Sur un marché où les dépenses mondiales consacrées aux services et infrastructures dans les Clouds publics devraient doubler au cours des cinq prochaines années selon Gartner, les entreprises de toute taille migrent massivement vers le Cloud, qu’il soit public ou privé, notamment pour bénéficier de sa souplesse et sa sécurité. Jean-Paul Alibert, président de T-Systems France, revient sur le sujet pour les lecteurs de Solutions Numériques.
Le Cloud Computing, qui devrait maintenir une croissance de 17 % en 2020, se caractérise par un approvisionnement en libre-service, de l’élasticité, des services à la demande, et une facturation à l’usage (OpEx vs CapEx) qui constituent des atouts indéniables pour les organisations à l’ère de l’accélération rapide du numérique. Dans ce secteur, IaaS et PaaS connaissent une forte dynamique de croissance. Quant au logiciel en SaaS, il génère les plus hauts revenus du marché (soit 116 milliards de $ attendus en 2020). Enfin, l’infrastructure en IaaS devrait également afficher la plus forte croissance à deux chiffres (24 %) du marché du Cloud public en 2020, selon les estimations de Gartner.
Comment mettre en œuvre et réussir cette migration ?
Quelques définitions :
→ Le Cloud est dit privé quand la majorité des ressources sont dédiées, normalement accès réseau dédié, mais souvent DC Lan et sécurité de base partagés. Ceci n’empêche pas, chez certains fournisseurs, d’offrir une élasticité, un self provisionning et management et un prix à l’usage, bases du mode Cloud.
→ Le Cloud dit hybride est un Cloud privé (On premise ou privé externalisé) avec un partage de ressources sur un Cloud public, pour du débordement de stockage ou calcul ou d’autres besoins particuliers.
Ensuite, plusieurs modèles de services Cloud existent en fonction de l’usage :
- L’IaaS (Infrastructure as a Service), qui permet de provisionner de l’infrastructure et de bénéficier de l’agilité du Cloud (CPU, stockage, réseau), offre à ses usagers de la puissance à moindre coût.
Si l’infrastructure matérielle du service informatique (réseaux, stockage et serveurs) est externalisée, l’entreprise conserve néanmoins à sa charge la gestion des systèmes d’exploitation, des bases de données, des middlewares ainsi que des environnements d’exécution et applications, ce qui implique de disposer des compétences nécessaires en interne.
Avantageux pour qui ? En priorité pour les grands comptes, ETI ou PME disposant d’un service informatique capable de construire et de gérer leurs propres plateformes IT mais qui ont besoin d’ajuster leur infrastructure selon leurs besoins.
- Le PaaS (Platform as a Service), qui fournit la plateforme et l’environnement informatique (serveurs d’application, base de données), est aussi un levier d’innovation. Comparativement au premier, cette solution permet d’externaliser à la fois l’infrastructure matérielle et l’environnement logiciel associé. Elle laisse donc aux entreprises la possibilité de garder la main sur l’installation, sur le développement des applications utiles (dont celles dédiées aux métiers) et sur la sécurité des données associées.
Avantageux pour qui ? Pour les entreprises, quelle que soit leur taille, voulant garder la maîtrise et accélérer le développement de leurs applications métiers en utilisant des « micro-services » tout en s’affranchissant des contraintes de gestion de l’infrastructure matérielle et de l’environnement logiciel.
- Le SaaS (Software as a Service), levier stratégique de transformation digitale, se caractérise par un service à l’usage et une facturation à la consommation. Ainsi, les entreprises n’ont pas à se soucier ni de la maintenance de l’infrastructure, ni des ressources (mises à jour des logiciels et des systèmes d’exploitation) puisque ces missions sont gérées par les fournisseurs de SaaS choisis.
Cette approche clé en main facilite notamment le déploiement d’outils collaboratifs ainsi que le travail à distance ou en mobilité, comme observé durant l’actuel épisode de confinement. La difficulté est de bien valider et intégrer ces logiciels et middleware associés aux standards de l’entreprise pour garantir la cohérence et l’intégration des SI de l’entreprise.
Pour qui ? Toutes les organisations, petites ou grandes, peuvent trouver un intérêt à verser dans le modèle SaaS. Ce dernier représente d’ailleurs 60 % des ventes de solutions Cloud (Etude Markess International).
- CaaS (Container as a Service) qui propose des services de conteneurisation (notamment à l’aide de technologies telles que Docker et Kubernetes) afin que l’application développée par l’entreprise puisse fonctionner de manière performante sur n’importe quel OS et n’importe quelle infrastructure, n’importe où dans le Cloud, avec une portabilité embarquée et la possibilité d’implémenter la démarche DevOps jusqu’à un mode en production continue par les développeurs, bien cadrés et assistés par les équipes Infrastructures.
Chacun de ces schémas offre des opportunités de développement et des leviers d’innovation spécifiques pour les entreprises. Pour s’y retrouver, il faut toujours se demander quel modèle répondra le mieux aux ambitions de chaque organisation et les aidera à relever le défi de leur transformation digitale, sans négliger ni la sécurité de leurs données stratégiques/sensibles, ni le coût total de possession (TCO). C’est pour cela qu’il faut bien définir au préalable une approche claire de sa gouvernance sur le moyen et le long terme avant de se lancer. Bien acheter du Cloud c’est d’abord (et surtout) acheter des offres adaptées à ses besoins.
La première question à se poser en tant qu’acheteur est de savoir si le fournisseur qui sera choisi propose le modèle le mieux adapté aux objectifs et au périmètre concerné : saura-t-il répondre aux enjeux de l’entreprise ? Le delivery model (process et points de productions) correspond-il aux besoins de l’entreprise ? La seconde concerne le choix des éléments critiques (et communs à tous les modèles Cloud), des engagements contractuels (dont le degré sera variable) et de la localisation des données qui va influer sur le régime juridique applicable. La transparence doit être garantie sur ce sujet.
Enfin, les critères varient en fonction du type de Cloud. Ainsi pour le PaaS, les notions clés seront la disponibilité et le prix à l’usage des services proposés ainsi que de l’entrée et de la sortie des données stockées.
Pour le Cloud privé, qui s’inscrit davantage dans la durée, la disponibilité et la sécurité seront des critères importants, avec une nécessaire classification des données. Les SLA et l’engagement dans le contrat seront au cœur des enjeux. Les critères principaux pour le PaaS et le CaaS, qu’ils soient opérés en Cloud public ou privé, se concentrent sur le prix des infrastructures et le type de services opérés. Concernant le SaaS, souvent acheté et géré par les métiers, le critère principal restera les fonctionnalités ainsi que l’accès au support technique et la conformité réglementaire (RGPD).
Le Cloud est en constante évolution. Les solutions d’externalisation et d’accès à distance se multiplient donc au même rythme, avec, à la clé, toujours plus de services offerts pour que les entreprises puissent se focaliser sur leur cœur de métier et ainsi garder une longueur d’avance sur un marché très concurrentiel.
Demain, l’innovation viendra du développement du DaaS (Data As A Service) ou du TaaS (Telecom As A Service) ou bien du BaaS (Backend As A Service), ce qui est certain c’est que l’écosystème des services managés dans le Cloud est de plus en plus riche et personnalisé, et conduit les entreprises à qualifier plusieurs solutions différentes dans une approche multi-hybrid Cloud.
À l’horizon 2022, jusqu’à 60 % des organisations auront recours à l’offre de services gérés dans le Cloud par un fournisseur externe, de quoi alimenter les réflexions des DSI sur les investissements clés à réaliser dans les prochaines années !