Un datacenter, c’est moche, ça consomme de l’énergie, ça pollue, et ça ne crée pas d’emploi… Pas si sûr ! Les critiques qui portent sur le datacenter démontrent le plus souvent un manque de connaissance sur le sujet. Le point.
La pandémie est venue rappeler la place désormais incontournable qu’occupe le numérique, l’intérêt des modèles alternatifs de consommation de l’informatique, comme le télétravail, et la résilience du Cloud et de l’Internet. Tout cela est vrai mais n’aurait pu exister sans un socle commun sur lequel tout repose, le datacenter. Derrière toute solution informatique, tout smartphone, tout objet connecté, tout service en ligne, il y a des données et des logiciels, qui sont stockés, traités et transportés sur des serveurs et des réseaux, et tout cela se décline sur des architectures physiques localisées dans les datacenters.
Le datacenter est bien le cœur du numérique, celui à partir duquel le sang de la donnée circule. Et pourtant, il est à la fois décrié –par des élus, des écologistes, des citoyens– et menacé, dans sa chair, avec le dramatique incendie qui a frappé le datacenter d’OVHCloud à Strasbourg, ou dans ses fondements avec l’arrestation récente, c’est une première, par le FBI, d’un terroriste américain qui a fait l’acquisition d’explosifs dans le but de détruire un datacenter d’AWS et ainsi s’attaquer à l’Internet mondial. L’image du datacenter se ternit alors que le marché n’a jamais été aussi riche. Tout simplement parce que les volumes des données et des transactions explosent, tout comme les services en ligne du Cloud au SaaS, et qu’il faut bien les héberger…
Les critiques qui émanent sur le datacenter démontrent le plus souvent un manque de connaissance sur le sujet. Voici des réponses aux interrogations et une mise au point sur les erreurs de jugement.
Le datacenter n’est pas l’IT !
La première erreur, d’ailleurs, tient dans la cible, à savoir que le datacenter n’est pas l’informatique ! C’est une erreur compréhensible, une partie des personnes qui traitent de ce sujet, par exemple dans les médias, viennent des IT. Elles ont donc cette vision tenace de la salle informatique où l’on trouve les serveurs, le stockage des données et les réseaux, et se concentrent sur cette “stack hardware”. Mais le datacenter, c’est d’abord et en priorité un double projet immobilier et industriel.
Au départ, il faut de l’immobilier, soit existant et détourné de sa fonction initiale, soit à construire. Il faut un terrain et des murs. L’emplacement est essentiel, on choisira en priorité la proximité des voies SNCF ou des grands axes routiers, tenus pour leurs besoins et par les réglementations de disposer d’électricité et de fibre pour communiquer, ou encore des zones industrielles déjà équipées de ces infrastructures indispensables.
Un datacenter c’est moche ? Alors la grande majorité des immeubles industriels le sont. Et pour la sécurité des données qu’il héberge, le datacenter cherche à se faire oublier. Aujourd’hui, les architectes apportent leur touche aux projets, qui restent cependant des bâtiments industriels, on ne peut pas le leur reprocher…
Le datacenter est vertueux
Le datacenter est également un projet industriel, c’est-à-dire un “gros” projet électrique. Comme la plupart des industries, il embarque des équipements qui consomment de l’énergie, beaucoup d’énergie pour les plus importants. N’oublions pas cependant que cette électricité est principalement à destination de la donnée, donc de l’informatique. Ce sont les usagers des ordinateurs et des services informatiques et numériques, donc vous et moi, qui imposent la consommation du datacenter. A l’exception, bien qu’elle soit liée, du refroidissement. Car le fonctionnement des infrastructures informatiques entraîne la chauffe des équipements qu’il faut refroidir. Le refroidissement des salles et/ou des équipements est une des missions du datacenter.
Une réelle efficacité énergétique
C’est un point essentiel aujourd’hui, les datacenters, tout particulièrement en Europe, affichent une réelle efficacité énergétique. La commission européenne s’appuie sur une mesure, le PUE (Power Usage Effectiveness), pour déterminer l’efficacité énergétique du datacenter. Le PUE rapporte la consommation globale du datacenter à celle des équipements informatiques. Il y a vingt ans, les opérateurs de datacenters ne se préoccupaient pas de leur consommation d’électricité. D’ailleurs, celle-ci relevait des services généraux mais pas de l’informatique ! A l’époque, le PUE pouvait largement dépasser la valeur 3 ou 4, c’est-à-dire que pour 1 euro consommé par les serveurs, 2 ou 3 étaient consommés par le reste du datacenter, principalement le refroidissement. Il y a dix ans, ce PUE a été ramené en moyenne à 2,5, c’est-à-dire que la consommation électrique du datacenter se répartissait en 1 unité pour l’informatique et 1,5 unité pour le reste. Aujourd’hui, l’Uptime Institute a mesuré en Europe un PUE moyen de 1,4, c’est-à-dire que pour 1 MW consommé par les serveurs, le reste du datacenter n’a consommé que 0,4 MW. Les datacenters européens peuvent être qualifiés de meilleurs de la classe.
Le datacenter acteur de l’environnement
La transformation est exceptionnelle, car si en dix ans le volume des données a été multiplié par 15, entraînant une explosion du nombre des datacenters, la consommation globale de ces datacenters n’a progressé que de 6 %. Des milliers de chercheurs dans le monde continuent de travailler sur ce sujet, avec de nouveaux axes de recherche comme l’intégration des énergies renouvelables ou l’usage de l’hydrogène. Les acteurs du datacenter se montrent de plus en plus vertueux pour la planète et affichent leur ambition de respecter les directives européennes. Ainsi l’ont-ils signé dans un PACT européen volontaire, qui fixe le respect de l’objectif zéro carbone pour 2030.
Les datacenters français et européens sont très engagés dans cette voie. La plupart compensent leur consommation énergétique par de l’achat d’électricité verte ou en consommant en priorité celle issue des énergies renouvelables, quand c’est possible. De même, ils tentent d’exploiter la chaleur fatale du datacenter, celle qui disparaît dans la nature, en la redirigeant par exemple vers des unités de chauffage. Mais là, l’opération est plus délicate car il faut que l’environnement urbain s’y prête. Ils évoluent également vers la production interne de leur énergie, ce qui permet par exemple la pratique de l’effacement : lors des pics de l’hiver, au moment où la production des centrales ne suffit plus. Les datacenters engagés dans cette voie s’effacent pour réduire leur consommation, basculent sur les groupes électrogènes, et produisent plus que leurs besoins pour injecter de l’électricité sur le réseau.
De grands chantiers demeurent, cependant, tous les acteurs du datacenter y travaillent. Comme de piloter et réduire non plus la consommation énergétique du datacenter mais de l’IT qui y est exploitée. La multiplication des capteurs de l’IoT et l’usage de l’Intelligence Artificielle s’annoncent prometteurs. La gestion du cycle de vie des composants et le recyclage sont un autre axe de recherche. L’impact du datacenter sur la consommation d’eau est également un sujet important. Un datacenter de Google aux Etats-Unis ou en Amérique Latine consomme l’équivalent en eau d’une piscine olympique toutes les deux heures. Cela n’est pas admissible en Europe.
Le datacenter, l’économie et l’emploi
C’est une critique qui revient très souvent, surtout dans la bouche d’élus qui s’opposent à l’implantation d’un datacenter. Et pour certains lui préfèrent celle d’une entreprise de logistique. C’est vrai que le bilan humain direct de la création d’un datacenter se mesure en quelques dizaines de créations d’emplois (selon sa taille), contre quelques centaines pour une société de stockage et de transport. Mais s’appuyer sur ces chiffres démontre une vision limitée du sujet. Car le datacenter est un vrai projet économique pour un territoire. S’il crée peu d’emplois internes, il est un puissant moteur pour le secteur de la construction durant toute la durée du chantier, puis pour les entreprises tierces pour la maintenance et les services. Mais surtout, le datacenter représente une vraie opportunité de développement de l’économie numérique et de support de l’économie classique d’une région. Le datacenter est en particulier le hub, le nœud des interconnexions, pas seulement de l’Internet, qui reste accessible via les opérateurs télécoms qui s’y installent, mais par les milliers de kilomètres de câbles en fibre optique qui relient les infrastructures et les entreprises dans le datacenter et vers le monde à l’échelle de la planète. A moyen et long terme, l’impact d’un datacenter se mesure en dizaines de milliers de créations d’emplois, en créations d’entreprises et renforcement des écosystèmes en place, propulsant la dynamique économique d’une région.
Par ailleurs, et comme beaucoup de secteurs de l’économie numérique, le datacenter subit une pénurie de candidats à l’emploi. La formation est rare, les techniciens sont en priorité des électriciens et des frigoristes, mais cela ne se sait pas. Lié à l’informatique, le datacenter pourrait également séduire les futurs ingénieurs, mais ce monde entre l’industrie et le numérique, nous l’avons vu, est insuffisamment reconnu. Le datacenter reste donc, même sur des volumes faibles, un créateur d’emplois techniques accessibles même avec des formations de niveau bac pro ou BTS, voire dans l’insertion – les exemples se multiplient en ce domaine.
Enfin, l’évolution du marché des datacenters se rapproche des usages et des développements technologiques. Ainsi, pour être au plus près de la création et de l’emploi de la donnée, le datacenter sait se réduire et se rendre accessible en proximité des usages. C’est l’Edge computing, avec ces micro-datacenters qui prennent place dans les usines (IoT industriel), les bâtiments (smart-building), les villes (smart-city), les antennes 5G, le traitement de l’Intelligence Artificielle (IA), l’analyse des données (big data), la voiture connectée. Une nouvelle façon de consommer du datacenter émerge, qui vise la proximité et le temps réel.
La sécurité reste un domaine essentiel du secteur
Reste un domaine essentiel pour lequel l’incendie du datacenter d’OVHCloud est venu comme un triste rappel : le datacenter doit répondre à des objectifs de criticité que les investisseurs, les partenaires, les assureurs, et surtout les clients exigent. C’est pourquoi la sécurité reste un domaine essentiel du secteur, et un vecteur d’investissement important. Olivier Micheli, président de France Datacenter, dans une interview accordée à notre confrère Datacenter Magazine, a confié que l’incendie d’OVH a eu un impact mondial. Et il a rappelé que la réponse aux risques dans le datacenter tient dans l’investissement.
La tentative d’attentat terroriste contre un datacenter hyperscale aux USA vient également rappeler que le datacenter doit se protéger, physiquement, contre de multiples menaces : intrusions, problèmes électriques, terrorisme, etc.
Aujourd’hui également contre les risques de cybersécurité qui ne cessent de prendre de l’ampleur.
Le nouveau campus Thésée DataCenter
est équipé des solutions Panduit
Bâti le long de l’autoroute A13, Thésée DataCenter se déploiera en 6 bâtiments aux caractéristiques inédites : sécurité renforcée, haute efficacité énergétique, puissance permettant l’hébergement de baies haute densité (jusqu’à 20-30 kW) et certification Tier IV. Originalité, une marketplace permet d’accéder à des équipements Panduit et de simuler une salle IT.
Commscope, fabricant incontournable des équipements de transmission de la donnée
Nous nous devions de donner la parole au leader mondial des réseaux de communication, fabricant incontournable des équipements de transmission de la donnée, CommScope. Ceci d’autant plus que le câblage joue un rôle essentiel, mais trop souvent oublié, au sein du datacenter, qu’il s’agisse de transporter la donnée ou de limiter les risques comme l’incendie.
CommScope est un géant de l’industrie, le leader mondial de la fabrication des solutions d’infrastructure des réseaux de communication, avec 30 000 collaborateurs présents sur plus de 130 pays et 8 milliards de dollars de chiffre d’affaires. Le groupe a débuté voici plus de 40 ans, en 1976, sur les réseaux de télécommunication câblés. Il a su évoluer au rythme des technologies, et de sa croissance externe (dont Arris, Ruckus, ou encore la division connectivité d’Avaya).
Yves Grandmontagne