La différence de salaire chez les ingénieurs s’est accrue entre hommes et femmes, à 21,7 %, selon l’Observatoire des femmes ingénieures 2023. Néanmoins, travailler ou avoir travaillé en ESN améliore le salaire des femmes.
Depuis le lundi 6 novembre 2023 à 11h25, les femmes commencent à travailler gratuitement jusqu’à la fin de l’année, d’après le calcul de l’association Les Glorieuses. Autrement dit, l’écart de salaire net moyen entre les femmes et les hommes, tous métiers confondus, est de 15,4 % (statistiques européennes à partir des dernières données disponibles, celles de 2021). Le monde du travail persiste et signe, puisque ce « gender gap » était de 15,8 % l’année précédente. Si vous pensez que c’est mieux du côté des ingénieurs, détrompez-vous. Les ingénieures seront toutes mortes avant de voir une égalité réelle de salaire entre les femmes et les hommes, au rythme actuel.
Le salaire brut médian annuel des femmes ingénieures en France a moins augmenté que le salaire brut médian annuel des hommes selon l’Observatoire des femmes ingénieures 2023 publié par l’association Femmes Ingénieures : il est de 51 204 €, alors que celui des hommes est de 62 337 €, soit 21,7 % de plus. Alors que le précédent observatoire relevait un écart de 17,6 % entre le salaire brut médian des femmes ingénieures (50 100 euros) et celui des hommes ingénieurs (58 900 euros).
Le plein emploi, mais pas les mêmes contrats et moins de responsabilités
Certes, les femmes ingénieures sont bien mieux payées que la moyenne des Françaises, dont le salaire moyen s’établit à 2 292 euros nets par mois. Cette réalité met à mal bon nombre d’idées reçues, et devrait encourager les filles à se tourner vers les études d’ingénieurs, où elles réussissent dans tous les secteurs techniques. Autres atouts, les femmes ingénieures, qui représentent 24 % de l’ensemble des ingénieurs, qui sont un peu plus d’un million en France, connaissent le plein emploi (moins de 2 % de chômage en 2021). 62 % d’entre elles n’ont jamais connu de période de chômage depuis le début de leur carrière.
Mais au cours de leur parcours professionnel, le salaire des ingénieures évolue de manière moins rapide que celui des ingénieurs, comme le montre le graphique ci-dessous.
De plus, les CDD sont deux fois plus nombreux chez les femmes ingénieures que chez les hommes ingénieurs. On constate un écart de près de 6 points au niveau des CDI en défaveur des femmes ingénieures (90,2 % vs 84,3 %). Et 39 % des femmes ingénieures possèdent des responsabilités, contre 50 % de leurs homologues masculins, ce qui influe négativement sur leurs salaires.
Contraintes familiales et valeurs pèsent plus lourd que le salaire
La rémunération se trouve en seconde place parmi les critères de choix d’une entreprise pour les hommes, derrière le contenu du poste, qui arrive logiquement numéro 1 quel que soit le genre. Ce même critère est seulement à la 5e place pour les ingénieures. Il est précédé des critères « Valeurs, éthique de l’entreprise », « localisation » et « conciliation vie professionnelle et personnelle ». Cela montre que les femmes font passer les valeurs et des pratiques professionnelles avant le salaire et qu’elles sont également plus soumises aux contraintes sociétales relatives aux responsabilités familiales. Celles-ci pèsent encore plus sur les mères que les pères. Certaines études montrent que les femmes ont plutôt tendance à moins négocier et se résigner face aux refus d’augmentation de salaire et de promotion ; un comportement probablement dû à une forme d’autocensure, qui provient notamment de la façon d’éduquer les filles.
L’ESN, vecteur de moins d’inégalités salariales
33 % des femmes ingénieures ont déjà travaillé dans une entreprise de services du numérique (ESN), dont 7 % encore aujourd’hui (vs. 42% et 11% chez leurs confrères). 46 % d’entre elles pensent que l’ESN a été un accélérateur à leur carrière, 67 % que leur passage dans l’une d’elles a été utile à leur progression (les chiffres sont à peu près les mêmes du côté des hommes).
Le salaire des femmes ingénieures ayant déjà travaillé dans une ESN est de 52 230 €, ce qui est supérieur de 2 % au salaire médian des ingénieures en France. Il existe un écart salarial de 6 750 € entre les femmes et tous les ingénieurs avec une expérience dans une société de services, soit 12,6 %.
En outre, en début de carrière, l’écart entre le salaire des femmes travaillant dans une ESN et celui des ingénieures en général est très mince. Cet écart reste peu significatif jusqu’à la fin de carrière où les ingénieures travaillant dans une ESN ont un salaire supérieur au salaire médian. Faire sa dernière partie de carrière en ESN est donc bénéfique pour le compte en banque des femmes.
L’association Femmes Ingénieurs conclut que les entreprises gagneraient à envoyer des signes plus tangibles aux femmes, en leur proposant les carrières et les salaires qu’elles méritent, d’autant que le différentiel de salaire est en défaveur des femmes dès le début de carrière. Le bénéfice que retirent les entreprises dans leurs performances, grâce à des équipes plus mixtes et inclusives, justifierait pleinement cet investissement. Ces inégalités restent préoccupantes, même si elles sont moindres dans les ESN.