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IA générative : Acorus à l’avant-garde

L’intégration à plus ou moins long terme des IAG dans les process des entreprises n’est pas une option. L’ETI Acorus, spécialisée dans l’écorénovation, l’a pleinement compris en entreprenant dès 2023 l’acculturation de ses équipes aux IA génératives, et en particulier à ChatGPT.

 

Christophe Chalvin, Acorus

« Voilà plusieurs années que le groupe Acorus investit dans le numérique. Aussi, dès l’arrivée de ChatGPT, nous avons cherché à comprendre qui l’utilisait et quels en étaient les usages en “shadow AI” au sein de l’entreprise, confie Christophe Chalvin, directeur du Lab Acorus, entité tech du groupe. Le fait que notre P-DG, Philippe Benquet, s’en serve lui-même, notamment pour la rédaction de documents, ainsi que notre vision de l’IA, considérée comme un outil parmi d’autres, ont facilité cette démarche auprès de nos collaborateurs. »

Lors de ce premier recensement, Acorus identifie une trentaine d’employés ayant des utilisations différentes de ChatGPT, allant d’usages très techniques comme ceux des collaborateurs du service achats à des usages plus classiques tels que l’écriture d’e-mails. « Les acheteurs ne sont pas des data analysts, mais ils ont parfois besoin d’extraire les données d’achats concernant un fournisseur ou un fabricant. ChatGPT leur permet de corriger leurs requêtes SQL sans solliciter l’équipe data », précise le directeur du Lab.

À la suite de ce recensement, Acorus décide, fin septembre 2023, de former tous ses chefs d’équipe et responsables de business unit, soit 140 collaborateurs, à l’utilisation de ChatGPT avec l’aide d’un prestataire externe, la société 3emeWeb. L’entreprise détermine une dizaine de cas d’usage et en présente quatre ou cinq lors de la formation. « Nous les avons bâtis autour des besoins existants des utilisateurs, explique Christophe Chalvin. L’analyse de devis, la rédaction d’un courrier de réponse à un architecte ou encore la synthèse de diagnostic amiante – au cours de laquelle ChatGPT identifie les emplacements avec de l’amiante afin d’alerter les équipes qui interviendront sur place – sont quelques exemples de ces usages. »

L’IAG, un outil comme un autre

Acorus est maintenant passée à la phase suivante, celle de rencontrer les équipes opérationnelles de chacune de ses 100 business units afin de former progressivement le reste des équipes, tout en explorant les usages de ChatGPT susceptibles de générer des gains de temps, comme l’analyse des appels d’offres pour le bureau d’études. « Notre objectif est de former petit à petit tous les collaborateurs dont le travail nécessite la rédaction ou l’analyse de documents, comme les assistants commerciaux, les chefs de BU, le service achats, la comptabilité ou le service RH, soit environ 400 collaborateurs », détaille Christophe Chalvin. Il dispense lui-même ces formations avec l’appui de son chef de projet numérique, un spécialiste de l’IA. En revanche, l’ETI n’a pas l’intention de former systématiquement ses techniciens, qui passent moins de temps à rédiger des textes. Ils ont néanmoins la possibilité d’assister aux formations s’ils le souhaitent et de suggérer des idées de cas d’usage.

Chez Acorus, ChatGPT et les autres IAG ne sont pas perçues comme des fossoyeuses d’emplois, bien au contraire. « Nos salariés ont l’habitude de considérer l’IA comme un outil et nous la déployons en collaboration avec eux en valorisant ses avantages, tels que l’automatisation et l’allègement de certaines tâches », affirme Christophe Chalvin. Pour ses 50 assistants commerciaux, l’entreprise a ainsi déployé un outil IA d’analyse de documents et de saisie automatisée, auquel elle a appris à saisir les bons de commande des clients, au nombre de 15 000 chaque mois.

Développé par la start-up belge Sagacify, il réduit par deux ou par trois le temps de saisie, selon le cas. Acorus envisage également de développer une IAG pour traiter les e-mails et les remonter plus rapidement, ce qui devrait faire gagner une à deux heures par semaine à une trentaine d’assistants commerciaux. « L’objectif est que les collaborateurs passent moins de temps devant leur écran et davantage en interaction constructive avec leurs collègues et nos clients », ajoute le directeur du Lab.

De nombreux cas d’usage en gestation

Pour son service achats, qui s’appuie sur un logiciel contenant plus de 100 000 références, l’ETI a développé un outil d’analyse et de description automatique de ces références en se basant sur la technologie d’IAG de la société Qwam, afin de proposer les filtres les plus pertinents possible pour le choix des produits. Acorus découvre chaque jour de nouveaux cas d’usage potentiels pour l’IAG. « Durant une formation avec la BU chargée de la maintenance, de la réparation et de l’installation d’ascenseurs, notamment pour les copropriétés, nous avons réalisé que les collaborateurs ont régulièrement de gros audits d’ascenseurs demandés par des bureaux de contrôle, qui produisent de volumineux rapports de plus de 200 pages. Les analyser prend beaucoup de temps et nous souhaitons entraîner ChatGPT à identifier les non-conformités et les points de sécurité importants, afin de gagner ensuite du temps dans la réalisation des devis et dans la correction et la maintenance des ascenseurs », confie Christophe Chalvin.

Acorus a également lancé des ateliers collaboratifs pour réfléchir à la façon dont l’IA peut améliorer ses réponses aux appels d’offres. Le premier a eu lieu le 15 mai dernier. Le directeur du Lab est convaincu que l’IAG ne supprimera pas d’emplois. « Elle changera peut-être leur nature et, souvent, elle les rendra plus intéressants et plus innovants, affirme-t-il. De nouveaux postes seront probablement créés car nous estimons que l’IA aura, à l’avenir, un rôle central dans notre entreprise, ce qui nécessite un minimum d’expertise et de connaissances, même si nous ferons aussi appel à des start-up dont c’est le métier. »

 


Une culture du numérique bien établie

Philippe Benquet, qui a repris Acorus en 2010 à son fondateur initial, un artisan plombier, a une formation d’ingénieur (CentraleSupelec). Il a toujours été convaincu que le numérique était indispensable à la croissance d’une entreprise et au BTP en général. Lancé il y a 10 ans, le Lab Acorus est la digital factory du groupe. Il a développé les outils numériques de l’ETI, qui comprennent aujourd’hui deux plateformes numériques principales : la première assure le suivi de toutes les commandes des clients, du traitement sur le terrain à la facturation, et la seconde est une plateforme d’achats, une sorte de place de marché avec 100 000 références d’articles, et permet aux 1 000 techniciens de la société d’acheter le matériel dont ils ont besoin. C’est sur cette plateforme qu’ont été menées les premières expérimentations d’IAG avec la société française Qwam.


Acorus : une croissance soutenue

Acorus, dont le siège se situe à Croissy-Beaubourg en Seine-et-Marne, est très présente en Île-de-France et possède également des agences dans plusieurs villes françaises : Bordeaux, Lyon, Nantes, Rennes et bientôt dans le Sud-Est de la France. Plutôt que de se considérer comme une entreprise de 1 700 personnes, l’ETI se pense comme une centaine de mini-entreprises, ou business units, ce qui lui confère une grande agilité dans l’innovation et la création de nouvelles activités.

La société, qui réalisait 20 millions d’euros de chiffre d’affaires et employait une centaine de personnes voilà 15 ans, a affiché un CA de 280 millions d’euros en 2023 et prévoit pour cette année 300 millions d’euros et 1 800 employés. Acorus a connu une croissance organique extrêmement forte, notamment grâce à d’importants marchés remportés dans les secteurs du logement, de l’hôtellerie et du tertiaire dans toute la France.

L’ETI poursuit maintenant sa croissance par une politique d’acquisitions, afin de compléter son offre globale d’écorénovation.

La dernière en date, en février dernier, est celle de la société Eneor, spécialisée dans l’amélioration de la performance énergétique des bâtiments. Acorus a par ailleurs ouvert son capital à ses salariés fin 2022, afin de toujours être innovante en matière de qualité de vie au travail et d’attirer de nouveaux talents. Elle a aussi mis en place la semaine de quatre jours cette année.