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INTERVIEW « La France et l’Europe doivent investir dans la réalité virtuelle, qui va créer de nouveaux emplois »

Laurent Simon président de Burn Controllers et associé gérant de Under Control. Crédit: Lilian Ginet
Laurent Simon président de Burn Controllers et associé gérant de Under Control. Crédit: Lilian Ginet

Laurent Simon, spécialiste du jeu vidéo, prévoit dans différents domaines l’essor de la réalité virtuelle, qui conduit à créer de nouveaux emplois et nécessite d’investir dans les technologies et la formation.

 

Emplois-Numériques : Comment appréhendez-vous les marchés du numérique et du jeu vidéo à l’heure actuelle ?

Laurent Simon, président de Burn Controllers, qui personnalise des manettes de jeux et associé gérant de Under Control, qui distribue des accessoires de gaming :

Quatre révolutions bouleversent actuellement les marchés du numérique et du jeu vidéo :
– le développement de la réalité virtuelle, qui touche différents domaines comme la formation et la culture, sachant qu’un tiers du chiffre d’affaire de la VR est liée aux jeux ;
– le passage au web 3.0 grâce aux technologies blockchain ;
– les consoles de jeux sont remplacées par des plateformes de jeux ;
– l’essor du e-sport.

Comment envisagez-vous l’avenir de l’emploi lié à la réalité virtuelle ?

Il va y avoir de nombreuses créations d’emplois liées à la réalité virtuelle, que ce soit pour le jeu, le e-sport ou d’autres domaines comme la culture ou le voyage. Elle demande notamment un véritable savoir-faire en termes de création graphique. Ainsi des studios spécialisés se développent. Il y a actuellement 500 000 personnes qui travaillent sur la réalité virtuelle dans le monde, à dix ans, ce sera plus de deux millions de personnes.

Qu’est-ce que cela implique en termes d’investissement ?

Les grandes multinationales américaines et asiatiques investissent dans la réalité virtuelle et les métavers et dans la formation aux nouveaux métiers qui leur sont liés, comme en témoigne Meta qui est à l’origine avec Simplon de l’académie du métavers, lancé en France à l’automne dernier.

L’Europe doit elle aussi investir dans la réalité virtuelle pour développer les compétences et la maîtrise des technologies. La France a les moyens d’être un acteur important, grâce à ses écoles d’ingénieur déjà très investies dans l’intelligence artificielle. De nombreuses technologies restent encore à améliorer comme le retour haptique (vibrations qui sollicitent le sens du toucher). L’enjeu a été pris en compte, puisque le conseil national de la xR a été lancé en avril 2022. Et comme le souligne notamment le rapport exploratoire sur le métavers remis fin octobre au gouvernement, le développement des métavers nécessite à la fois des efforts en termes d’investissement, de formation et de soutien à l’innovation (voir encadrés ci-dessous).


Qui est au conseil national de la xR ?

Le conseil national de la xR, lancé en avril 2022, réunit en un organe de représentation unique les associations professionnelles du secteur (Association Française de la XR, Euromersive, France Immersive Learning, French Immersive Studios, Laval Virtual, Producteur.ices d’eXpériences Numériques, RA’Pro et VR Connection) et 500 acteurs du secteur de type et taille variées (notamment l’Inserm, le Cnam, l’Inria, Laval Virtual, VrRoom, Lynx, SmartVr). Son but est de fédérer, structurer et promouvoir la filière d’excellence française en la matière.

Rapport exploratoire sur le métavers : 10 propositions pour une politique française des métavers

D’après le rapport exploratoire sur le métavers remis fin octobre au gouvernement, le métavers est « un service en ligne donnant accès à des simulations d’espaces 3D temps réel, partagées et persistantes, dans lesquelles on peut vivre ensemble des expériences immersives. » Les métavers s’annoncent comme porteurs de débouchés majeurs, de l’industrie à la santé, en passant par la formation et l’économie. Parce qu’ils pourront contribuer à la démocratisation de nouvelles formes d’expressions culturelles et d’outils de création en ligne, ils représentent une opportunité indéniable. Pour la France et pour l’Europe, le développement des métavers doit permettre l’émergence de nouveaux leaders mondiaux des usages du numérique et renforcer le rayonnement culturel français.

Le rapport appelle à la définition d’une véritable politique française et européenne des métavers. Il propose dix leviers d’actions visant à développer l’infrastructure technologique, soutenir l’innovation, miser sur les usages, orchestrer la régulation et prendre en compte les enjeux sociétaux et environnementaux :

  • rassembler les acteurs français des métavers autour de projets concrets liés aux Jeux Olympiques, au sein d’un consortium public/privé placé sous le pilotage de l’institut national de recherche en sciences et technologies du numérique (Inria), afin de proposer des expériences immersives pouvant être partagées avant, pendant et après les Jeux olympiques et paralympiques (entraînement/compétitions, transport/tourisme, coulisses/échanges avec les athlètes) ;
  • réinvestir les instances de négociation des standards techniques, afin que la France et les principaux acteurs français du secteur numérique de l’immersion et de la recherche participent activement aux discussions sur l’interopérabilité des technologies de l’immersion ;
  • amener la puissance publique à faire émerger les services communs et essentiels permettant l’avènement d’une pluralité de métavers interopérables ;
  • analyser les différentes chaînes de valeur des métavers afin de guider au mieux les domaines d’investissement stratégiques et d’évaluer les risques de perte de souveraineté ou de fuite de valeur ;
  • mettre en place des commandes publiques répondant aux objectifs de souveraineté culturelle et technologique pour soutenir des « attelages hybrides » entre structures françaises technologiques et institutions culturelles ;
  • lancer le travail d’adaptation aux enjeux des métavers du règlement général sur la protection des données (RGPD), de la législation sur les services numériques (DSA) et de la législation sur les marchés numériques (DMA) ;
  • investir dans les outils d’analyse des métavers et des transactions qui s’y déroulent afin de permettre la détection des infractions pour remonter aux auteurs ou de percevoir l’impôt ;
  • investir dans des initiatives de recherche interdisciplinaire (informatique, neurosciences et sciences sociales) de grande ampleur et à long terme, afin de développer des métavers expérimentaux guidés par des besoins sociétaux (culture, santé, éducation) et d’en évaluer les risques sociaux et techniques ;
  • créer un institut de recherche et coordination, à la fois laboratoire de recherche en informatique dédié aux arts immersifs, lieu de coordination entre chercheurs et artistes pour la création d’œuvres immersives innovantes dans les métavers et comptoir d’expertise pour les institutions culturelles concernées ;
  • explorer des solutions écoresponsables et développer un système de mesure de l’impact environnemental des infrastructures du métavers.