L’échéance réglementaire concernant le passage à la facturation électronique arrive à grand pas et cette année 2023 sera vraisemblablement celle qui occupera DSI et directions financières… Christophe Bastard, directeur marketing d’Efalia, nous livre son expertise.
N’oublions pas que dès le 1er juillet 2024, toutes les entreprises devront être en mesure de réceptionner des factures électroniques, mêmes si elles ne sont pas encore obligées de les émettre dans ce format en fonction de leur taille. Aussi, au-delà de la réforme, n’est-il pas le bon moment pour s’interroger sur l’ensemble des processus financiers et comptables liés au cycle vie d’une facture ?
Cette échéance constitue, à n’en point douter, la bonne opportunité pour commencer à se pencher sur des pistes d’amélioration et optimiser, plus globalement, ses processus de dématérialisation !
Petit rappel sur le calendrier et les enjeux de la réforme
A partir du 1er juillet 2024, la facture électronique deviendra progressivement obligatoire en France. Ainsi, dès le 1er juillet 2024, toutes les entreprises, quelle que soit leur taille, devront être en mesure de réceptionner des factures dématérialisées. Les grandes entreprises devront, quant à elles, être en mesure d’émettre des factures dématérialisées. Puis, à partir du 1er janvier 2025, la réforme s’appliquera aux entreprises de tailles intermédiaires (ETI) et enfin, à partir du 1er janvier 2026, ce seront les petites et moyennes entreprises qui seront concernées.
C’est un tournant majeur. L’Etat veut ainsi enrayer la fraude à la TVA estimée à 23 milliard en France par l’INSEE, mais aussi accélérer la transformation numérique des entreprises avec, à la clé, des économies sur le traitement des factures, une simplification des procédures et l’abandon du papier.
Focus sur l’état de l’art
A ce jour, toutes typologies confondues, on estime que seulement 25% à 30% des entreprises françaises ont adopté l’e-invoicing. Le volume des factures attendu entre 2024 et 2026 et par la suite sera donc trop important pour être absorbé par le portail déployé par l’AIFE (Agence pour l’informatique financière de l’Etat). Pour pallier ces écueils structurels et organisationnels, il a donc été décidé de mettre en oeuvre des PDP (ou plateforme de dématérialisation partenaire), tout en musclant les infras de l’Etat avec un PPF (portail public de facturation), afin d’en faire la seule structure habilitée à transmettre directement les documents dématérialisés à l’administration fiscale, les deux dispositifs étant renforcés par des OD (opérateurs de dématérialisation), ainsi que par des experts.
Ainsi, progressivement, les entreprises ne pourront plus transmettre de factures au format papier ou par mail en PDF directement à leurs clients. Elles devront émettre/recevoir des factures électroniques structurées selon les formats autorisés en passant obligatoirement par des plateformes de dématérialisation partenaire (PDP) ou via le portail public de facturation (PPF) proposé par l’Etat.
Car une facture électronique n’est pas une simple facture PDF mais une facture émise, transmise et reçue sous une forme dématérialisée. La facture électronique dispose de données structurées directement interprétables par une machine pour faciliter aussi bien leur exploitation par les tiers, mais également par l’administration fiscale.
Quels bénéfices pour les entreprises ?
Au-delà des gains de temps et de coûts associés, la facture électronique va permettre aux entreprises de gagner en visibilité sur leurs transactions pour un meilleur suivi clients et fournisseurs, de réduire leurs erreurs, ainsi que leurs retards dans le traitement des paiements.
PAF et facturation électronique, le vrai booster pour une dématérialisation de bout en bout
Mais au-delà de la réforme, ne nous y trompons pas, l’objectif de l’Etat est bel et bien de renforcer la PAF ou Piste d’Audit Fiable, afin de prouver le bien-fondé de la facture et la réalité d’une transaction commerciale en traçant de bout en bout l’ensemble des opérations : depuis le contrat, en passant par le devis ou la commande, le bon de livraison, jusqu’à la facture et le paiement.
Si depuis 2013, les entreprises pouvaient émettre une facture au format papier, PDF, ou électronique, ces dernières devaient, dans tous les cas, respecter trois critères de validité :
- L’authenticité de l’origine de la facture (l’assurance de l’identité du fournisseur) ;
- L’intégrité du contenu de la facture (la facture n’a pas subi de modification) ;
- La lisibilité de la facture par un utilisateur ou l’administration.
Et, dans le cadre d’un format dématérialisé, trois options s’offraient à elles :
- Émettre les factures au format EDI fiscal (échange de données informatisées) ;
- Émettre les factures signées électroniquement avec une signature électronique de niveau qualifiée (selon la réglementation Eidas) ;
- Mettre œuvre une piste d’audit fiable (PAF) documentée et permanente.
L’absence de PAF expose en effet les entreprises à d’importantes sanctions, comme la remise en cause de la déductibilité de la TVA sur les factures d’achats, la remise en cause du caractère original de la facture de vente émise, entrainant une pénalité de 50 % du montant qui a été ou aurait dû être facturé (ramenée à 5 % en cas de comptabilisation des factures correspondantes).
Les entreprises devront donc, même après le passage à la facturation électronique, continuer à établir une Piste d’Audit Fiable (PAF) dès lors qu’elles émettent ou reçoivent des factures. Le passage à la facturation électronique n’entraine pas, de facto, la disparition de la Piste d’Audit Fiable.
Ce n’est donc pas la facture à proprement parler qui est au cœur des enjeux de la réforme, mais bien l’ensemble des processus de facturation. Car, quels sont les bénéfices d’une telle réforme si la facture est le seul document dématérialisé ? Quel est l’intérêt d’une facture électronique si les autres documents qui concourent à la PAF restent au format papier ? Ce sont donc bien les processus complets qu’il s’agit de digitaliser de bout en bout !
En conclusion
Si passer à la facturation électronique est inéluctable, il ne faut surtout pas attendre le dernier moment pour opérer ce changement. C’est dès maintenant qu’il faut considérer cette contrainte réglementaire dans un calendrier d’amélioration des processus d’entreprise et entreprendre une série d’actions comme :
- Impliquer les différents acteurs concernés ;
- Réaliser une cartographie des processus de facturation entrants et sortants ;
- Identifier l’ensemble des types de documents qui participent à ces processus, ainsi que la façon dont ils sont produits et classés pour en faciliter la recherche ;
- Vérifier la complétude de son système d’information par rapport aux différents flux cartographiés ;
- Enfin, mettre en place les bonnes solutions pour compléter son dispositif, dans le but d’assurer une dématérialisation de bout en bout et satisfaire l’ensemble des acteurs directs et indirects impliqués (fournisseurs, partenaires, clients ou encore actionnaires…), le tout dans un climat de confiance renforcé et consolidé !