPS) à tous nos clients dans ce cadre ? HP teste ses offres MPS sur site avec certains d’entre eux, ainsi que des offres de pages imprimées à distance que les entreprises peuvent consolider en interne. Leur dénominateur commun est le cloud. En outre, HP annoncera en 2022 l’extension de son offre HP+ à ses gammes professionnelles. Elle prendra alors la forme d’un contrat d’impression à la page, où seront incluses et consolidées les impressions réalisées au domicile des collaborateurs.
HP n’étant pas le seul à proposer des MPS, pourquoi les clients choisiraient-ils votre offre ?
Car HP bénéfice d’un facteur différenciateur important sur le MPS. En effet, nous sommes les seuls, pour l’instant, à savoir proposer les deux offres MPS et FlexWorker simultanément, via le Cloud, avec les bons logiciels. Elle fera aussi la part belle au développement de la dématérialisation logicielle, ainsi qu’à des niveaux de service accrus pour la maintenance des machines et leur approvisionnement en consommables.
HP pourrait-il inclure les offres MPS de concurrents dans sa plateforme ?
Monter une plateforme de gestion capable de gérer du multimarque est intéressant, mais tous les fournisseurs ne sont pas prêts à jouer le jeu et à ouvrir les spécifications de leurs machines. Par ailleurs, comment gérer d’éventuelles pannes sur d’autres marques ? Cela dit, je comprends que certains partenaires soient tentés de développer ce type d’offres MPS multimarques car le nombre de pages imprimées diminuant, on peut augmenter la durée de vie du parc d’impression.
HP développe-t-il une vraie offre d’occasion (Refurbish) sur ses imprimantes et PC par exemple ?
HP y travaille au plan mondial afin de réduire l’empreinte carbone de ses produits. Mais notre objectif n’est pas de proposer des flottes entièrement en seconde main, surtout sur de gros volumes. Le groupe recherche actuellement des partenaires pour déployer ce type d’offres bas carbone. En France, la loi anti-gaspillage pour une économie circulaire (Agec) impose qu’un certain nombre de machines soient vendues d’occasion ou recyclées dans les contrats à destination des marchés publics. Je pense qu’il sera nécessaire de modifier ou d’étendre le leasing à ces offres d’occasion car il n’est réservé qu’aux produits neufs pour l’instant. Comme sur le marché de l’automobile, davantage de clients demandent à signer des contrats plus longs pour prolonger la vie de leurs grandes machines. Certains clients possèdent des imprimantes Laserjet depuis 10 ans et HP continue à leur fournir des consommables