AVIS D’EXPERT – A l’heure où l’Intelligence Artificielle prend le dessus médiatique à travers certains de ses représentants comme OpenAI GPT-4, copy.ai, Meta AI, Google AI, etc. l’humanité découvre les capacités du « Generative AI ». Mais qu’est-ce qu’une « Generative AI » (GAI) ou – en français – une Intelligence Artificielle Générative ? Guillaume Collard, associé fondateur de la CSB.SCHOOL nous partage ici son point de vue.
L’intelligence artificielle générative est un type d’intelligence artificielle permettant de générer du texte, des images, des vidéos à partir d’instructions. C’est donc un type d’IA mais ce n’est pas l’IA au sens large. Aussi, il est important de rappeler qu’il existe d’autres formes d’IA, dont une qui prédomine le monde de la science-fiction et de la culture populaire : Artificial General Intelligence (AGI). L’AGI, elle, est une intelligence artificielle qui serait en mesure de comprendre et d’apprendre n’importe quelles tâches ou comportements provenant d’un être vivant, qu’il soit humain ou non : le fameux Agent Smith de Matrix ou encore Sonny dans I, Robot. Souvent la peur d’une l’IA prenant le contrôle de l’humanité provient de cette dernière forme. Contrairement à l’AGI, une IA Générative (GAI) répond à un ensemble d’instructions humaines (elle n’est donc pas totalement autonome), afin de concevoir à partir de texte, d’audio, d’informations cérébrales ou encore d’une image, du texte, des vidéos, du code, etc.
Savoir dicter et non plus coder
Son objectif est donc de trouver la réponse la plus pertinente à une requête. Une IA Générative ne sait pas, elle déduit. Pour autant que son système d’apprentissage soit performant et que l’instruction soit extrêmement claire et précise, sa déduction peut-être pertinente au point d’être humainement juste et fonctionnelle. C’est sur la base de ces hypothèses que l’on peut imaginer qu’un certain nombre de métiers de la cyber, centrés autour du développement / code (DevOps, DevSecOps) ou encore des Centres Opérationnels de Sécurité (Analystes), seront impactés par ce type d’IA. Par analogie, les activités de la cybercriminalité seront également impactées. En effet, il sera moins nécessaire de savoir « coder » que de savoir dicter une instruction à une IA pour qu’elle réalise ce code. Cette vérité peut d’ailleurs s’étendre à quasiment tous les métiers de la Cybersécurité. Il sera moins nécessaire de savoir faire que de savoir expliquer quoi faire et analyser le résultat.
Un impact sur les métiers inévitable
Il ne faut, pour autant, pas se méprendre : un expert en cybersécurité ou encore un cybercriminel aura toujours besoin de connaître, comprendre et interpréter la réponse fournie pour évaluer sa pertinence avant de la pousser en production. Il jouera donc un rôle de contrôle qualité. L’IA Generative doit être vu comme un facilitateur pour les métiers de la cyber. Néanmoins, c’est un facilitateur dans les deux camps. Et là où les experts cyber pourront s’en servir pour les aider à concevoir plus vite des réponses aux menaces cyber, les cybercriminels pourront faire de même. L’inquiétude de ce genre de technologie ne doit pas être vue comme un impact sur le nombre ou la disparition d’emplois, mais plutôt sur son utilisation non contrôlée par des entités, organisations et personnes mal intentionnées. En effet, certains emplois sous leur forme actuelle, disparaîtront surement ou seront transformés mais d’autres se créeront. C’est le principe de l’arrivée d’une technologie qui est socialement disruptive, comme l’a pu l’être internet ou encore la machine-outil par le passé. Y a t-il moins de travail qu’auparavant ? Non… Les métiers sont-ils différents ? Oui… évidemment. Le vrai impact d’une telle technologie ne se joue pas sur les métiers mais sur les opportunités et menaces qu’elle génère sur la filière.
A quand une IA générative contrôlé par la criminalité ?
À l’heure où la Cybersécurité est un sujet en extrême tension, où l’on constate que le défaut d’investissement des années passées se fait drastiquement ressentir, la vraie question est : est-ce que nos sociétés sont préparées à accueillir ce type de technologie dans le monde cyber qu’il soit sécuritaire ou criminel ? A date, je ne pense pas que quiconque soit en mesure de répondre réellement à cette question, pour autant, il est certain que nous devons accélérer la prise de conscience des enjeux de cybersécurité : le jour où cette technologie sera complètement mature et maîtrisée, il faudra être prêt. Et ce jour arrivera bien plus vite qu’on ne le pense. Les premières attaques provenant d’IA Générative ont déjà lieu. Néanmoins, celles-ci reposent pour le moment sur des IA Génératives « grand public » et donc partiellement bridées. Il n’y a qu’un pas où une IA Générative sera complètement contrôlée et conçue par le monde criminel. La question n’est pas de savoir si ce moment va arriver mais quand il va arriver.
Pour terminer cette tribune, citons Stephen Hawking : « La création d’une intelligence artificielle serait le plus grand événement de l’histoire de l’humanité. Mais il pourrait aussi être l’ultime. » Faisons donc en sorte de lui donner tort.