Les deux partenaires et Grand E-nov, l’agence d’innovation du Grand Est, ont signé fin novembre une convention tripartite. L’objectif est de renforcer l’écosystème numérique régional, développer la formation et l’emploi et faciliter la transformation numérique des entreprises et du service public du territoire.
Cette convention de partenariat pluriannuel, qui constitue une première, répond à une double ambition : apporter un cadre collaboratif pérenne entre les trois parties et définir des actions concrètes pour les années à venir. A ce titre, elle présente les politiques publiques et les actions portées par la Région pouvant faire l’objet d’un accompagnement par le Syntec Numérique sur la période 2019-2021.
Le renforcement de Numéric’Emploi
La convention s’inscrit dans la continuité des actions menées depuis 2013 par le Syntec Numérique et la Région Grand Est, notamment via le dispositif expérimental Numéric’Emploi, lancé voilà six ans en collaboration avec le Conseil régional et Pôle emploi. Depuis sa création, ce programme de reconversion professionnelle, qui profite chaque année à 200 personnes, a permis la réinsertion sur le marché de l’emploi de plus de 80 % d’entre elles.
« Il s’agit de reconversion ou d’évolution professionnelle, précise Thierry Vonfelt, délégué régional du Syntec Numérique. Beaucoup d’informaticiens ont décroché du marché du travail pour différentes raisons et nous les formons aux besoins actuels en compétences numériques des territoires ».
Le Syntec Numérique a récemment appelé à la généralisation de Numeric’Emploi au niveau national. « Le programme est pour l’instant réservé aux entreprises du secteur du numérique et nous souhaitons l’ouvrir à l’ensemble des organisations qui recrutent des profils numériques », déclare par ailleurs Thierry Vonfelt. Dans le cadre des discussions autour du Pacte Productif, le Syntec Numérique a aussi suggéré au gouvernement d’élargir à des profils « infra licence » le financement du « Plan d’Investissement dans les Compétences » pour les métiers du numérique. Il ne concerne actuellement que les profils « infra bac ».
Adapter les formations aux besoins des bassins d’emplois
Dans le cadre de la convention, le renforcement de Numéric’Emploi passe par l’intégration de sa gouvernance dans la Région. « Ce n’est plus une association à côté de la Région mais un dispositif commun unique qui permet d’accompagner les entreprises dans leur recherche de compétences et évidemment d’orienter les personnes en reconversion professionnelle et les demandeurs d’emploi vers les métiers du numérique », confie le délégué régional.
En phase avec le Contrat Objectif territorial (COT), la convention de partenariat va permettre une meilleure concertation pour les achats de formations de la Région et de Pôle emploi, qui sont guidés par les recommandations du Syntec Numérique. « Nous allons notamment mettre en place un label Numéric’Emploi, explique Thierry Vonfelt. Il certifiera la relation directe d’une formation avec les postes à pourvoir sur les territoires à court et moyen termes, afin de garantir un taux d’insertion dans l’emploi plus élevé ».
Hasard du calendrier, la convention tripartite a été signée le même mois que la parution du dernier ouvrage du sociologue Benoît Coquard, « Ceux qui restent ». Cet enfant du Grand Est y raconte la vie dans ces territoires ruraux en déclin plombés par la désindustrialisation. Vie synonyme aujourd’hui, pour beaucoup de ceux qui sont restés, de précarité et de perspectives d’avenir peu prometteuses…
Plus d’informaticiens pour attirer des entreprises
Dans ce contexte, le numérique peut avoir un vrai rôle d’aménagement du territoire. « Le problème est l’attractivité globale de la région Grand Est, souligne à cet égard Thierry Vonfelt. Elle doit disposer de davantage d’informaticiens afin d’attirer des entreprises. Puis, la question est de savoir où on attire ces firmes afin d’éviter qu’elle se concentrent dans les grands bassins d’emplois liés au numérique, qui sont la métropole de Strasbourg et les villes de Nancy et Metz. On peut alors jouer sur le télétravail et sur le fait que les gens restent en milieu rural car la vie y est moins chère. Ensuite, la réflexion doit porter sur la façon dont on les forme sans les déplacer, grâce au e-learning notamment ». En effet, ils sont nombreux dans ces bourgs ruraux à rencontrer des problèmes de mobilité, comme le met en lumière le livre de Benoît Coquard.
Les ambitions numériques du Grand Est
En juin dernier, la Région a lancé le « Plan IA Grand Est », qui mobilise 350 millions d’euros sur 5 ans. Il s’articule autour de trois priorités : santé, industrie et bioéconomie. La Région mène également une politique ambitieuse en matière de numérique éducatif. Avec 293 établissements labellisés à la rentrée 2019, le lycée 4.0 constitue une « révolution » éducative pour les lycéens en leur donnant accès gratuitement aux ressources numériques. Enfin, l’accès au très haut débit pour tous les habitants dans tous les territoires représente un chantier prioritaire pour le Grand Est, qui ambitionne de devenir d’ici à 2023 la première région de France connectée. Son plan THD mobilise 2 milliards d’euros d’investissement et constitue l’une des premières pierres du développement d’un “smart” territoire.
Auteur : Patricia Dreidemy