- Région parisienne : Datacenters, les défis de la rentrée
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La miniaturisation et la virtualisation des serveurs dopent les centres de données de la Capitale. Ils accueillent davantage de données, sans accroître leur consommation d’énergie, et s’apprêtent à relever de nouveaux défis.
Sur 101 datacenters en colocation sur l’Hexagone, on en recense 38 à Paris et dans sa périphérie, concentration proche de celle des métropoles de Londres (44 centres) et de Francfort (34 centres). Le défi principal des sites parisiens consiste à remplir leurs nombreuses baies prêtes à l’emploi inoccupées, proposées dorénavant au même prix qu’en province, autour de 1300 euros HT par mois pour une baie de 46 Unités connectée à 1 Gbps.
« La virtualisation des serveurs réduit les espaces physiques et la consommation électrique. On trouve donc de la place libre un peu partout à Paris », note Philippe Laury, directeur général d’Ima’Diff, développeur et hébergeur de services et d’applications. Trouver de nouvelles surfaces n’est donc pas la priorité de cette rentrée. « Avec leurs processeurs moins gourmands, les serveurs modernes produisent moins de chaleur, ce qui se traduit par une double économie. Les besoins en refroidissement et en consommation électrique restent constants tandis que nous accueillons toujours plus de données et d’applications », confirme Samir Koleilat, président d’Acropolis Telecom.
25% de croissance annuelle
Grâce à cette évolution technologique, les centres parisiens hébergent plus de ressources à périmètre constant : « Sur les cinq prochaines années, nous pourrons faire face à 25% de croissance annuelle des capacités informatiques, tout en consommant la même énergie », précise-t-il.
Les bureaux parisiens étant coûteux, on réserve peu de place aux espaces techniques. Les équipements sont souvent relégués en sous-sol où la température est plus basse de quelques degrés, ce qui évite d’avoir à forcer la climatisation. Si l’exiguïté des locaux n’est plus un problème avec la miniaturisation des serveurs, les chaînes électriques et de production de froid doivent eux suivre l’augmentation de densité des équipements actifs (routeurs, pare-feu, serveurs). Raison pour laquelle les méga-centres franchissent volontiers le périphérique. « Les grands acteurs dépassent la première couronne. Ils examinent la Seine-et-Marne et les Yvelines, où il reste de grandes surfaces disponibles », observe Alain Huchon, responsable commercial de Spie Communications.
Lorsqu’il faut héberger toujours plus de services applicatifs et de données numériques, le prix du foncier peut faire la différence. Un dimensionnement correct des surfaces technologiques s’impose également, en réservant autant de mètres carrés aux locaux techniques qu’aux infrastructures IT. Méthode préconisée par Alain Huchon, en charge de l’offre de services en bâtiment intelligent de locaux techniques sensibles, qui intervient en Ile-de-France pour les clients de Spie Communications. « En réduisant la surface, on augmente les coûts opérationnels. Lorsque l’accessibilité des serveurs devient délicate, cela ralentit chaque intervention ». En réservant trop peu d’espace aux locaux techniques et aux manipulations des équipements, plusieurs sites parisiens souffriraient de ce défaut.
Eviter d’être hors-la-loi
Les interruptions de services en ligne restent soumises aux coupures d’alimentation. « On note 90 minutes de coupures électriques cumulées par an, en France. En zone urbaine, on atteint 120 minutes », confirme Emmanuel Bour, directeur de projets chez Rentaload. Les secours électriques – onduleurs et groupes électrogènes – font partie des équipements à tester et à maintenir régulièrement. Ils évitent souvent le crash, mais ne remplacent pas une bonne urbanisation des baies, pour une dissipation efficace de la chaleur. « Nos tests de charge s’avèrent précieux dès la création du site. Les grands acteurs effectuent ce type de tests tous les deux mois voire une fois par mois dans une vingtaine de sites en Ile-de-France qui comptent de 100 à 150 baies », poursuit Emmanuel Bour.
« En zone urbaine, on atteint 120 minutes de coupures électriques cumulées par an. » Emmanuel Bour,
directeur de projets chez Rentaload
Les serveurs et équipements réseaux modernes requièrent des chaînes électriques et de production de froid équilibrées, mais aussi une sécurisation et une régulation adaptées à leur environnement. Hébergés dans d’anciens bâtiments de Paris intra-muros, les serveurs peuvent mettre le dirigeant de l’entreprise hors-la-loi : « Pour rester dans les limites légales de production de chaleur et de bruit à l’extérieur des locaux parisiens, cela coûte très cher. La vétusté des immeubles Haussmanniens cause aussi des problèmes de résistance de structures. Les sols craquent sous le poids des serveurs à haute densité. Il faut trouver de nouveaux points d’appui et renforcer les planchers », prévient Alain Huchon. La réhabilitation de locaux industriels, plus simple et moins onéreuse, est ainsi devenue fréquente au nord de la Capitale, sur une zone englobant Clichy, Saint-Denis et Aubervilliers.
En période économique incertaine, l’approche modulaire permet d’investir au fur et à mesure des besoins, mais se heurte à un frein : « Avec le datacenter préfabriqué, on voit arriver des constructions alvéolaires à base de systèmes mécaniques robustes, en acier, très populaires au Royaume-Uni et aux Pays-Bas, alors qu’en France, on aime bien stocker nos données dans un bâtiment sécurisé, en béton, renforcé contre les intrusions et contre les coupures électriques », conclut Alain Huchon.
Le point sur… Paris :
risques de vol et d’inondationLa Capitale voit converger les opérateurs de transit IP et les sièges des grandes entreprises. Autrement dit, l’offre et la demande sont réunies. Pourtant, le marché francilien des datacenters reste confronté à un souci de place et d’accessibilité. Face aux demandes accrues en stockage, en capacité de calculs et en bande passante, la disponibilité et les performances des applications doivent être au rendez-vous. L’hyper-consolidation des données numériques privées provoque de nouvelles dérives, comme le vol de serveurs complets. Pour limiter ce risque, les datacenters de Paris ou de La Défense sont souvent placés en sous-sol, derrière plusieurs accès sécurisés. 15 % des risques d’accidents restent d’origine naturelle : canicule ou orage violent, par exemple. Dans la Capitale, la crue de la Seine est un autre risque. Les propriétaires de salles informatiques placées de part et d’autre du fleuve ont trois jours pour mettre à l’abri leurs serveurs, grâce aux retenues d’eau et aux alertes préventives. En Ile-de-France, on rencontre logiquement de plus en plus d’infrastructures répliquées sur deux ou trois centres de données.