TECH IN France, Syntec Numérique, la Fondation Jean-Jaurès, Renaissance Numérique : 4 organisations qui comptent dans la représentation du monde numérique et de leurs acteurs ont fait leurs propositions aux candidats. Décryptage.
TECH IN France : faire de la France « une Tech nation »
Avec ses 400 membres (grands groupes, PME et startups) TECH IN France (ex AFDEL) a pour vocation d’être le porte-parole de l’industrie du numérique en France. Le 31 janvier 2017, l’association a présenté 35 propositions pour faire de la France « une Tech nation ». TECH IN France a travaillé sur six axes qui « doivent converger » : le financement de l’innovation, une fiscalité stable et attractive, l’éducation et la formation, la souveraineté numérique et la commande publique, les nouveaux usages culturels, et les priorités stratégiques (Très Haut Débit, cybersécurité, industrie du futur, smart cities et big data). « Les candidats à l’élection présidentielle de 2017 doivent comprendre que le numérique est aujourd’hui le moteur de la croissance économique et de la création d’emplois en France. Il est temps d’adapter les politiques pour donner toutes leurs chances aux plus entreprenants et aux plus innovants de notre pays », soutient Bertrand Diard, président de TECH IN France.
Pour le premier axe, TECH IN France souhaite compléter la chaîne de financement des startups et PME et sécuriser l’accès aux aides publiques à l’innovation (CIR, JEI). On retiendra aussi la création d’un « Nasdaq européen » par une initiative franco-allemande pour la création d’un grand marché boursier des valeurs technologiques afin de permettre aux fonds d’accéder à des liquidités. On notera aussi des propositions sur la cybersécurité. TECH IN France estime qu’il faut favoriser la création de normes internationales et de certifications européennes afin d’assurer une meilleure coopération pour la sécurité internationale dans le cyber espace. Elle promeut entre autres la mise en place d’un cadre européen de certification.
Syntec Numérique proclame l’état d’urgence numérique
Intégrer le numérique dans chacune des actions de l’Etat, et « agiliser » le travail : deux axes forts pour le Syntec Numérique, le syndicat professionnel des entreprises de services du numérique (ESN), des éditeurs de logiciels et des sociétés de conseil en technologie. « Il est temps de faire entendre notre voix », clame Godefroy de Benzmann, président de Syntec Numérique, le syndicat professionnel des entreprises de services du numérique (ESN), des éditeurs de logiciels et des sociétés de conseil en technologie. « Les candidats à la présidentielle n’ont pas d’ambition, plutôt une liste de propositions. Le numérique n’est pas une case à cocher », affirme le responsable du syndicat qui pèse lourd dans le domaine du numérique, avec ses 1800 entreprises adhérentes réalisant 80 % du CA total du secteur (plus de 50Md€). Et de conclure d’une phrase choc : « Nous sommes en état d’urgence ! ». Le syndicat souhaite que la France devienne « une grande nation du numérique », devienne « la locomotive de l’Europe » dans le domaine et, pour cela, fait plusieurs propositions fortes. Godefroy de Benzmann souhaite la nomination d’un haut-commissaire à la Transformation Numérique, placé sous l’autorité du Premier Ministre pour être le fer de lance de la transformation numérique de la France, comme il y a eu par exemple un haut-commissaire aux solidarités actives contre la pauvreté, de 2007 à 2010, avec Martin Hirsch, Le syndicat propose également la création d’un Institut des Hautes Etudes de la Transformation Numérique (IHETN), à l’image de l’IHEDN (Institut des Hautes Etudes de Défense Nationale), créé au lendemain de la seconde guerre mondiale, car il estime que les dirigeants économiques et politiques, les hauts fonctionnaires, responsables d’ONG et d’organisations professionnelles doivent impérativement se former au numérique. En matière de formation, 30 millions d’actifs français vont devoir s’approprier de nouvelles compétences, la formation tout au long de la vie va donc être cruciale, selon le Syntec Numérique. Il invite donc le président de la République à lancer, dès juillet 2017, « un Grenelle de la formation », afin de réunir l’ensemble des acteurs privés et publics, et qui s’appuiera sur un Conseil stratégique pour la formation.
Revoir le droit du travail
Enfin, pour le Syntec Numérique, il faut « agiliser » le travail et sécuriser le parcours professionnel, au travers d’un compte personnel d’activité (CPA) connecté et bonifié, ainsi que d’un statut pour le travailleur indépendant numérique, à l’instar du « self-employed worker » britannique, qui « ne peut plus être requalifié en contrat de travail par le juge, ni donner lieu à des poursuites des plateformes pour travail dissimulé ». Godefroy de Benzmann propose également l’expérimentation d’un contrat de travail agile dans la branche numérique avec un « motif de la rupture contractuellement prévu au départ dans le contrat de travail dans le respect d’un cadre minimal fixé par le législateur ».
Fondation Jean-Jaurès et Renaissance Numérique :
repenser la démocratie grâce au numérique
La Fondation Jean-Jaurès, fondation politique experte des enjeux de vie publique, et le think tank Renaissance Numérique, spécialiste des questions numériques, souhaitent imaginer une nouvelle démocratie où « le collaboratif vient s’hybrider avec le représentatif, et bâtir un nouvel équilibre démocratique et institutionnel ». Leur objectif commun est de préciser quels sont les outils et les usages pour exercer la citoyenneté de demain.
Leurs propositions s’articulent autour de trois principes : la participation, avec un citoyen acteur continu de la démocratie, l’expérimentation avec des territoires qui deviennent des laboratoires démocratiques, et enfin la transparence des données publiques pour restaurer la confiance.
Ils ont identifiées deux conditions de réussite. D’abord la mise en place d’une identité numérique fiable, sécurisée, qui donne un accès simplifié aux participations publiques. Ensuite l’égalité avec une formation au « métier de citoyen ». Pour Gilles Finchelstein, directeur général de la Fondation Jean-Jaurès, « le champ numérique est très prometteur, notamment en ce qu’il pourrait favoriser un meilleur équilibre démocratique entre les formes participatives qu’il faut promouvoir, et les formes représentatives, qu’il faut rénover ». Pour Henri Isaac, président de Renaissance Numérique, « il est essentiel de repenser la place du citoyen dans notre système politique à l’aune des opportunités de participation et de transparence que permettent les nouvelles technologies numériques. Pour réussir, cette transformation doit se donner les moyens de former le citoyen à ses nouvelles responsabilités et de lui fournir une identité numérique lui permettant d’exercer ses droits et devoirs de citoyen en ligne ». Le groupe fait 25 propositions (à retrouver ici : https://jean-jaures.org/sites/default/files/redac/commun/rapport_fjj_rn.pdf). On citera la création d’un Conseil de l’innovation démocratique (CID) qui s’appuie sur plusieurs instances existantes : la Commission nationale du débat public (CNDP), ETALAB et la Direction interministérielle du numérique et du système d’information et de communication (DINSIC). Celle d’une assemblée mixte (élus et citoyens, par tirage au sort) pour réformer la Constitution. Ou encore la disponibilité en ligne de la quasi-totalité des services publics (avec quelques exceptions comme le mariage et le divorce), et la mise en place de la signature numérique sur la base du volontariat, et de façon systématique à la naissance de tout nouveau citoyen, à partir de l’acte de naissance.