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La fin de la vie de bureau ?

Pendant le « bouclage » de ce numéro. De droite à gauche : Juliette Paoli, rédactrice en chef, Claude Marrel, graphiste, Jean Kaminsky, éditeur.

Rassurez-vous, en dehors du bouclage, l’équipe est en télétravail, sans masque !

 

Heureux de vous retrouver !

Le rythme trimestriel du magazine fait que ce nouveau rendez-vous, en juin, coïncide avec la phase de retour à la normale. Nous avons donc voulu en faire un numéro spécial, qui traite de la crise sous deux angles.

Ironie de l’histoire, le numéro précédent, spécial “Transformation numérique”, paraissait le 17 mars, 48 heures après l’annonce du confinement. La cérémonie de remise des Trophées de la transformation avait dû être reportée à septembre.

Et 40% des français sont devenus du jour au lendemain télétravailleurs, et donc champions de la transformation digitale, héros de cette digitalisation à marche forcée.

Nous allons d’une part tirer les leçons de la crise, raconter le rôle central qu’ont joué les outils numériques. Et puis, une nouvelle page s’ouvre, le chapitre de l’après-crise commence, et nous essaierons de dessiner ce “monde d’après”, empreint de digital.

Internet a tenu le choc

Revoyons d’abord rapidement ce film qui avait des relents de film-catastrophe. Pour les entreprises structurées, avec un service informatique le PCA (Plan de Continuité d’Activité) a joué le rôle de service incendie et a permis aux employés de basculer en télétravail tout en ayant accès à l’informatique de l’entreprise.

Il faut dire que la crise des gilets jaunes et les grèves avaient bloqué en fin d’année 2019 les transports et nombreux avaient été ceux qui étaient passé au télétravail. Cet épisode a servi a posteriori de répétition, de crash test quand la fermeture des bureaux a été ordonnée sans délai à cause de la pandémie.

Helpline, le spécialiste du Service Desk nous a raconté comment il avait actionné le 13 mars le PCA, ce qui, à l’annonce du confinement, le 16 mars, a permis le travail à domicile de ses 2500 collaborateurs, majoritairement techniciens du support, et aussi des équipes de ses clients, souvent membres du CAC 40. 29 000 appels quotidiens des utilisateurs sont arrivés au service desk.

« Le « monde d’après » :
Restart, Reset, Remote. »

Les néo-télétravailleurs ont découvert le rituel quotidien de la visioconférence. Peu connu auparavant, le disrupteur Zoom, pourtant contesté sur le plan de la sécurité, est devenu un nom commun, passant de 10 millions d’utilisateurs quotidiens en décembre 2019 à 300 millions en avril 2020 ! Google et Facebook ont réagi en lançant des services gratuits, tandis que Microsoft annonçait pour cet été une version grand public de Teams.

L’irréversible télétravail

Les propriétaires de tours de bureaux doivent se faire du souci. Google, Facebook, Twitter, et, plus près de chez nous, PSA ferment leurs bureaux. Selon le cabinet Deloitte, avant le confinement, le taux d’occupation des postes de travail était compris entre 50 et 70%. « Depuis le déconfinement et jusqu’à fin août, 70% des emplois de bureau et 20% des autres emplois devraient rester sous le régime du télétravail », estimait début juin le directeur général d’IDFM qui gère les transports d’Ile de France. Sa prédiction pour la suite est de 50% pour les employés de bureau.

De nombreux travailleurs deviendront des “sans bureaux fixes”, selon la formule de Bruno Marzloff. Ces nomades iront dans les openspace de l’entreprise, en flex-office (sans espace fixe attitré) quelques jours par semaine ou par mois, travaillant le reste du temps depuis leur domicile ou des espaces de co-working, lesquels avaient du mal à se rentabiliser avant la crise et vont prospérer.

Selon une étude Malakoff Humanis 73% des télétravailleurs veulent continuer. Malgré les inconvénients (logements souvent exigus, présence des enfants etc…), ils ont fait l’expérience, d’une forme de réconciliation de la vie professionnelle et de la vie personnelle, grâce au choix des horaires, de la flexibilité et d’absence de temps passé dans les transports.

Le “bureau”, le “siège” de la société, restera le point de repère destiné à assurer l’unité, l’image, la cohésion de l’entreprise, la créativité de ses membres et leur sociabilisation.

La perte d’identité physique de l’entreprise aura un impact psychologique. Le traumatisme du confinement a ouvert la boîte de Pandore des questions existentielles. Le sondage YouGov pour monster.fr montre que plus de la moitié des français ont remis en cause le sens du travail et 61% chez les 18-24 ans. Le challenge des dirigeants, des managers sera de remotiver les troupes, de conserver le sens du collectif et de l’entreprise à des équipes distantes.

Le “monde d’après”

La généralisation du Cloud, permettant le travail à distance et des économies de l’IT est irréversible. Il risque fort de confirmer le quasi-monopole des Gafam, Google, Amazon, Facebook, Apple et Microsoft. La capitalisation de ces big five dépasse les 5 000 milliards de dollars. De leur côté, les entreprises françaises ont une dette qui s’approche des 2 000 milliards et seront sous perfusion, dépendant des aides de l’Etat.

Et pourtant nous croyons au “restart”. Les entreprises auront plus que jamais recours au numérique, et ce secteur est un des rares qui est assuré de prospérer. Bien entendu, il faudra digérer le choc économique. Mais une étude de Capterra montre le redémarrage contrasté de la demande en logiciels et services : un quart des entreprises clientes auront anticipé de 1 à 6 mois la commande de logiciels ! Une entreprise sur 5 reportera ses achats, de 1 à 6 mois. Et 47% de plus de 6 mois (voir page 60).

La crise du Covid 19 nous a appris la nécessité de la vitesse d’adaptation. Les gagnants sauront combiner la résilience et l’agilité, les 2 clés du succès du “monde d’après”.

Jean Kaminsky,
Directeur de la publication et de la rédaction

         jk@solutions-numeriques.com