Le groupe de commerce en ligne Amazon a annoncé ce lundi 4 février avoir trouvé un accord avec l’administration fiscale française pour régler de lourds arriérés d’impôts, une avancée notable dans le combat engagé par Paris pour mieux taxer les géants du numérique.
L’accord marque la fin d’un conflit vieux de cinq ans: la multinationale américaine, visée par un redressement de près de 200 millions d’euros, a indiqué être parvenue à “un accord de règlement d’ensemble avec les autorités
fiscales françaises“. En vertu de cette transaction, “l’ensemble des chiffres d’affaires, charges, profits et taxes liés à l’activité de commerce de détail sont désormais comptabilisés en France“, a précisé le groupe dans une déclaration, confirmant une information de BFM Business.
Amazon ne précise pas le montant du chèque qu’il a dû envoyer au fisc français pour solde de tout compte. Contactée par l’AFP, la Direction générale des Finances publiques (DGFIP) n’a pas souhaité non plus communiquer ce chiffre, se retranchant derrière le “secret fiscal”. Ce redressement fiscal de 252 millions de dollars (202 millions d’euros) avait été notifié au groupe américain en 2012, pour des arriérés d’impôts portant sur les années 2006 à 2010, selon un document financier du groupe créé par Jeff Bezos
Le contentieux portait sur “l’allocation des recettes entre différentes juridictions étrangères” où le groupe est présent, selon Amazon. Une référence au fait que ses activités commerciales françaises sont pilotées depuis son siège européen du Luxembourg, un pays à la fiscalité plus légère que celle pratiquée en France. Le groupe fera “appel à tous les recours administratifs à sa disposition” pour contester la décision du fisc, précisait alors le document, figurant en annexe dans les résultats trimestriels du groupe et mis en ligne fin octobre 2012.
Solder les litiges et réformer la fiscalité des entreprises dans l’UE
Le géant du commerce en ligne avait déjà annoncé mi-décembre avoir signé un accord avec le fisc italien, prévoyant le versement de 100 millions d’euros pour solde de tout compte après une enquête pour fraude fiscale. L’occasion là encore de montrer patte blanche, en plein débat sur la fiscalité des Gafa (Google, Amazon, Facebook, Apple), accusés de vouloir échapper aux impôts en choisissant de s’installer dans des pays où la fiscalité leur est plus favorable.
Dans sa déclaration, le groupe américain – dont le chiffre d’affaire a bondi de 38 % en 2017, à près de 48,5 milliards d’euros – rappelle avoir “investi (en France, ndlr) plus de deux milliards d’euros depuis 2010 et créé plus de 5 500 emplois (en) CDI“. “En août 2015, nous avons établi une succursale d’Amazon EU Sarl en France afin d’avoir la meilleure organisation possible de nos activités pour servir au mieux nos clients“, ajoute la société basée à Seattle (Etat de Washington, nord-ouest).
Amazon suit l’exemple de Facebook, qui a annoncé en décembre qu’il déclarerait certains de ses revenus publicitaires dans les pays où il les gagne, et non plus en Irlande, où se trouve son siège européen. Une pratique que la Commission européenne entend généraliser, dans le cadre d’une réforme de la fiscalité des entreprises qui sera présentée fin mars par le Commissaire aux affaires économiques et financières Pierre Moscovici. “Nous attendons avec impatience leur proposition ambitieuse et nous devons ensuite œuvrer pour trouver un accord de tous les Etats membres”, a souligné le ministre de l’Economie Bruno Le Maire dans un entretien publié lundi par le journal italien La Stampa.
Le gouvernement français, qui a engagé ces dernières années plusieurs contentieux fiscaux contre des géants du numérique, s’était dit prêt l’été dernier à recourir à des accords à l’amiable pour solder ces litiges. “Nous ne sommes pas hostiles au principe d’un accord transactionnel, qui est une possibilité offerte par notre droit fiscal. Il vaut mieux un bon accord qu’un mauvais procès“, avait déclaré le ministre des Comptes publics Gérald Darmanin, à propos de Google. Cet autre géant américain est visé par un redressement fiscal de 1,115 milliard d’euros en France, qu’il conteste. En première instance, la justice administrative lui a donné raison, poussant l’Etat français – jusque-là opposé à des accords transactionnels – à faire évoluer sa position.