Les huit semaines de confinement ont été pour certaines entreprises synonymes d’un effondrement de leur activité. Pour d’autres, ce fut au contraire l’occasion de pics de trafic sans précédent. Dans un cas comme dans l’autre, le Cloud a permis de coller au plus près à la demande.
Le confinement à l’échelle mondiale a mis le Cloud à rude épreuve. D’un côté, des millions d’entreprises devaient fermer leurs locaux et demander à leur personnel de continuer le travail depuis chez eux, notamment via des outils collaboratifs en ligne et de la visioconférence. De l’autre, les services de VOD connaissaient une hausse brusque de leur nombre d’abonnés, et si le réseau Internet a tenu le choc, tous ces services s’appuyaient sur les datacenters d’acteurs du Cloud public. Réputé pour pouvoir délivrer une puissance de calcul et des espaces de stockage potentiellement infinis, certains se sont ainsi retrouvés pris d’assaut par la hausse de la demande. Ainsi, les utilisateurs d’Azure ont dû parfois faire face au manque de ressources disponibles, le Cloud Microsoft devant lui-même répondre à la hausse des usages sur Microsoft Teams. En France, OVH a notamment fait face à cette sursollicitation des ressources Cloud, continuant d’assembler de nouveaux racks au rythme de 1 000 serveurs par jour en plein confinement.
Michel Paulin, CEO d’OVHcloud souligne : « L’activité d’OVHcloud a fortement augmenté le jour même des mesures de confinement, et cela dans chacun des pays où nous sommes présents. Les serveurs peuvent être déployés via notre portail en 120 secondes et nous avons noté une augmentation de ces commandes digitales de 30 % par rapport au début de l’année. » Le numéro 1 français du Cloud a pu anticiper le confinement notamment grâce aux informations remontées quelques semaines plus tôt par ses entités à Singapour et en Italie. « Nous avons revu totalement notre organisation du travail dans nos datacenters et notamment dans notre usine de serveurs à Croix, près de Roubaix, afin d’accroître notre production de serveurs de 30 % en moyenne. »
Les gagnants et les perdants du confinement
Si l’opérateur Cloud a connu une forte croissance de la demande, cette croissance n’a pas été uniforme, loin de là. Si certains ont connu une baisse d’activité avec de nombreux projets gelés par les grandes entreprises, d’autres ont fait face à une forte hausse de leur trafic. Ainsi, l’e-commerce alimentaire a connu une forte croissance dès le début du confinement, par opposition à l’e-commerce non alimentaire qui a connu une diminution, puis un rebond. « Les services qui ont connu la plus forte augmentation sont ceux qui ont trait avec le télétravail, mais aussi le monde du gaming dont nous sommes l’un des acteurs mondiaux et enfin le streaming vidéo » ajoute Michel Paulin. OVHcloud a notamment bénéficié de l’afflux de clients vers les offres de l’opération Open Solidarity.
La quarantaine de solutions de sécurité et de collaboration proposées en accès gratuit ont drainé de nombreux scolaires, mais aussi des entreprises sur les serveurs OVHcloud.
L’analyse est identique chez Scaleway, comme l’explique Yann Lechelle, le nouveau CEO de la filiale Cloud du groupe Iliad : « Nous avons observé un impact du confinement sur notre bande passante, avec un accroissement du trafic de l’ordre de 15 % en continu et des pics comparables à ceux d’un Black Friday. Il y a eu plus d’activité chez nos clients, mais en parallèle nous avons perdu de l’activité par manque de nouveaux projets. » Devant les soucis de performance rencontrés par certains services de visioconférence Web, le Français a notamment mis en ligne une plateforme Jitsi, une solution de visioconférence gratuite qui a été très sollicitée pendant le confinement avec un pic à 1 500 personnes en simultané.
Des fournisseurs confrontés à une montée en charge explosive
Illustration de ce succès pour les solutions de collaboration, celui de Smash, le concurrent français de Wetransfer qui a revendiqué 300 000 nouveaux utilisateurs venus s’ajouter aux 1,5 million d’utilisateurs habituels de la plateforme. Ce surcroît d’activité à eu des répercussions immédiates sur l’infrastructure du service conçue pour stocker les fichiers échangés par ses utilisateurs. Rémi Gouedard-Comte, co-fondateur de Smash : « Notre infrastructure a été conçue pour pouvoir monter en charge et si notre équipe technique a beaucoup travaillé pour que la plateforme soit disponible, beaucoup avait été fait pour en automatiser le fonctionnement. » La startup a lancé ses applications mobiles lors de la crise du Covid pour faire face à une forte demande des utilisateurs en télétravail ainsi qu’une offre à destination des grandes entreprises. « Nous travaillons en parallèle sur l’optimisation de notre plateforme et la qualité de service délivrée aux utilisateurs. Nous travaillons avec notre partenaire AWS pour optimiser nos coûts. »
Le Cloud public a permis aux offreurs de solutions de faire face à la hausse d’activité extrêmement brusque, mais il permet aussi de réaliser des déploiements à distance alors que les équipes techniques sont elles-mêmes confinées. Spécialisé dans le BPO de fonctions CRM, le groupe dispose de 140 centres de contact, essentiellement en Europe et en Afrique. Jusque-là, le télétravail ne représentait que 5% des opérations de Webhelp. « En 2 à 3 semaines, selon le pays, 38 000 collaborateurs sur les 55 000 que compte le groupe ont basculé en télétravail. explique Vincent Tachet, CIO du Groupe Webhelp. Nous avons fourni des kits de connexion, des postes de travail, un casque et éventuellement un boîtier VPN et les logiciels pour travailler à distance. »
Call center as a Service
Pour le DSI, la complexité ne fut pas technique, mais essentielle dans la coordination et l’organisation des transferts. En effet, l’activité de Webhelp s’appuie sur une architecture en centres d’appel virtuels qui a très largement facilité ce changement d’organisation, tous les centres d’appels du groupe accédant à des services de type call center as a Service.
Jamais le Cloud n’a pu démontrer à une telle échelle ses capacités en termes de flexibilité et de capacité de montée en charge.