Pour entrer dans ce numéro spécial, consacré à la transformation numérique et aux sociétés de service, nous donnons la parole à Guy Mamou-Mani, qui fut à la tête de Syntec Numérique de 2006 à 2016, avec ces extraits de l‘introduction de son livre évènement :
« L’apocalypse numérique n’aura pas lieu ».
Ma colère a une cible : les prophètes de malheur. A les entendre, la fin du monde va être précipitée par le “numérique”, un mot derrière lequel ils rangent pêle-mêle l’informatique, le web, les robots, l’intelligence artificielle, le progrès technologique. (…) L’intelligence humaine et l’intelligence artificielle sont vouées à se faire la guerre, guerre que remporterait forcément l’intelligence artificielle…Nous sommes voués à être remplacés par des robots.
Or le mieux que l’on puisse faire, c’est initier le plus tôt possible l’intelligence humaine à maîtriser l’intelligence artificielle, en apprenant aux enfants par exemple à coder. Cela n’en fera pas des geeks ou des esclaves de l’informatique, ce n’est pas parce qu’ils apprennent à lire et écrire qu’ils deviennent écrivains, de même, ils ne deviendront pas tous développeurs professionnels !
Cette colère a aussi un nom, l’acronyme GAFA. Ce véritable concentré de fake news simplifie, mélange tout et crée un objet médiatique auquel on accroche toutes sortes de fantasmes, de préjugés, de contre-vérités. En réalité, Google, Amazon, Facebook et Apple n’ont rien à faire ensemble -ou alors il faudrait leur adjoindre des milliers d’autres entreprises qui partagent des caractéristiques communes, d’ailleurs fort vagues. En effet Apple est avant tout un fabricant de matériel, Google un moteur de recherche, Facebook un réseau social. Certes ces firmes de dimension planétaire représentent des défis importants pour nos sociétés (…). Loin de constituer un “cartel” qui en vertu d’une sorte de Yalta numérique se partagerait la domination d’internet et donc du monde, ces quatre entreprises sont entre elles des concurrents impitoyables. Si on diabolise les GAFA, c’est souvent pour mieux diaboliser la révolution numérique elle-même.
Ce tableau anxiogène risque d’accentuer le retard de notre pays et le priver d’écrire une nouvelle page de notre histoire.
Après cette colère, mes espoirs : les usagers sont prêts à accueillir et mieux encore entreprendre la révolution numérique, ici et maintenant.
La révolution numérique va changer la condition humaine. Elle n’est pas écrite par avance, elle sera ce que chacun de nous en fera.
Non seulement La révolution numérique crée un nouveau monde, mais elle donne à chacun d’entre nous les moyens de le construire en toute liberté.
« L’apocalypse numérique n’aura pas lieu »
de Guy Mamou-Mani.
Editions de l’Observatoire