La visio conférence était associée à la « salle de conférence », avec son « araignée » pour le son et son mur d’écrans. Le résultat est connu et a longtemps milité contre cette pratique : investissements lourds et rarement rentabilisés, maîtrise technique interne délicate, usage réservé à la direction générale. Cette vision tend non pas à disparaître, une salle de conférence reste un investissement, mais à se spécialiser autour d’usages plus verticaux, comme les réunions stratégiques de conseil d’administration, ou les salles de simulation. Par contre, les fournisseurs de bureautique (Sharp, Ricoh, Brother, etc.) se sont emparés du sujet pour construire des solutions physiques simples et multi-usage, destinées à la communication et au partage entre petits groupes de travail, autour du triptyque écran, caméra et MFP (imprimante multifonction). Dans une « petite » salle, ou dans un espace aménagé reposant sur un mobilier adapté (fauteuil enveloppant pour s’isoler individuellement de l’open space, ou mobilier de bureau en coquille, qui s’ouvre avec des chaises ou banc de chaque côté d’une table et en fond un écran et une caméra, et le MFP dans un coin), la réunion en visio gagne en qualité avec les caméras et écran 4K, et l’usage se transforme pour accorder une place à l’affichage partagé de documents sur lesquels travailler en direct à l’écran, et scanner pour afficher ou imprimer à la demande. La bureautique, qui cherche son prochain souffle avec le recul attendu du papier, se découvre communication, partage et collaboration.
Mais si ces solutions matérielles resteront car elles intègrent les process des entreprises qui les adoptent, l’avenir n’est clairement plus dans cet usage très physique de la visio. Et cela, même si les constructeurs n’ont cessé de faire évoluer leurs solutions. L’héritage de la téléphonie fixe est encore lourd, mais s’impose. Des fabricants et éditeurs comme Centile ou Mitel (plateformes de téléphonie dans l’entreprise ou UcaaS dans le Cloud), Polycom ou Gigaset (PABX, IPBX, terminaux), ou encore Jabra (écouteurs), transforment le poste téléphonique en véritable centre de visio. Qui fait de la résistance – sa force est d’être présent sur le poste de travail – mais souffre des usages individuels qui reposent sur le Web et le Cloud. Le matériel cède doucement sa place au virtuel, à l’Internet et au Cloud. Qui n’a pas fait l’expérience d’un WebEx (Cisco), d’un Skype (Microsoft), ou d’une solution de visio professionnelle prétendument propriétaire d’un opérateur télécom, qui repose en réalité sur des plateformes OEM comme Centile ?
Visio dans les suites bureautiques
Cette expérience se duplique désormais, et souvent en mode Shadow IT, sur le navigateur de l’utilisateur. Et là, les solutions de visio sont pléthore, avons-nous déjà constaté, mais pour la plupart réservées à la communication « one-to-one ». D’abord les éditeurs de suites bureautiques, qui restent au cœur du poste de travail, ont depuis longtemps intégré une brique visio dans leur offre. Ainsi en est-il de Microsoft Office (sous toutes ses formes, jusqu’à 365) avec Skype Pro, IBM avec Sametime (ex Lotus Sametime), Google avec Meet (qui remplace Hangout) dans la G-suite, ou encore le challenger Zoho. Nous leur associerons Apple avec FaceTime, livré en standard sur Mac et sous iOS. Les Gafam et réseaux sociaux proposent également leurs solutions, nous l’avons vu avec Microsoft et Google (qui différencient le pro du grand public, Google Duo par exemple). Citons également Facebook avec Messenger ou Amazon avec Chime. Beaucoup d’éditeurs, dont une majorité de startups, proposent des solutions indépendantes, comme Life Size, les Français Klaxoon ou Glowbl, ou l’américain BlueJeans.
Choisir sa solution
Le premier réflexe de l’entreprise qui souhaite adopter la visio est généralement de se tourner vers son fournisseur de téléphonie, afin de lui demander de faire évoluer ses équipements. Si ces derniers le permettent, ils le font très bien, en changeant les terminaux et en équipant l’entreprise d’un PABX IP (ou IPBX de l’anglais Internet Protocol Private Branch eXchange), un autocommutateur téléphonique privé utilisant le protocole Internet (IP) pour gérer les appels téléphoniques d’une entreprise et le Web, en interne sur son réseau local (LAN). La seconde approche est de faire évoluer les usages du poste de travail bureautique en invitant à utiliser les solutions de visio intégrées. Cette approche qui n’a pas l’estampille « téléphonie » a le mérite d’offrir de nouvelles fonctionnalités au-delà de la téléphonie, comme les messageries (mail et instantanée) ou encore le partage de documents et d’écran. Souvent, c’est une troisième approche qui l’emporte dans les usages, portée en partie par les nouvelles générations millénium ou autres influenceurs, et qui repose sur les outils de communication, voire de travail en équipe (Slack). Cette dernière approche se décline dans une version pro, avec des outils déjà cités comme Glowbl ou BlueJeans, mais aussi des dérives porteuses du Shadow IT, comme WeChat, considérées comme particulièrement attractives puisque la plupart de ces solutions sont gratuites sur un marché très concurrentiel.
Notre premier conseil sera de prendre en compte l’utilisateur, son environnement de travail, et de consulter les directions métier. Si en théorie les millenials sont nativement branchés sur une webcam avec des écouteurs dans les oreilles et un micro qui pend sur le côté de leur bouche, il n’en est pas de même pour la majorité des employés. Ceux qui travaillent en mobilité seront également plus réceptifs au changement. Les aspects technologiques, comme les contraintes liées au réseau ou la bande passante, étaient déterminants dans le choix d’une solution de vidéoconférence. Les technologies de réseau et de commutation sont aujourd’hui abouties et ne représentent plus un frein, sauf à être encore dans des zones blanches de couverture des télécoms… Attention cependant à valider la capacité d’intégration, l’interopérabilité, l’évolutivité et la sécurité des solutions et des équipements…
Le prix n’est pas un obstacle non plus, sauf à changer toute son infrastructure. Le marché est très concurrentiel, les tarifs pratiqués sont plutôt bas et maîtrisés, et sans commune mesure avec les services rendus. Le ROI de l’adoption réfléchie d’une solution de visio est très rapide, parfois immédiat. Par contre, il est fortement indiqué de se faire conseiller par un partenaire pour appréhender les besoins et usages, définir une solution adaptée, choisir les technologies et équipements. Le choix de la solution va d’ailleurs généralement de pair avec celui du prestataire… Dans la définition des besoins, la DSI devra également être capable de se projeter sur le long terme pour anticiper les futurs usages et comportements des utilisateurs.
Nous ne le dirons jamais assez, mais l’accompagnement est indispensable pour assurer la réussite d’un projet, quel qu’il soit. Qui plus est lorsque les changements sont profonds, comme d’échanger de visu ou de partager un écran.
Un utilisateur à accompagner
L’utilisateur doit en particulier être accompagné lors de sa première connexion. Une part non réduite à sa plus simple expression du budget du projet visio doit être consacrée à l’accompagnement au changement, et à la formation, avec des modules d’apprentissage vidéo par exemple qui auront le mérite d’introduire la vidéo dans les pratiques. Le meilleur guide pour le choix d’une solution de visio est de se demander si la solution envisagée apporte une expérience utilisateur optimale et sera capable d’évoluer rapidement vers une collaboration unifiée.