Fabien Petiau, country manager France d’OutSystems
Aujourd’hui, les entreprises s’endettent. Et il n’est pas question d’argent. En appliquant encore trop souvent une approche de fortune aux systèmes informatiques défectueux au lieu de prendre le temps de se moderniser, elles créent de la dette technique. Ce phénomène, présent même au plus profond de l’infrastructure informatique des entreprises les plus performantes, érode lentement l’efficacité, l’innovation et l’efficience. Selon un rapport publié en janvier 2021 par le Consortium for Information and Software Quality, la dette technique est en passe de quadrupler pour atteindre 5 000 milliards de dollars d’ici 2030, contre 1 300 milliards l’année dernière. Et si une partie de cette somme correspond au coût de l’activité, il est clair qu’une quantité importante de ressources est détournée de l’innovation et de l’expérimentation pour résoudre d’anciens problèmes opérationnels. D’après une autre étude réalisée par nos soins en 2021, c’est un tiers des budgets informatiques qui est consacré à la résolution de la dette technique. Alors pourquoi ?
À court terme, il semble intéressant d’adopter un nouveau cadre ou de conserver un enchevêtrement de code afin de respecter le budget ou le calendrier. Lorsque la pression monte, la recherche et la correction des défauts, les tests de régression et le déploiement descendent dans l’échelle des priorités. Ces mesures visant à réduire la dette technique, comme le remboursement de la dette financière, nécessitent du temps et de la planification.
Une idée fausse très répandue sur la dette technique est qu’elle est moins préoccupante aujourd’hui car elle a commencé il y a longtemps avec des applications héritées. Bien que cela soit en partie vrai, une nouvelle génération de dette est apparue avec les plateformes SaaS qui créent un étalement massif dans l’entreprise, avec une multitude de nouveaux outils nécessitant une hyper personnalisation qui finit par aggraver le problème.
En comprenant et agissant sur les causes de leur dette technique, chaque entreprise a toutefois le pouvoir d’ébranler cette menace, mais aussi d’en prendre le contrôle dès le départ. Compte tenu de la croissance potentielle du problème, l’inversion de cette dette doit devenir une priorité essentielle pour l’entreprise. Les responsables doivent communiquer avec les équipes informatiques et de développement afin qu’elles puissent mieux comprendre leur infrastructure technique et le problème auquel elles sont confrontées. Grâce à cette connaissance accrue, il existe de multiples façons de traiter la dette technique tels que l’ajustement des indicateurs clés de performance et les objectifs de l’équipe pour équilibrer la qualité et la rapidité. Il est aussi possible d’établir un ensemble cohérent et écrit de directives de codage qui peuvent être constamment mises à jour pour éliminer les risques liés à la rotation des développeurs.
De plus, l’entreprise doit suivre les métriques de défaillance lorsque les coûts et les ressources nécessaires sont faibles. Ensuite, il faudra donner la priorité aux outils qui vérifient la qualité des logiciels au début du développement. En les examinant et les testant, l’entreprise privilégiera ainsi la longévité, les approches modernes et celles qui simplifient l’hyper personnalisation des plateformes SaaS. Ces outils modernes et flexibles permettent ainsi de progresser sur le plan technique sans aggraver la dette, et de trouver le bon équilibre entre qualité, rapidité et échelle. Les équipes doivent consacrer du temps chaque trimestre au développement de nouvelles fonctionnalités, et de travailler la maintenance et l’amélioration des systèmes tout en évitant les calendriers arbitraires ou irréalistes et en accordant la flexibilité nécessaire pour améliorer la qualité des logiciels.
Il est aujourd’hui nécessaire de rééquilibrer les priorités en privilégiant le succès à long terme plutôt que les gains à court terme, et de trouver des outils capables de supporter cette transition. Mais en reconnaissant l’ampleur du problème et la nécessité financière et organisationnelle du changement, les entreprises font déjà le premier pas vers la création d’une culture technologique de l’innovation et du changement gérable. Avancer sans dette technique donne à l’organisation un sentiment de créativité, de flexibilité et d’autonomie.