Le Français vient de dévoiler une roadmap ambitieuse afin de devenir le champion national des infrastructures Cloud pour l’IA. Outre des infrastructures à Marseille et Paris, Sesterce a plusieurs projets en cours dans le Sud-Est de la France. Son objectif est d’atteindre une puissance de 1 GW et 100 000 GPU d’ici à 2026.
Selon les chiffres avancés par Bloomberg Intelligence, le marché de l’IA représentera 1 304 milliards de dollars à l’horizon 2030. Cette explosion du marché va mécaniquement entrainer une très forte demande en termes de puissance de calcul, essentiellement des GPU, afin d’entrainer ces IA. C’est aussi l’analyse de Youssef El Manssouri, co-fondateur et CEO de Sesterce. Venue du monde du mining et de la Blockchain, la startup se positionne désormais comme un fournisseur Cloud spécialisé dans l’IA : « L’Europe détient aujourd’hui 0,3 % du parc de GPU à l’échelle mondiale, contre 85 % pour les Etats-Unis. Notre objectif est de combler cet écart autant que possible. » Le français a notamment noué des partenariats avec Nvidia, Dell, Vast, Doitnow afin d’assembler et déployer des clusters de GPU spécialement conçus pour l’entraînement et l’exécution des inférences de grands modèles d’IA. Néanmoins, selon le fondateur de Sesterce, le goulot d’étranglement réside dans la capacité énergétique à opérer des clusters à l’échelle : « C’est une problématique qui va s’accélérer. Aujourd’hui, l’état de l’art dans les datacenters est d’alimenter des racks à 3 kW à 10 W maximum. Or, quand on fait de l’IA, le besoin va monter à 150 kW, voire 250 kW avec les nouvelles architectures Nvidia Blackwell et Rubin. Or, pour entraîner leurs modèles, Mistral ou H auront besoin de capacités de calcul de plus en plus importantes. » Youssef El Manssouri prend exemple xAI, la startup d’Elon Musk, qui a construit un cluster géant de 100 000 GPU Nvidia H200 en 19 jours seulement. « Il s’agit du plus gros cluster IA au monde or cela crée véritablement un nouveau marché. Pour entrer en compétition avec eux, il faudra aussi disposer de tels clusters et nous sommes aujourd’hui à la croisée des chemins : il faudra à la fois plus de densité et une puissance électrique beaucoup plus élevée. Aujourd’hui, les acteurs du Cloud disposent de datacenters de 100 à 200 MW dont la puissance est partagée entre plusieurs milliers de clients. Demain, il faudra être capable de proposer un cluster unique d’une puissance équivalente pour un seul client. »
« Notre ambition est très élevée : nous voulons être un fournisseur Cloud complet pour l’IA. Pour atteindre ce but, l’infrastructure est la clé : il faut fournir les capacités pour entraîner des IA, mais aussi les exécuter », Youssef El Manssouri, co-fondateur et CEO de Sesterce
De grands projets dans le sud-est de la France
Pour s’imposer sur ce nouveau marché face aux hyperscalers et aux acteurs du Cloud « généralistes », le Français multiplie les annonces de nouveaux datacenters. En juillet dernier, Sesterce avait annoncé la construction à Marseille de Nexus Hub, un cluster de 4 000 GPU dont la puissance était alors estimée à 240 Petaflops, ce qui en ferait le cluster IA le plus puissant en France selon Youssef El Manssouri. En France, outre son infrastructure marseillaise MRS3, Sesterce vient d’ouvrir PA4 en région parisienne, dans les locaux de son partenaire Equinix. Il vient aussi d’annoncer la construction d’un nouveau datacenter de 40 MW à Valence, dans la Drôme. Nicolas Daragon, ministre délégué auprès du ministre de l’Intérieur s’est joint à Anthony Tchakerian, président de Sesterce, afin d’annoncer officiellement aujourd’hui la construction d’un datacenter de 40 MW, et 750 millions d’euros d’investissement sur le territoire de Valence. « L’objectif de ma présence est double » a expliqué le ministre : « L’IA est un enjeu important pour le gouvernement, y compris pour le ministère de l’Intérieur, mais aussi parce que je suis un élu local, le président de la communauté d’agglomération Valence Romans, une communauté de 230 000 habitants avec un très fort développement économique. Nous nous situons à la convergence du sillon alpin et de la vallée du Rhône, nous avons deux gares TGV, deux autoroutes et c’est un territoire prisé des chefs d’entreprise et je suis attentif à tout projet d’implantation sur mon territoire. Vous avez rendu visite à mes équipes en charge du développement économique et vous avez des projets. Je m’en réjouis, car il y a de grandes annonces au niveau national et il y a l’impact local et le souci qu’il y a de créer de la richesse et de l’emploi dans les territoires. Tout ne se passe pas à Paris ! »
Anthony Tchakerian a souligné l’importance du rôle des régions et des territoires dans le développement de tels projets d’infrastructure : « Sans un travail collectif au plus haut de l’Etat et avec les élus dans les territoires on ne peut déployer énormément de puissance sur le territoire national. Or si on parle beaucoup de l’IA et du Cloud, il y a avant tout de l’infrastructure réelle et si la France veut prendre une part importante dans cette croissance aussi importante pour notre futur, on doit développer des infrastructures et cela passe par les territoires. »
Selon les chiffres présentés par Youssef El Manssouri, Sesterce, l’entreprise a 400 MW en cours de développement. Un projet de Mega Hub est en cours de développement dans le sud-est de la France et des annonces seront faites dans les prochaines semaines à ce sujet. La présence d’installations nucléaire dans la vallée du Rhône et la capacité d’exploiter le river cooling pour atteindre un PUE inférieur à 1,1 sont des éléments séduisants pour déployer ces installations extrêmement énergivores. « L’idée est d’atteindre ces 400 MW d’ici 2 à 2 ans et demi, ce qui nous permettra d’accueillir la nouvelle architecture Rubin » argumente Youssef El Manssouri. « Avec des clusters à l’échelle en France, nos champions nationaux comme Mistral et H n’auront pas à quitter notre territoire pour entraîner leurs modèles. Nous avons la chance d’avoir en France une énergie décarbonée relativement abondante. Il faut aujourd’hui se servir de ce levier pour créer ces centres de calcul en France. Développer les capacités d’une entreprise française à supporter les champions français de l’IA est un vrai sujet de souveraineté ! »
Alain Clapaud