Si la donnée client a longtemps été rare, ce n’est plus le cas. Elle n’en est pas moins précieuse – à condition d’être fiable, traçable et exploitable par les systèmes et les équipes en charge du marketing et de la relation client. Pour toucher leurs cibles et accroître leur taux de transformation, les marques ont besoin de méthodes et de règles leur permettant de constituer et gérer un référentiel client unifié, réconciliant données internes et données externes, soutient Dan Malka, directeur technique Data Intelligence chez Keyrus qui milite pour une démarche de Client Master Data Management (MDM). Ses explications.
Ces quinze dernières années sont marquées par le phénoménal développement du réseau mobile et filaire planétaire, qui supporte un trafic de voix et de données toujours plus intense. Bien que ce réseau se fasse oublier la plupart du temps, il change profondément les habitudes de vie. Dans un monde devenu digital, nous sommes (inter)connectés en permanence, en tout lieu et à tout moment. Ne serait-ce que par nos téléphones mobiles, lesquels sont de plus en plus souvent des smartphones : en 2015, ces derniers ont représenté 86,2% des ventes de mobiles– portant à 58 % la proportion de Français équipés et pouvant, par conséquent, se connecter où bon leur semble. Pour le marketing et la relation client, cela change beaucoup de choses – au 3e semestre 2015, les achats sur mobile (m-commerce) représentaient 24% des achats e-commerce avec une hausse de 26 % par rapport au 1er trimestre 2015 (L’e-commerce porté par le mobile), ils permettent donc à présent de façon de plus en plus ciblée avec le consommateur.
Dans les mois à venir, après de forts investissements dans le secteur de la réalité augmentée, les nouveaux casques de réalité virtuelle seront encore plus prometteurs et destinés à un public plus large. Ils accentueront le rapport homme-machine à l’ère digitale, nourrissant de nouvelles problématiques éthiques liées notamment au respect de la vie privée.
1/ Données clients : la fin de la rareté
Nous sommes plongés dans un monde connecté en temps réel qui a généré ce déluge des données que l’on nomme Big Data et qui correspond à la multiplication presque infinie des traces numériques dues à l’explosion conjuguée du Web, des réseaux sociaux et du mobile. Dans cet environnement hyper-connecté, le consommateur n’en finit pas de laisser des traces, volontaires ou involontaires, fournissant des indications potentiellement précieuses pour les directions digital, marketing et CRM toujours plus créatives et intéressées par l’analyse des préférences et des comportements de leurs internautes, sociaunautes et mobinautes. Si ces évolutions signent la fin de la rareté des données clients, elles contraignent les entreprises à se doter de nouveaux moyens pour collecter, analyser, exploiter et valoriser ces masses d’informations et hétérogènes. Nous le savons, c’est par une approche intégrant la collecte, le traitement, l’analyse et la valorisation de toutes les données massives structurées (internes à l’entreprise) et non structurées (externes) que le CRM prend tout son sens désormais. Car seul le croisement intelligent de toutes les données clients peut permettre de renforcer à la fois la connaissance, la segmentation et la personnalisation, véritable graal du marketing et de la communication au service d’un consommateur sur-sollicité, de plus en plus exigeant et difficile à convaincre, à retenir.
Il n’y a pas si longtemps, la connaissance client reposait principalement sur l’analyse des données des systèmes internes. Le cloisonnement de ces derniers empêchait le plus souvent les équipes opérationnelles d’avoir une vue unique du client ou du prospect. Aujourd’hui, le marketing digital, le marketing prédictif et l’omni-commerce se nourrissent de nouvelles données, collectées de façon « identifiée » (dans les points de ventes physiques et, après authentification, via les canaux digitaux) ou de façon « anonyme » sur le Web, grâce au tracking des interactions avec la marque, ou encore à l’analyse des réseaux sociaux, permettant de cerner le profil et les centres d’intérêt du client potentiel.
2/ Le nouveau visage du référentiel client
Pour toucher leurs cibles et accroître leur taux de transformation, les marques ont besoin de méthodes et de règles leur permettant de constituer et gérer un référentiel client unifié, réconciliant données internes et données externes. La particularité de ce référentiel est d’intégrer dans la fiche client/prospect, en plus des données d’identification classiques des individus :
– l’historique de la relation entre la marque et le client,
– des indicateurs d’intérêt et d’appétence calculés statistiquement à partir des comportements des clients,
– des données de « contactabilité », c’est-à-dire l’accord explicite du client (par opt-in) pour recevoir les offres de la marque sur les différents canaux (courrier, téléphone, e-mail ou autres).
Ainsi conçu, un référentiel client fournit « une vue à 360° » de tout client (effectif ou potentiel), de ses comportements sur tous les canaux et de ses relations de façon générale. Seule cette connaissance client étendue, consolidée puis partagée, peut donner à une marque les moyens :
– d’interagir de façon ciblée, mesurée, personnalisée et, de plus en plus souvent, géo-localisée avec les clients, quel que soit le canal,
– de présenter la bonne offre, au bon moment, au bon endroit, afin que chaque client se sente reconnu, écouté, compris et privilégié,
– de respecter la législation en vigueur sur la protection de la vie privée et des données à caractère personnel.
Toute la difficulté d’une telle base d’informations clients est qu’elle n’a de valeur « business » que si elle est réellement constituée d’enregistrements de référence (ou « golden record » :
– chaque individu enregistré doit être unique, ce qui suppose d’identifier et d’éliminer les doublons ;
– toutes les données, unitaires et agrégées, se rapportant à un client doivent être exactes et valides à l’instant « t » (dernière version en date de la donnée, de façon consolidée en prenant le meilleur de chaque système).
3/ La démarche client-MDM et ses composantes
Une démarche Client-MDM vise précisément à créer et maintenir cette qualité de données, en mettant à disposition une méthode, un socle et des fonctionnalités de gestion des données de référence permettant à l’entreprise de répondre de façon maîtrisée à ses enjeux de relation client, tant dans le monde physique que dans l’univers digital.
La démarche nécessite, outre le déploiement d’une plateforme MDM, la mise en place d’une organisation (comportant, typiquement, des data analysts et des data stewards) garante des règles de gouvernance et des relations avec les fournisseurs et utilisateurs de données. La plupart des plateformes MDM du marché fournissent un moteur de règles et les fonctionnalités indispensables pour :
– nettoyer et normaliser les informations clients,
– repérer et éliminer les doublons et les données incohérentes,
– intégrer les données importantes d’autres applications et les mettre à disposition,
– gérer l’obsolescence et le cycle de vie des données,
– identifier de façon précise chaque modification des données,
– assurer la gouvernance globale de la qualité des données et gérer les droits des utilisateurs/propriétaires des données.
Quelles données intégrer et pour quelle utilisation ?
Il appartient, bien entendu, à chaque entreprise de déterminer ce que doit contenir son référentiel client. Les données peuvent être extrêmement variées mais il est logique de commencer par les données d’identification (nom, adresse postale, téléphone, adresse e-mail, adresse IP…) qui constituent le socle de la fiche client. Elles permettent en outre, par recoupement, de rattacher un internaute (à priori anonyme) à un nom et, le cas échéant, de reconstituer des foyers – unité plus pertinente que l’individu pour certaines stratégies marketing.
Les données de segmentation apportent un deuxième niveau d’information. Il s’agit d’indicateurs agrégés qui, une fois remontés dans le MDM, vont pouvoir être partagés et réutilisés dans d’autres applications et processus. Par exemple, le statut du client (gold, platinum ou autre) dans le programme de fidélité intéresse le marketing pour le ciblage de ses campagnes, mais aussi le service client, qui l’utilisera pour la priorisation des demandes à traiter. Plus volatils, les scores d’intérêt ou d’engagement (déduits par exemple des données de navigation sur le site de la marque ou du taux d’ouverture des dernières campagnes e-mails) entrent aussi dans cette catégorie. S’il n’y a pas vraiment de limite, mieux vaut cependant n’intégrer dans le référentiel client que les données présentant un intérêt ou une utilité pour d’autres départements/applications que ceux qui les ont produits.
Les données de contactabilité et de consentement deviennent elles aussi cruciales, compte tenu du renforcement de la législation sur la protection de la vie privée et de la réticence croissante des consommateurs vis-à-vis des sollicitations auxquelles ils n’ont pas explicitement consenti. Pour se protéger en cas de plainte, l’entreprise gagne à conserver l’historique des consentements donnés en regard des adresses e-mails concernées.
4/ Un socle partagé pour des stratégies clients gagnantes
A travers une démarche Client-MDM s’inscrivant dans la durée, les marques se donnent les moyens de se différencier durablement par leur capacité à capitaliser sur la connaissance clients et à l’exploiter pour susciter l’engagement et l’adhésion du consommateur actuel. Ce consommateur est hyper-sollicité et s’oriente vers les marques qui savent se faire préférer.
La capacité à générer cette préférence tient, certes, à la notoriété de la marque mais, de plus en plus, à la pertinence de l’expérience qu’elle lui propose – à lui, en tant qu’individu singulier, que la marque ne peut plus réduire à sa seule CSP ou à son historique d’achats. Il faut, plus que jamais, lui adresser des messages/des offres pertinent(e)s à l’instant T.
Le seul moyen d’arriver à ce niveau de pertinence perçue par le client est de relier les données issues des outils de tracking, de profilage et d’analyse, aux données démographiques et d’identification classiques pour décliner des stratégies d’hyperpersonnalisation. C’est précisément ce qu’une démarche Client-MDM permet de réaliser, à travers la mise en place d’un référentiel clients dynamique.