Avec Watson, l’intelligence artificielle qu’il a développée, intégrée à la plate-forme Supply Chain Insights qu’il a construit, le groupe IBM a réduit ses coûts et gère mieux ses risques logistiques.
On n’est jamais si mieux servi que par soi-même… et par son intelligence artificielle. Le groupe informatique américain IBM a mis cela en application dans sa propre supply chain. Celle-ci compte six principaux centres de traitement logistique et 11 000 fournisseurs à travers le monde. La bonne exécution des flux logistiques repose sur une bonne maîtrise des flux d’informations Supply Chain. Pas facile quand comme le géant américain, on compte 30 systèmes ERP et de nombreuses sources de données externes. Ainsi, le défi était de réduire les perturbations dans la chaîne d’approvisionnement, tout en sachant tirer partir des « dark data » qui représentent 80% des données collectées, et qui sont non structurées, qu’on ne sait a priori pas utiliser.
Elémentaire, mon cher Watson
Le géant informatique s’est appuyé sur son intelligence artificielle Watson pour développer un outil de visibilité supply chain avec des capacités d’apprentissage automatique intégrées. Cette plateforme, qui a coûté 30 millions de dollars (24,3 millions d’euros) permet d’identifier et d’atténuer les risques liés aux opérations supply chain. Elle permet de savoir en temps réel ce qui se passe dans la supply chain et de gérer, voire d’anticiper les problèmes.
Pendant trois ans, jusqu’à 2017, IBM a peaufiné sa plateforme opérationnelle Supply Chain Insights. Elle utilise à la fois les données issues des systèmes ERP du groupe et des données non structurées internes ou externes. Elle comporte trois éléments.
Le centre opérationnel gère les informations relatives aux opérations logistiques et émet des alertes configurables. Il évalue instantanément l’impact financier des risques imminents et des perturbations de la chaîne. Il offre de la visibilité sur les événements internes et externes affectant la chaîne d’approvisionnement. Selon IBM, il permet de réduire le temps de récupération des informations de 90%.
La salle de résolution des problèmes détectés, qui utilise Ask Watson, combine l’expertise des opérationnels, des analystes data et les capacités d’apprentissage cognitif de Watson. Tous communiquent en langage naturel. Watson, en utilisant la connaissance et les données accumulées relatives au genre de problème à traiter, va suggérer à ses interlocuteurs d’aller consulter des données clefs relatives à des cas similaires et voir comment ils ont été résolus. Il va envisager les causes probables du problème. Il va aussi suggérer l’expert à qui s’adresser, émettre une recommandation pour résoudre le problème. D’assistant, il devient conseiller. « Il faut identifier quelles données on ingère à Watson, précise Chris Cameron, directeur des ventes de Watson Supply Chain chez IBM. Il ne faut pas tout lui apprendre, mais suffisamment, en fonction du cas d’usage à traiter. Par exemple, on commence avec les données d’une usine, puis on ajoute progressivement d’autres données. » Ses recommandations sont notées par les opérationnels, ce qui permet à Watson de les affiner au cours du temps. IBM prend l’exemple d’un problème qui auparavant nécessitait 175 échanges et 3 jours pour le résoudre, qui en trois itérations, ne demandent plus que 3 échanges et 5 minutes pour être résolu. Les consultants en supply chain auraient-ils du souci à se faire ?
Enfin, dernier élément, la base de données de référence, qui se bâtit progressivement : elle offre un ensemble de connaissances sur la façon dont les problèmes sont résolus. Elle nourrit Watson et permet aux opérationnels de répondre plus rapidement et plus précisément aux événements à venir.
Réduction des coûts
La deuxième année de développement de la plateforme, IBM a pu réduire ses stocks de précaution avec le même taux de service. Chris Cameron explique : « Aujourd’hui nous avons une seule façon de gérer les perturbations de la chaîne d’approvisionnement. La solution a amélioré la visibilité sur la chaîne. » Au final, les décisions se font plus vite. Les chiffres rendus publics sont positifs : 52 % de réduction dans les coûts d’expédition, réduction de stocks de 18 % tout en maintenant un taux de service de plus de 95 %, réduction des coûts de structure de 2,5 %. En trois ans, ces réductions de coûts s’élèvent à 40 millions de dollars (32,5 millions d’euros).
Au vu du succès en interne, IBM a décidé de commercialiser sa solution Watson Supply Chain. Des entreprises du monde automobile et de la high tech ont déjà commencé à l’utiliser. La commercialisation en France a démarré en décembre 2017. L’objectif est de faire tourner une dizaine de pilotes en France en 2018, à partir de cas d’usages concrets susceptibles de générer du ROI. La solution se substitue, avec l’intelligence artificielle en sus, aux « tours de contrôle » que certains groupes utilisent pour avoir une bonne visibilité sur leur supply chain.
Auteur : Christine Calais