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Le numérique a permis la lutte contre la Covid-19

Le déploiement, dans des temps records, de nombreux outils numériques, dont la célèbre application Tous Anti-Covid, a permis au secteur de la santé d’afficher une mobilisation sans précédent contre la pandémie de Covid-19… Et d’accélérer le virage du numérique.

 

La France n’était pas suffisamment bien armée, à l’instar d’autres pays, pour engager en urgence une lutte efficace contre la Covid-19 dès 2020. C’était déjà l’une des conclusions du rapport explosif publié en 2019 par Dominique Pon, directeur général de la clinique Pasteur à Toulouse – Responsable ministériel au numérique en santé, et Annelore Coury, directrice déléguée à la gestion des soins de la Caisse Nationale d’Assurance Maladie (Cnam). Ces deux experts préconisaient d’Accélérer le virage numérique du système de santé (…), car les professionnels de santé sont confrontés à une offre morcelée du numérique en santé rendant les usages complexes dans la pratique quotidienne. (…) Il est également urgent de repositionner l’usager comme le premier bénéficiaire des services numériques en santé en lui donnant les moyens d’être véritablement acteur de sa santé ». Le démarrage un an plus tard de la pandémie de Covid-19 allait leur donner raison.

Dominique Pon, DG Clinique Pasteur à Toulouse et responsable ministériel au numérique en santé

Face à ce tableau un peu sombre, tous deux préconisent alors la création d’un « Etat plateforme » qui utiliserait davantage le numérique dans la santé à l’aide d’une gouvernance renforcée. Mais établir un plan d’urbanisation aussi ambitieux au niveau des multiples systèmes d’information et des processus des acteurs de la santé semblait une tâche quasi-impossible à accomplir après des décennies de chaos organisé.

« Il existe tellement d’opérateurs dans la santé, tant au niveau national que régional, que la coordination est difficile au niveau global, tout comme la mise en place d’un outil numérique transverse pour coordonner nos efforts, au moins contre la Covid-19 » nous confie un proche du dossier.

Laura Létourneau, déléguée ministérielle au numérique en santé

« C’était sans compter la crise sanitaire. Dans la lignée de la mise en mouvement de tous les acteurs de l’e-santé depuis 2019, elle a été un bel accélérateur pour la numérisation du secteur de la santé. Les projets ont avancé beaucoup plus vite en trois ans que durant les 20 dernières années », explique Laura Létourneau, déléguée ministérielle au numérique en santé.

TousAntiCovid illustre parfaitement cette politique volontariste

A ce titre, le lancement dès juin 2020 de StopCovid, une simple application à l’origine de traçage des cas contacts Covid-19, enrichie et renommée TousAntiCovid trois mois plus tard, est l’illustration parfaite de cette politique volontariste de transformation numérique du secteur de la Santé.

Coralie Giese,cheffe des projets Pass Sanitaireet TousAntiCovid à la Direction Générale de la Santé

« Avec le recul, ce pari n’était pourtant pas gagné d’avance » se souvient Coralie Giese, cheffe des projets Pass Sanitaire et TousAntiCovid.

« StopCovid n’était au départ qu’un outil de contact tracing, concept qui faisait alors peur à beaucoup de gens. En devenant TousAntiCovid après s’être dotée de nouvelles fonctionnalités, cette application a gagné leur confiance ». Pour preuve, TousAntiCovid a été l’application gratuite française la plus téléchargée en 2021 sur près de 50 millions d’objets connectés.

Autre record battu, celui du temps de développement. « StopCovid a été conçue en seulement 3 mois – du jamais vu dans le secteur – grâce notamment à l’engagement de nos développeurs, mais aussi à celui de nos prestataires, qui sont parvenus à diviser par six leurs temps de développement classiques » précise Achille Lerpinière, le chef de division des SI de la Direction Générale de la Santé (DGS), une entité qui pilote les chantiers de transformation du numérique en santé publique.

Mais TousAntiCovid n’est que la partie la plus visible du plan global de lutte contre la Covid-19. En effet, Santé Publique France, en lien avec le ministère de la Santé, a dû activer d’autres moyens logistiques et informatiques, d’une ampleur inédite à nouveau, pour dépister, tracer et vacciner. Le dispositif a couvert l’ensemble des processus, de l’achat en ligne à la distribution au plan national, dans des délais courts, de centaines de millions de doses de vaccin et d’équipements de protection (masques, seringues, etc.), en passant par le déploiement des dispositifs de tests dans les hôpitaux, les cabinets médicaux, les pharmacies, etc. En voici quelques exemples.

Dépistage : le rôle stratégique joué par SI-DEP

La collecte rapide des résultats de millions de tests de dépistage auprès d’environ 4 200 laboratoires a été rendue possible, dès juin 2020, grâce à l’utilisation du Système d’Information national de suivi et de Dépistage (SI-DEP), un logiciel développé à l’origine par l’AP-HP.

Achille Lerpinière, chef de division des systèmes d’information de la Direction Générale de la Santé (DGS)

« Auparavant, la remontée des données s’effectuait via des tableurs remplis manuellement par les personnels de santé, dont ce n’était ni la compétence, ni la priorité à ce moment-là » se rappelle Achille Lerpinière. « Les données étaient en outre limitées à des statistiques agrégées ».

Les sénateurs français ont aussi salué cette performance : « Le processus de saisie des résultats dans SI-DEP a été développé
en moins d’un mois, un temps record, et 90 % des laboratoires y étaient raccordés au moment du premier déconfinement, alors même qu’un projet similaire porté par Santé Publique France
se heurtait depuis huit ans à une succession d’obstacles administratifs ».

« La crise sanitaire a été un bel accélérateur pour la numérisation du secteur de la santé »

Et pour cause, l’État a changé la donne. Par exemple, il a indemnisé rapidement les éditeurs de logiciels de santé réunis dans un consortium afin qu’ils les actualisent en une semaine seulement. Il a également simplifié ce dispositif de financement, tout en incitant les laboratoires à alimenter le SI-DEP, faute de quoi, ils perdaient le remboursement des tests effectués. A l’instar de TousAntiCovid, le SI-DEP a donc battu des records d’utilisation dès 2021, année où il a géré régulièrement plus d’un million de tests par jour. Ce logiciel est devenu tellement utile qu’Achille Lerpinière confirme que SI-DEP aura également vocation à être pérennisé à compter de fin 2022 pour le dépistage et le suivi d’autres pathologies, notamment les maladies infectieuses à déclaration obligatoire. Une belle reconnaissance pour son équipe.

Pas de suivi possible sans VAC-SI et Contact-COVID

En parallèle, les autorités de santé ont également utilisé le téléservice Vaccin Covid (faisant partie de la sphère VAC-SI) lors de la campagne de vaccination nationale. Déployé par la Cnam dès janvier 2021, sur la version Pro du portail Ameli notamment, son utilisation est obligatoire avec une carte CPS ou e-CPS pour tous les professionnels de santé autorisés à vacciner. VAC-SI leur permet par exemple d’éditer un certificat de vaccination pour le patient, de l’informer via SMS ou courriel de son éligibilité au vaccin, etc.

Ce fichier contient les données relatives à l’identité du patient et à la vaccination (éligibilité, nom du vaccin, date et lieu des injections, etc.). La plateforme Pro Santé Connect réalise ensuite l’authentification des données VAC-SI et la mise en relation.

En complément, Contact-COVID aide à assurer le suivi des cas positifs, à contacter les personnes cas contact, etc. Cette application développée et gérée là encore par la Cnam a aussi facilité la conduite d’enquêtes sanitaires de grande ampleur pour mieux tracer les variants de la Covid-19.

Le Pass Sanitaire, via la certification des preuves sanitaires, rencontre aussi un grand succès à l’étranger

Enfin, difficile de ne pas évoquer le succès du Pass Sanitaire dans ce nouveau dispositif numérique de grande ampleur pour lutter contre la Covid-19. Il incite à la présentation, sous forme numérique (via TousAntiCovid) ou papier, d’une preuve sanitaire (de test ou de vaccination) certifiée à jour en France. Mais aussi à l’étranger, où l’interopérabilité des certificats sanitaires a fait école comme s’en félicite Achille Lerpinière : « Son interopérabilité a été étendue pour s’adapter aux nouvelles lois européennes. Les certificats sanitaires sur un format interopérable sont désormais générés dans 62 pays à travers le monde. Du jamais vu ».

Coralie Giese confirme également le succès de cette application française à l’étranger : « Déjà interopérable avec 32 pays, le Pass Sanitaire y est devenu la référence. Même les Etats-Unis s’y intéressent désormais ».

Un succès qu’elle explique aussi par la mobilisation exceptionnelle des ministères et des grandes agences de l’État, qui constitue d’ailleurs une première à ce niveau dans la Santé. « Dans sa lutte contre la Covid-19, la France a aussi eu la chance de disposer d’un dispositif de santé centralisé, contrairement à l’Allemagne et l’Espagne, ainsi que d’un portage politique, juridique et financier sans précédent ».

Au final, la numérisation du secteur de la santé s’est effectuée avec une rapidité sans égale en France. Et elle est en voie d’accélération grâce au Ségur du Numérique en Santé.

 


Mon Espace Santé succède
au Dossier Médical Partagé

Ouvert en janvier 2022, Mon Espace Santé (MES), soutenu par un budget de 2 Md€ issu de l’Union européenne, devient le nouveau dossier médical numérique pour tous. Il devrait rencontrer un plus grand succès que feu le Dossier Médical Partagé (DMP).

Entre janvier et mars 2022, tous les assuré(e)s sociaux français seront informé(e)s de la création de l’application Mon Espace Santé (MES), leur nouveau dossier médical numérique, disponible sur ordinateur et dès aujourd’hui en version responsive. Elle leur permet de stocker de manière sécurisée leurs ordonnances et les données récupérées chez différents professionnels de santé, car le MES est en cours d’interconnexion à tous les logiciels des professionnels de santé (médecins, hôpitaux, pharmaciens etc.). Ni l’Etat, ni les mutuelles ou assurances, ni les employeurs n’ont accès à cet espace personnel dont les données sont hébergées en France.

Finis les envois non sécurisés, via Microsoft365 ou Gmail par exemple, d’ordonnances ou de messages avec les professionnels de la santé. Le MES dispose déjà d’une messagerie sécurisée compatible avec le référentiel MS Santé de l’Agence du Numérique en Santé. Un agenda récapitulant les rendez-vous, les dates d’examen-clés, etc. et un catalogue d’applications de santé référencées par l’Etat apparaîtront aussi en ligne courant 2022. Le développement technique du MES a été réalisé par un groupement sélectionné par appel d’offres et constitué par Atos, Octo, Accenture et l’éditeur de logiciels e-santé Maincare.

Mise en place d’un Segur du Numérique en Santé à 2 Md€

« Mon Espace Santé est la partie émergée de l’iceberg. Son lancement n’aurait pas été possible aussi rapidement sans tout le travail effectué en amont depuis le lancement de la feuille de route en 2019 pour numériser le secteur de la santé et construire la plateforme d’État », explique Laura Létourneau.

Le gouvernement a déployé des moyens financiers et organisationnels sans précédent pour aider le secteur de la santé à prendre le virage du numérique. En 2021, il a débloqué 2 Md€ sur trois ans minimum lors de son Ségur du Numérique en Santé. Sa priorité : restructurer l’utilisation des outils numériques éparpillés, améliorer leur interopérabilité, simplifier leur utilisation pour les patients, et ainsi contribuer au succès de Mon Espace Santé.