La Fondation européenne Women4Cyber veut promouvoir auprès des femmes les métiers de la cybersécurité. Entretien avec trois des cofondatrices, qui viennent de lancer sa représentation en France : Valérie Faure-Muntian, députée, Anne Le Hénanff, première maire-adjointe de Vannes, et Charlotte Graire, senior manager chez Airbus Cybersécurité.
Solutions Numériques : Quelle est la genèse de Women4Cyber ?
Anne Le Hénanff, première maire-adjointe de Vannes chargée de la performance de l’action publique et de la transformation numérique, et trésorière de Women4Cyber France : Avec le soutien de la Commissaire européenne Mariya Gabriel, ECSO (European Cyber Security Organization) a lancé en 2019 la fondation européenne Women4Cyber. Nous faisons toutes les trois partie des fondatrices. La fondation est présente aujourd’hui dans onze pays, nous avons lancé officiellement ce mois-ci l’association loi 1901 Women4Cyber France, qui représente la fondation sur le terrain.
S.N. : Pourquoi avoir lancé Women4Cyber France ?
Valérie Faure-Muntian, présidente de l’association et députée LREM de la Loire : Le monde de la cybersécurité manque cruellement de personnes formées. Il manque 300.000 personnes en Europe, selon ECSO. Or n’y a que 11% de femmes parmi les personnes en poste. De plus, l’image de la cybersécurité n’est guère positive auprès des jeunes, qui voient surtout des cybercriminels dans les séries télévisées. Elle est loin de représenter la filière globalement ! Il y a un vrai problème d’attractivité des métiers de la cybersécurité. Il est important d’acculturer les jeunes filles et garçons, au niveau collège et lycée, avant l’entrée dans les filières scientifiques.
Charlotte Graire, responsable chez Airbus Cybersécurité et secrétaire générale de l’association : Grâce aux réseaux sociaux, suite au lancement, nous avons déjà des jeunes femmes qui nous ont contacté pour en savoir plus sur les carrières en cybersécurité. La diversité de genre engendre la diversité des profils. Avec des cyberattaques de plus en plus sophistiquées, il est important d’avoir des profils variés pour détecter les attaques en cours. Nous avons besoins d’ingénieurs informatiques, mais aussi de juristes, de responsables RGPD, de responsables de la sécurité des SI (RSSI), de spécialistes de la protection des données et de la gouvernance.
A.L.H. : Les besoins en cybersécurité sont à la fois civils et militaires. Je constate une évolution : la sécurité et la protection des systèmes d’informations et des données devient un enjeu stratégique, traité au plus haut niveau des l’entreprise, des collectivités et des organisations. A Vannes, nous consacrons 10% du budget dans la sécurité numérique. Mais la maturité dépend encore beaucoup de la taille de la structure.
S.N. : Quelles sont les actions que vous souhaitez mettre en œuvre ?
C.G. : Nous souhaitons promouvoir des femmes de la cybersécurité en tant que role models auprès des jeunes et des femmes en reconversion. Nous souhaitons travailler avec l’Education Nationale.
V.F. : Nous souhaitons recruter le plus d’adhérents possibles. Nous allons travailler à la communication sur les différents parcours de carrière dans notre secteur. Nous souhaitons qu’il y ait plus de femmes intervenantes aux tables rondes sur la cybersécurité.
A.L.H. : En étant présentes sur ces tables rondes, les femmes montrent une image de la diversité et de la compétence : elles montrent qu’elles sont aux manettes. Les femmes peuvent s’identifier : pourquoi pas moi ? Nous devons également nous structurer et chercher des financements grâce aux adhésions personnes physiques et morales (organisations, fédérations) et le mécénat. Les premières actions seront lancées en 2022.
S.N. : Quels messages souhaitez-vous faire passer ?
A.L.H. : Nous voulons donner aux jeunes filles l’envie et la confiance en elle, dans leur capacité, à s’intégrer dans le monde de la cybersécurité.
C.G. : Nous souhaitons faire rayonner les métiers de la cybersécurité dans l’ensemble de la société. Et nous vous donnons rendez-vous à l’European Cyber Week qui a lieu à Rennes : nous y serons le 16 novembre pour la journée spéciale « European Cyber Women : l’enjeu stratégique pour la France et pour l’Europe ».
Propos recueillis par Christine Calais