Alors que les interactions professionnelles numériques atteignent aujourd’hui les 85 % en raison du déploiement massif du travail à distance, un collectif s’est intéressé à cette question : les usages numériques permettent-ils de déceler des inégalités entre les femmes et les hommes ?
“Permettent-ils de déceler des inégalités entre les femmes et les hommes ? Sont-ils des facteurs aggravants, neutres ou réducteurs des différences de genre ?” Tels sont les questionnements auxquels ont tenté de répondre 16 experts de l’égalité professionnelle du secteur public, privé, du monde académique, ainsi que des praticiens, un collectif qui agit pour Mailoop, une start-up experte de l’analyse des usages numériques. Les chercheurs ont travaillé sur un échantillon de données de 30 millions d’e-mails et d’1 million de réunions professionnels collectés auprès de 4 500 collaborateurs. « C’est la première fois qu’un groupe de travail pluridisciplinaire dédié à l’analyse des signaux faibles des inégalités femmes / hommes dans les usages numériques est créé. Notre objectif est d’apporter des données concrètes sur lesquelles pourront travailler les experts de l’égalité professionnelle de façon à construire des indicateurs qui n’existaient pas auparavant. Il s’agit de comprendre la dynamique des flux de communication, que ce soit les e-mails, réunions et nouveaux usages numériques », souligne Arthur Vinson, CEO de Mailoop.
Des femmes managers beaucoup plus réactives dans leurs réponses
Selon l’étude, les managers sont devenus les relais centraux dans les interactions numériques : ils sont le maillon le plus sollicité, en interagissant avec 69 personnes différentes chaque semaine. Les collaborateurs sont sur-sollicités : ils traitent près de 80 e-mails par jour et passent 3h en moyenne en réunion en visio. Les femmes ont 10 % de plus d’e-mails à gérer et passent plus de 5 % de leur temps en réunion que les hommes. En outre, si l’hyper-réactivité et l’instantanéité sont aujourd’hui valorisées, elles représentent un coût cognitif important : elles impactent l’organisation du travail et la priorisation des tâches, et peuvent être un facteur de stress important.
L’étude montre que près de 46 % des e-mails ont une réponse en moins d’une heure. Les réponses des femmes managers en moins de 5 minutes sont 47 % plus nombreuses que celles de leurs collègues masculins. Ceux-ci se distinguent avec 49 % de leurs réponses qui sont plus nombreuses une semaine, voire davantage, après avoir reçu les courriels.
Un droit à la déconnexion difficilement respecté
Le droit à la déconnexion a du mal à être appliqué puisque près de 20 % des e-mails sont aujourd’hui envoyés en dehors des horaires “normaux” de travail empiétant sur les temps de vie de chacun. De plus, alors qu’il y a une augmentation de 44 % des e-mails échangés avant 8 heures le matin par les hommes par rapport aux femmes, il y a un accroissement de 15 % de ceux traités après 18h par les femmes, ce chiffre atteint même les 66 % chez les femmes managers.
« Alors que depuis plusieurs années nous travaillons chez Mazars à la parité, l’usage du numérique sur la représentation femmes / hommes est devenu un sujet primordial, c’est un de nos projets phares en 2021 et une des raisons pour lesquelles nous avons décidé de nous investir auprès du Collectif. De plus, nous sommes dans un contexte où l’infobésité est devenue une véritable plaie professionnelle, un phénomène qui s’est fortement accentué avec le développement du télétravail. L’analyse de nos flux de communication va nous permettre de révéler des indicateurs utiles à suivre et à mesurer pour alimenter notre politique stratégique. » conclut Mathilde Le Coz, membre du collectif et directrice des Talents & Innovation RH chez Mazars.