L’IA est désormais perçue par les dirigeants d’entreprises comme un levier puissant pour promouvoir le développement durable. Près de la moitié des dirigeants estiment que l’IA a un impact positif dans ce domaine au sein de leur organisation (55 %). La position dans l’entreprise est influente : 90 % des décideurs dirigeants sont convaincus que l’IA contribuera positivement aux Objectifs de Développement Durable (ODD), selon le dernier “Baromètre IA : entreprise et durabilité” réalisé par Mazars et Essca Research *.
Les domaines d’application de l’IA les plus souvent cités pour favoriser la durabilité sont la réduction des émissions de gaz à effet de serre, la gestion de l’eau, et l’optimisation de la chaîne d’approvisionnement. Les entreprises des secteurs du gaz, de l’eau, des infrastructures et de l’industrie sont les plus enthousiastes quant à l’apport de l’IA en faveur du développement durable.
“Cependant, cette perception reste principalement intuitive. Par exemple, les entreprises affichent une incapacité à mesurer leurs émissions liées à l’utilisation de l’IA, et l’exploitation d’IA non propriétaires installées dans le cloud complique davantage cette tâche“, notent les auteurs. Des domaines comme la biodiversité et l’agriculture durable reçoivent moins d’attention, montrant ainsi que le potentiel de l’IA pour la durabilité n’est pas encore pleinement exploité.
L’IA et l’énergie : problème ou solution ?
L’utilisation de l’IA en faveur du développement durable soulève également des préoccupations majeures concernant les impacts environnementaux et sociaux. La consommation énergétique des technologies IA est un sujet de préoccupation. Une récente étude de Goldman Sachs montre “qu’une requête ChatGPT nécessite près de 10 fois plus d’électricité pour être traitée qu’une recherche Google (une seule requête ChatGPT nécessite 2,9 wattheures d’électricité, contre 0,3 wattheure pour une recherche Google, selon l’Agence internationale de l’énergie). Cette différence signifie un changement radical dans la façon dont les États-Unis, l’Europe et le monde entier consommeront de l’énergie – et dans le coût que cela entraînera“. L’utilisation de l’IA devrait augmenter la demande d’énergie des centres de données de 160 % d’ici 2030, soit l’équivalent de la consommation énergétique d’un pays comme la Suède.
Pire, “l’augmentation attendue des émissions de dioxyde de carbone des centres de données représentera un ‘coût social’ de 125 à 140 milliards de dollars (en valeur actuelle)“, estiment les analystes de Goldman Sachs. Ces chiffres soulignent les défis à relever pour que les entreprises intègrent les objectifs environnementaux, sociaux et de gouvernance (ESG).
L’IA suscite également des inquiétudes pour les emplois. Environ 25 % des répondants du baromètre estiment que l’IA pourrait entraîner des suppressions d’emplois, soulevant ainsi des questions sur l’équité sociale dans la transition vers une économie numérique. 29 % des dirigeants identifient la confidentialité des données comme l’impact négatif principal de l’IA, reflétant une préoccupation croissante pour les risques éthiques et de sécurité associés à son utilisation.
Les entreprises commencent à adopter des mesures pour atténuer les impacts négatifs de l’IA. Par exemple, 57 % ont pris des mesures de lutte contre les biais d’équité, un taux qui monte à 72 % pour les entreprises ayant rencontré des problèmes éthiques liés à un projet d’IA. L’appropriation et la maîtrise de l’IA permettront peut-être de trouver de nouvelles solutions énergétiques et innovations sociales our résoudre ou amoindrir l’ensemble des impacts négatifs en faveur du développement durable ?
* Baromètre fondé sur les réponses de plus de 400 responsables informatiques localisés
principalement en France et au Royaume-Uni, explore le niveau actuel d’intégration de l’IA
dans les entreprises et son lien avec la durabilité. Les thèmes abordés incluent l’utilisation et
la gestion de l’IA, la gestion des données, la conformité, les opportunités et les risques en
matière de durabilité, les considérations éthiques et les perspectives d’avenir.
Patrice Remeur