La home page de Capgemini affichait le 15 mars un pavé en forme de faire-part : Serge Kampf, son fondateur et artisan de sa croissance, s’est éteint le 15 mars, à l’âge de 81 ans.
Cet ingénieur grenoblois, ancien cadre de Bull, avait fondé Sogeti en 1967. Parmi de nombreux rachats, l’acquisition de Cap et de Gemini Computer Systems, en 1974 aboutissent au groupe Capgemini. Le fondateur était resté aux commandes durant 45 ans, jusqu’en avril 2012. Directeur général depuis 2001, Paul Hermelin en est le PDG depuis le départ du fondateur. C’est Paul Hermelin qui rachète en 2014 Euriware, la filiale informatique d’Areva, face à Atos et à Steria, et en 2015, l’entreprise américaine d’outsourcing Igate, pour 3,6 milliards de dollars.
Cap Gemini est désormais la première ESN française et emploie 145 000 personnes.
Passionné de rugby
Serge Kampf avait deux passions, le bridge, ce qui a inspiré l’as de pique présent dans le logo de l’entreprise, et le ballon ovale. Mécène du rugby français, il avait soutenu les clubs de Biarritz et Grenoble et la sélection internationale des Barbarians.
Dans un communiqué, François Hollande a rendu hommage à « un grand entrepreneur » qui avait fait de Cap Gemini « un des fleurons de l’économie française et une entreprise de taille mondiale » .
Témoignage : Siparex avait accompagné la croissance du groupe.
Dominique Nouvellet, fondateur et ancien Président du Groupe Siparex, a adressé à la presse son témoignage:
« Notre groupe a eu le bonheur, dans les années 80, d’accompagner le formidable essor de Cap Gemini, cette ETI grenobloise devenue un leader mondial sous l’impulsion de son remarquable fondateur.
En effet, c’est Siparex qui a débloqué en 1980 le verrou capitalistique qui bloquait le développement de cette entreprise en lui permettant de réaliser ses ambitions.
Comme je l’explique dans mon livre : « Siparex, pionnier du capital investissement français », paru en novembre 2015 aux Presses des Mines, Serge Kampf avait des relations difficiles avec le patron de la Cisi, une filiale du CEA, qui détenait la minorité de blocage dans son capital et lui interdisait de procéder aux augmentations de capital indispensables pour financer son expansion. Nous avons monté un pool d’investisseurs qui a fait sauter ce verrou en rachetant la participation de la Cisi, puis nous avons accompagné Cap Gemini pendant quelques années avant que Serge Kampf nous rachète nos parts pour faciliter l’entrée à son capital du Groupe Wendel.
Serge Kampf fait partie de ces grands créateurs d’entreprises français dont la réussite inspire encore un véritable dynamisme auprès des entrepreneurs d’aujourd’hui, que ce soient des patrons de PME et ETI ou les milliers de créateurs de start-up qui constituent à mon sens l’un des points forts de notre pays, reconnu par leurs partenaires et leurs concurrents du monde entier.
Saluons également la volonté de Serge Kampf de développer au niveau mondial une entreprise dont les racines et les centres de décisions sont restés français, sans céder à la tentation de « se vendre » à l’étranger, comme y sont amenées tant de PME et d’ETI lorsqu’elles atteignent une certaine taille, et qu’elles sont confrontées à l’incompréhension et même parfois à l’hostilité du microcosme politique. C’est ce phénomène qui, en se traduisant par des contraintes insensées, pousse inexorablement à la désindustrialisation de notre pays et explique largement l’absence d’un Mittlestand français.
Tout le talent de Serge Kampf a été de nous montrer qu’une autre voie est possible, souhaitons qu’il continue d’inspirer des générations d’entrepreneurs !