Garance Mathias, avocat à la Cour fait le point sur le secret, et sa différence avec les droits de propriété intellectuelle. www.avocats-mathias.com.
L’innovation, outil de développement stratégique des entreprises, est au cœur des droits de propriété intellectuelle et de leur valorisation. Ainsi, le secret et la confidentialité sont l’essence même de la protection des affaires. Il est donc essentiel que les données des entreprises, de toute taille et de tout secteur, soient recensées et protégées afin de garantir les positions concurrentielles ou de protéger leur réputation, notamment dans le cadre de la gestion des droits au sein du système d’information.
La protection des entreprises contre la divulgation de leurs informations confidentielles apparaît ainsi comme un complément nécessaire aux différents droits de propriété intellectuelle (brevet, droit d’auteur, marque, etc.). Le secret est bien souvent la première protection d’une création, susceptible d’être ensuite protégée par un droit de propriété intellectuelle. Il convient de bien garder à l’esprit la différence entre les droits de propriété intellectuelle et le secret. En effet, le maintien du caractère confidentiel sur une information ne confère aucun droit exclusif à celui qui la détient, contrairement aux droits de propriété intellectuelle.
Dans le cadre d’une entreprise, le secret n’est pas entendu de manière absolue. En interne, celui-ci est partagé entre les différentes équipes (recherche et développement, marketing, commerce, etc.). Rappelons que le contrat de travail prévoit une obligation de confidentialité ainsi qu’une obligation générale de discrétion. En revanche, la divulgation d’informations confidentielles à des personnes externes à l’entreprise implique la signature préalable d’un accord de confidentialité. Ces accords, qui régissent la diffusion des informations et leurs modalités ainsi que la durée de la confidentialité, devront être signés par toute personne, en ce compris les stagiaires, les sous-traitants, ou encore les consultants qui n’ont pas signé un contrat de travail.
Une directive pour la protection des savoir-faire et des informations commerciales non divulguées
Indépendamment des procédures mises en œuvre au sein des entreprises et des règles internes (contrat de travail, charte informatique, etc.), la Commission européenne et le Parlement ont adopté une proposition de directive pour la protection des savoir-faire et des informations commerciales non divulguées. Dans le cadre de ce texte, le secret des affaires est ainsi défini de manière large comme une information non-publique, du fait de la valeur économique et du potentiel qu’elle représente pour son détenteur, celle-ci faisant l’objet d’une protection raisonnable afin de conserver ce caractère secret. Par ailleurs, au titre de cette définition, une information peut être considérée comme étant un secret des affaires du fait des mesures de protection dont elle aura fait l’objet. En d’autres termes, la proposition de directive n’institue pas un secret absolu, mais une protection du savoir-faire, du talent et de l’innovation de l’entreprise.
Néanmoins, si ce projet de texte est adopté, un véritable équilibre devra être trouvé. En effet, comment concilier la liberté de la presse, celles des lanceurs d’alertes avec la protection de ce secret ?
En attendant l’adoption de cette directive en 2016 qui devra donner lieu à une transposition en droit national, les entreprises elles-mêmes auront donc un rôle à jouer dans la qualification des informations susceptibles d’être soumises au secret des affaires. Il s’agira de prendre les mesures de protection adéquates sur les plans technique et organisationnels.