Hier encore, le gouvernement d’Edouard Philippe comportait quatre secrétaires d’état chargés des relations avec quatre populations qu’il fallait sans doute « soigner » : les Femmes, les Handicapés, les Députés et … les Geeks. Ce sont ces derniers qui perdent leur Sécrétariat d’Etat dédié. Exit, en effet, dans le remaniement de ce jour, le « Secrétaire d’État chargé du numérique ». Le poste aura vécu 18 mois. Nous restons perplexe.
Le gouvernement précédent connaissait pléthore de secrétaires d’état : 17 sous Valls 2, dont une innovation dans la 5e République: le Secrétaire d’État auprès du ministre de l’Économie, de l’Industrie et du Numérique, chargée du Numérique, représenté par Fleur Pellerin et Axelle Lemaire, au sein de Bercy, donc sous l’autorité d’Emmanuel Macron.
On sait la diète draconienne imposée à l’exécutif. Sous Macron, exit , souvenez-vous, les les secrétariats d’état aux Anciens Combattants, au Tourisme, à la Francophonie, au Commerce & à l’Artisanat et j’en passe, qui ont fait florès dans les gouvernements successifs de la 5e République. Un gouvernement « resserré » voulu par le nouvel occupant de l’Elysées, a d’abord fait l’impasse sur ces « sous-ministères ».
Adieu Matignon, siège du pouvoir…
Mais Matignon arborait au moins, avant le remaniement annoncé aujourd’hui, deux secrétariats d’état emblématiques : celui de Marlène Sciappa, « chargée de l’Égalité entre les femmes et les hommes » et celui de Mounir Mahjoubi. Rassurez-vous, ce dernier reste au gouvernement, et sécrétaire d’Etat. Mais « Secrétaire d’Etat » tout court, et il passe de Matignon à Bercy. C’est doublement dommage. Matignon, c’est le lieu du pouvoir, de la coordination entre les ministères, on est à 1 clic de l’ Elysées… Ce lieu de pouvoir donnait l’autorité nécessaire pour gérer la nécessaire digitalisation de l’Etat, de l’administration, par exemple. Beaucoup plus technocrate, Bercy ne permet pas la même latitude.
Curiosité inédite, on note de surcroit que Mounir Mahjoubi dépend de 2 ministres différents, puisqu’il est, à la fois, Secrétaire d’État auprès du ministre de l’Économie et des Finances et du ministre de l’Action et des Comptes publics
Pourquoi avoir supprimé ce message fort ?
Notre Secrétaire d’Etat-tout-court assure, selon Le Monde, que ces changements ne changent pas la réalité de ses attributions, et qu’il se consacre toujours au secteur du numérique.
J’en accepte l’augure mais ne peut m’empêcher de m’inquiéter de ce changement de nom. Et j’ai du mal à m’ expliquer pourquoi le Président qui se rendait au CES, visitait il y a encore quelques jours Station F, s’affiche avec les starts-ups, se veut le champion de la Start-Up Nation, a supprimé ce message fort, un secrétariat d’état « chargé du numérique », et dépendant du premier ministre.
Reconquête industrielle et Industrie 2.0
Il est vrai que le gouvernement a annoncé en même temps ce jour la nomination à Bercy, en tant que sécrétaire d’Etat, d’ Agnès Pannier-Runacher, avec la mission « reconquête industrielle ». Bruno Le Maire a déclaré, selon l’AFP : « croire dans l’industrie du futur » , et « vouloir faire de la France la première nation en Europe en matière de nouvelles technologies, ça n’exclut pas de se battre pour chaque emploi industriel sur le territoire. Nous nous battons pour les emplois qui existent, et nous préparons en même temps l’industrie du futur ».
Sauvegarder les emplois industriels, sur le plan politique, est je le reconnais, un message plus fort encore que celui de renforcer le numérique. Souhaitons que ces deux objectifs se réalisent, en même temps.