Le gouvernement américain a décidé d’interdire aux agences fédérales d’acheter des logiciels de la société russe Kaspersky Labs, spécialisée dans la sécurité informatique, en raison des liens supposés de l’entreprise avec les services de renseignement russes.
Le bureau chargé des achats du gouvernement fédéral américain (GSA) a
indiqué à l’AFP dans un communiqué avoir retiré Kaspersky Lab de la liste des
vendeurs agréés. “Les priorités du GSA sont d’assurer l’intégrité et la sécurité des systèmes et des réseaux du gouvernement des Etats-Unis”, a déclaré l’agence.
Cette décision a été prise à la suite d’un avertissement des services de renseignement américains et de responsables de la sécurité nationale sur l’utilisation des logiciels Kaspersky, qui fournit notamment des logiciels antivirus. Ces responsables ont fait part de leurs inquiétudes sur les liens supposés de Kaspersky Lab avec l’armée et les services secrets russes, au cours d’une audition au Congrès en mai, sans toutefois préciser ces accusations.
Kaspersky Lab a déjà nié toute implication avec les autorités russes, affirmant à l’AFP être “injustement accusé sans preuve concrète pour étayer ces fausses allégations”. “Kaspersky Lab n’a aucun lien avec un quelconque gouvernement, et la société n’a jamais aidé, et n’aidera jamais, un quelconque gouvernement au monde dans ses efforts d’espionnage informatique”, a ajouté la société.
Une enquête de Bloomberg met le feu aux poudres
Selon une enquête de Bloomberg News publiée cette semaine, des emails internes de l’entreprise montrent que Kaspersky a entretenu une relation étroite avec le FSB, la principale agence de renseignement russe. Kaspersky Lab a réagi à cette enquête, dans un communiqué de presse en anglais intitulé “ Kaspersky Lab clarifie les déclarations inexactes publiées dans un article Bloomberg Businessweek le 11 juillet 2017.” L’éditeur y reprend point par point les accusations de Bloomberg, et indique “qu’indépendamment de la façon dont les faits sont interprétés”, Kaspersky Lab et ses dirigeants “n’ont pas de liens inavouables avec des gouvernements”, son seul objectif étant de “lutter contre la cybercriminalité.” Au sujet des emails, il indique : “Les courriels signalés ne montrent aucun lien”. Ils ont été “mal interprétés ou manipulés”. Bloomberg affirmant dans son article que Kaspersky Lab avaient indiqué que ces mails étaient vrais (“Kaspersky Lab confirmed the emails are authentic”), l’éditeur nie, expliquant que Bloomberg n’avait pas voulu les lui communiquer pour protéger sa source. L’éditeur est donc lui-même allé fouiller dans ses archives pour trouver les mails l’incriminant possiblement.
L’ex KGB “n’est pas et n’a jamais été un client”
Il est de notoriété publique, indique-t-il, que Kaspersky Lab “aide les autorités à travers le monde à lutter contre les cybermenaces, y compris celles en Russie en fournissant une expertise en cybersécurité sur les logiciels malveillants et les cyberattaques”. Et de donner des exemples d’arrestations auxquelles il a collaboré, comme celle des auteurs de CoinVault ransomware dont les victimes étaient hollandaises, allemandes, américaines, allemandes, françaises et anglaises. A une autre accusation de Bloomberg au sujet de la création d’un produit anti-DDoS pour l’agence secrète russe FSB, l’entreprise indique n’avoir jamais participé à un quelconque “projet secret” pour le gouvernement russe ou une organisation affiliée. L’ex KGB “n’est pas et n’a jamais été un client” de l’entreprise, renchérit l’éditeur.
Le fondateur de l’entreprise Eugene Kaspersky, né en Russie, a démenti à plusieurs reprises tout lien avec des agence gouvernementales. “Pour une raison ou une autre, on suppose que puisque nous sommes Russes, nous devons être liés au gouvernement russe. Mais est-ce que quelqu’un pense sérieusement que nous pourrions survivre longtemps en tant que société mondiale, si nous étions un pion de quelque gouvernement que ce soit ?”, a-t-il écrit dans un blog daté du 30 juin.
En mai dernier, de hauts responsables de la sécurité et du renseignement américains avaient fait publiquement part de leurs doutes concernant le géant de la sécurité informatique Kaspersky Lab, en raison de ses liens présumés avec Moscou : le chef du FBI par intérim, Andrew McCabe, Vincent Stewart, un haut gradé de l’Agence du renseignement de la défense, le directeur de l’agence de renseignement américaine NSA, Mike Rogers, les patrons de la CIA et de la National Geospatial Intelligence Agency, ainsi que le directeur du renseignement national.
Auteur : Juliette Paoli avec AFP