Pour les entreprises, l’impact de la généralisation des environnements hybrides et multicloud dépasse de loin le seul aspect technologique. Un Cloud Operating Model permet d’intégrer toutes les dimensions de cette transformation dans une dynamique d’évolution continue qui réconcilie le passé, le présent et l’avenir du système d’information, selon Marc Herubel, Directeur Offre cloud et Régis Mauger, directeur “Future of Technology” chez Capgemini Invent.
Une approche holistique de la transformation cloud
Pour soutenir la transformation digitale de leur entreprise, quantité de DSI ont désormais adopté une stratégie « Cloud First » afin de gagner en rapidité, en agilité et en valeur pour les métiers. Cela les amène à devoir gérer des environnements hybrides et multiclouds, où cohabitent cloud on-premise, cloud privé hébergé, divers clouds publics et infrastructures legacy. Pour tirer pleinement parti des avantages respectifs de ces plateformes et du potentiel de leur association, il leur faut assurer la continuité, la fluidité et la sécurité de l’ensemble, et en conserver la maîtrise, notamment vis-à-vis des fournisseurs les plus importants.
Pour répondre à ces enjeux à grande échelle, les DSI se doivent de rationaliser, systématiser et industrialiser leur approche du cloud. Pour cela, il n’est pas question de procéder à un Big Bang, forcément coûteux et risqué, alors même que l’organisation en place est souvent efficace et qu’à la faveur d’ITIL, et maintenant de DevOps, le tournant des services a largement été pris. Il n’est pas non plus indiqué de créer une structure dédiée, laquelle consacrera définitivement une informatique à deux vitesses, source d’inefficiences irrémédiables. Au contraire, l’objectif doit être d’adapter l’organisation existante pour qu’elle soit en mesure de gérer la diversité des environnements dans un
contexte d’accélération des déploiements et d’innovation permanente.
Le Cloud Operating Model pour changer dans la continuité
La solution passe par la mise en place d’un modèle opérationnel pour le cloud, ou Cloud Operating Model (COM). Le COM peut se définir comme la description des mécanismes et des ressources qui, au sein de la DSI, permettront de tirer durablement partie des bénéfices du cloud dans le respect de l’existant. Garant d’un changement dans la continuité, le COM permettra à l’organisation informatique d’absorber au fil de l’eau les innovations des fournisseurs de cloud, les nouveaux besoins des métiers et les nouveaux usages des utilisateurs finaux sans mettre en péril les coûts ni la qualité de service. Il repose sur trois piliers à mettre en cohérence : la technologie, indispensable mais insuffisante ; les processus, garants de l’efficience ; et les personnes, dont le rôle et les
compétences vont être profondément impactés.
Trop souvent négligé, cet aspect humain est fondamental dans le succès du COM et, plus
généralement, de la stratégie cloud de l’entreprise. Avec le cloud, la DSI ne gère plus uniquement des services maison, construits à son idée, mais aussi des services constitués de briques standards, avec une logique et un vocabulaire qui lui sont étrangers. En outre, une part de la production va se trouver externalisée et, en grande partie, automatisée. Tout ceci signifie qu’il va falloir acculturer les collaborateurs et les faire monter en compétences afin de pouvoir les redéployer vers de nouvelles tâches créatrices de valeur. Et les rôles à pourvoir ne manquent pas !
De nouveaux rôles autour du catalogue de services cloud
Des responsables produits aux architectes, aux développeurs cloud et au marketing, c’est ainsi toute une organisation orientée client qui doit se mettre en place autour du cycle de vie du catalogue de services.
D’autres fonctions seront également impactées par la généralisation du cloud, comme la sécurité, où des réticences demeurent face à ce qui apparaît encore comme une perte de contrôle, et la production, qui peut craindre une forme de remise en cause. Outre les nécessaires efforts de sensibilisation et de formation, il faudra donc s’attacher à démontrer les bénéfices du cloud pour tous les acteurs en jalonnant la mise en œuvre du COM de victoires rapides et manifestes.
La démarche de mise en œuvre du COM débute par l’établissement d’une vision d’ensemble, alignée sur la stratégie métier. En découlent les grands principes d’architecture et d’usage à respecter, l’organisation et les rôles à faire émerger, les processus et les responsabilités qui les gouvernent, et enfin l’outillage, dont la Cloud Management Platform (CMP) constitue le socle.
L’expérience montre que la création d’un centre d’expertise cloud (Cloud Center Of Expertise, CCOE) est un facteur clé de réussite. Le CCOE constitue le noyau depuis lequel la capacité cloud pourra se diffuser progressivement à toute l’organisation. Cellule pluridisciplinaire où sont regroupées et développées les compétences essentielles au cycle de vie des services cloud, le CCOE n’a donc pas vocation à devenir un bastion de spécialistes, mais davantage un laboratoire et un accélérateur des usages du cloud. Premiers de cordée d’un modèle itératif d’acquisition des nouvelles compétences,
les membres du CCOE seront, par exemple, les premiers à se familiariser avec les environnements dédiés des acteurs du cloud (IoT, IA…), puis à en devenir les ambassadeurs auprès de leurs futurs utilisateurs.
En amorçant la mutation culturelle de la DSI autour du cloud, le CCOE ouvre la voie à une adoption rapide et complète du COM et, avec lui, aux bénéfices de la transformation digitale pour les métiers.